Dans un communiqué commun, la Ligue des droits de l’Homme de Seine-et-Marne (LDH 77), la Cimade, le Réseau éducation sans frontières (RESF) et la CGT 77 — entre autres — révèlent la situation d’un travailleur sans-papiers de nationalité ivoiriene, victime d’un accident du travail, et maintenu en rétention après avoir été dénoncé par son ancien employeur.
Ibrahima Diarra avait été interpellé au pied de son domicile de Pontault-Combault (Seine-et-Marne, 35 000 habitants) par la police aux frontières (PAF), le 23 février dernier, après que son ancien employeur lui avait fixé rendez-vous pour… aplanir un différend entre eux, expliquent les organisations.
Employé depuis juillet 2009 dans une entreprise de BTP à Ormeaux (Seine-et-Marne, 3500 habitants), il avait été victime, en décembre dernier, d’un accident du travail. Et, alors qu’il était en contrat à durée indéterminée, s’était fait mettre dehors dès le lendemain par son employeur au motif qu’il s’agissait de la fin d’un contrat à durée déterminée, celui-ci lui ayant fait changer le contrat et ayant modifié les dates, pour le rendre rétroactif à février 2009, indique ici la LDH 77.
Ibrahima Diarra, devant le refus de son employeur de reconnaître comme tel l’accident du travail, avait saisi la Sécurité sociale, qui est entrée en contact avec l’employeur pour le convoquer pour la mi-mars. L’employeur indélicat a pris les devants, avec les moyens de la République, selon les défenseurs du travailleur sans papiers. Mais, selon l’employeur (qui se justifie maladroitement dans Le Parisien) « Je l’ai attendu à notre rendez-vous et il n’est jamais venu. C’est certainement suite à ma demande, deux mois et demi avant la vérification de ses papiers auprès de la préfecture, qu’il a été contrôlé. La préfecture a mis plusieurs semaines à me répondre et j’ai réitéré mon signalement quelques jours avant l’arrestation d’Ibrahima. »
Etrange coïncidence, surtout que cette vérification qui doit se faire avant l’embauche, et non pas après un acccident… Et comment la PAF aurait-elle pu savoir qu’il serait ce jour précis au pied de chez lui à des horaires de travail ? Ce ne peut être qu'une précision de l'employeur, ou de l'ancien employeur, qui dans ce cas n'avait aucune raison de solliciter de nouveau les services de la préfecture, sauf se débarrasser d'un employé devenu trop gênant.
Depuis, Ibrahima est séparé de sa compagne (en situation régulière et mère de quatre enfants), et dort au centre de rétention du Mesnil-Amelot.
Samedi 13 mars au matin, il passait devant un juge des libertés et de la détention, qui a décidé de son maintien en rétention. Il a décidé de faire appel de son maintien en rétention, indique RESF. Les associations se demandent si « l'Etat est bien dans son rôle quand il aide ainsi un patron voyou à se débarrasser d'un travailleur sans-papiers devenu encombrant, car moins rentable, à cause d'un accident du travail ? ». Des patrons voyous à l’endroit de qui le candiddat Sarkozy avait promis une tolérance « double zéro » (lire ici les archives du projet de campagne présidentielle, et là -en page 2- un communiqué du syndicat de la magistrature).
Ibrahima Diarra est arrivé en France en 2006, indique RESF dans cette pétition. En octobre 2006, l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) rejetait sa demande d’asile politique. Puis se mettait en ménage avec une femme, en situation régulière, mère de quatre enfants de quatre à dix-huit ans. La suite relève désormais des autorités policiaires et judiciaires, suite à l’indélicatesse (pour le moins) d’un employeur sans scrupules.
Fabien Abitbol
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