Deux mois après que des migrants tunisiens ont été délogés du bâtiment “culturel” du 36, rue Botzaris et de son aile plus sensible politiquement du 42, rue du Plateau, ce à la demande du gouvernement provisoire de Tunisie et avec l’aide de la police française, certains dorment toujours dans le Parc des Buttes-Chaumont, juste en face, d’autres se sont repliés sur divers lieux, dans des arrondissements limitrophes. Le collectif qui leur venait en aide, composé de quelques personnes présentes depuis l’occupation express de l’avenue Simon-Bolivar (avec un délogement manu militari à la demande de la Ville au bout de trois jours) et de nombreux autres arrivés dans le courant du mois de juin, s’est réuni le vendredi 19 août et a décidé de réorienter ses actions…
Tout d’abord, fait assez exceptionnel dans ce genre de mobilisation, il convient de rappeler (ou de préciser, pour qui n’a pas tout suivi…) que ce collectif est composé de personnes ayant pour point commun d’avoir un compte sur le réseau social twitter. Le tag de ralliement étant #Botzaris36 (cliquer pour lire sur l'actualité, y compris sans compte).
Même si certains avaient eu l’occasion de se rencontrer “IRL“ auparavant (In real Life, dans la vraie vie), ce n’était pas forcément pour les mêmes motifs. Dans mon cas, par exemple, j’avais croisé @emaux du temps où Nicolas Sarkozy était pour la deuxième fois ministre de l’Intérieur, avais eu l’occasion de dîner avec @paul_da_silva l’été 2010, étais allé au restaurant tenu par @joueurs près de la Place des Fêtes, mais n’avais rencontré @MsTeshi que durant l’occupation du gymnase de la Fontaine-au-Roi, une dizaine de jours avant la migration de certains vers la rue Botzaris.
Deuxième point, et non des moindres, que la plupart des hommes (et femmes) politiques n’ont pas complètement intégré: nous n’avons pas de rapport avec les groupuscules décriés par le maire de Paris, et qui étaient à l’origine de la prise du 51, avenue Simon-Bolivar puis du gymnase de la rue de la Fontaine-au-Roi. Les deux parlementaires qui ont fait l’effort de se déplacer (Pascal Terrasse, PS, Ardèche, lire ici et Nicolas Dupont-Aignan, div. dr., Essonne, voir par là) s’en sont —il me semble— aperçu. Avant de préparer son intervention du 11 juillet en Conseil de Paris, l’unique conseiller Modem Jean-François Martins s’était enquis de la situation, et avait compris, lui aussi. De même que certains cadres de la Ville de Paris qui ont eu la gentillesse de venir nuitamment à notre rencontre, et la maraude Emmaüs, avec qui j’étais la nuit dernière en tournée pour un reportage à lire prochainement sur ce blogue…
Un parlementaire ardéchois et un autre de l'Essonne qui, chacun, n'avaient de prime abord rien à gagner à faire ce déplacement. Un conseiller de Paris qui, étant l'unique élu du MoDem, n'a pas de “poids”, mais une parole, donc lui non plus rien à gagner à prendre la position qu'il prit. Aussi fus-je étonné ce lundi soir d'ouïr à la nouvelle émission consacrée aux médias sociaux sur Europe1 l'adjoint au maire de Paris, Christophe Girard (@cgirard sur twitter), déclarer au sujet des Tunisiens de la rue Botzaris: «Ils ne veulent pas voir d'adjoint à la Culture, ils s'en foutent». Sincèrement, tout interlocuteur est le bienvenu… même —et surtout— Parisien. Rue Botzaris encore plus qu'ailleurs, puisque les Tunisiens de la rue Botzaris ne font pas partie du dispositif de la Ville de Paris, sauf pour la maraude Emmaüs, pour laquelle l'un des membres du collectif a sollicité, fin juin, qu'elle l'intègre dans son trajet.
Enfin, je l’avais déjà signalé dans mon billet factuel du 31 mai et l’ai à nouveau développé dans mon sujet plus détaillé du 9 juin, le bâtiment de la rue Botzaris revêt un caractère historique aux yeux des Tunisiens, mais aussi dans le cadre des relations franco-tunisiennes. Désormais, alors que je n’avais volontairement jamais écrit qu’il s’agissait du siège du RCD en France (sauf le 11 août ici, car j’en avais enfin la trace), je détiens quelques preuves indiscutables. Et je ne suis plus le seul, des documents ayant été dupliqués et sécurisés. Mais…
… Le collectif a déjà annoncé à plusieurs reprises depuis le 16 juin que primait la situation humanitaire. Et sur ce point rien n’a changé.
La mobilisation s’étant lancée sur twitter, c’est par ce réseau social que le collectif a décidé de rendre compte dans les heures qui viennent de la réunion du 19 août et, surtout, de lancer un appel aux politiques, et particulièrement aux candidats à la Magistrature suprême.
Dans quelques jours, l’aide de la Ville de Paris prendra officiellement fin. Elle ne visait pas directement ceux de la rue Botzaris, mais son arrêt, pour de multiples raisons, retombera aussi sur eux, déjà pénalisés depuis le début par rapport aux autres.
Les messages du collectif, une trentaine au total, diffusés comme d'habitude sur twitter, sont reproduits ici dans leur intégralité.
Fabien Abitbol, photo: le 7 juillet, trois semaines après l’annexion officielle du bâtiment par l’Ambassade de Tunisie en France, le drapeau tunisien était posé sur le fronton du 34, rue Botzaris, entrée du jardinet pour les invités aux soirées données du temps de Ben Ali.
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