Le Nouvel Observateur fait œuvre utile cette semaine en publiant un dossier sur « Le vrai gouvernement de la France », sous-titré « Ils tiennent les rênes dans l’ombre de Sarkozy ». Et qu’apprend-on sur ces personnages qui tiennent les ficelles du vrai pouvoir ?
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Patrick Buisson, en mars 2006, sur le plateau de LCI, alors qu'il recevait Alain Soral sur le thème « Existe-t-il un lobby gay ? »
Photo LCI
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Le nom de Patrick Buisson, personnage directement issu de l’extrême-droite qui a notamment rédigé un livre intitulé OAS, histoire de la résistance française.
D’ailleurs, dans ses années lycéennes il avait refusé de se lever pour une minute de silence après un attentat meurtrier de l’OAS. Plus tard, à l’université de Nanterre, sous la direction de Raoul Girardet, spécialiste du nationalisme français, il rédige un mémoire de maîtrise sur le mouvement Algérie française. Il dirige ensuite l’emblématique journal d’extrême-droite Minute, et milite pour le rapprochement des droites. Proche de Le Pen, puis de De Villiers, il a avec eux en commun « la nostalgie de la France éternelle, une méfiance viscérale à l’égard de l’Islam, et la détestation d’une Europe fédérale ». Autre sentiment commun : rallier tous les déçus de la droite. C’est ainsi qu’il rencontre le futur président français en 1995, puis ils renouent en 2004, alors que de Buisson est devenu chroniqueur sur la chaîne d’infos en continu LCI [du groupe Bouygues, note du ouaibemaître]. C’est lui que Sarkozy va suivre irrésistiblement dans toutes les idées abjectes de la droite extrême, dont le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale. Voici comment la nostalgie a aussi pris une part du pouvoir auprès du Président.
Edifiant ! Avec Le Point, c’est plutôt la colère qui nous étreint. La une est accrocheuse « Les derniers secrets de l’OAS ». Imagine-t-on en une : « Les derniers secrets des nazis ». En pages intérieures, rubrique Société (et pas histoire), il rejoue le même « Les anciens de l’OAS ne regrettent rien », avec deux photos parlantes, celle d’un attentat en avril 1962 à Alger et celle des nostalgiques à Marignane devant leur stèle. Au moment où le souvenir se joue devant la justice pour ses stèles honnies, le journal publie plusieurs témoignages sans remords, dont celui de Philippe Castille qui avoue avoir fait « sauter l’imprimerie de Ferhat Abbas ». On apprend quand même qu’il a été formé aux explosifs par… Paul Aussaresses, sans pour autant que Le Point n’en dise plus sur ce sinistre spécialiste de la torture. Un autre déclare qu’il n’a tué personne mais a beaucoup fait tuer. Jean-Jacques Susini dispose d’une pleine page. Ce dernier, avec l’âge, confond droite et gauche, en disant que les adhérents de l’OAS étaient des « gens désespérés à l’idée de quitter leur pays, et majoritairement de gauche ».
Evidemment, dans un contexte de déliquescence progressive de la mémoire, dans 20 ans lorsque les hebdos auront recours aux témoignages des derniers survivants de l’horreur, l’OAS ne sera peut-être composé que d’anges bienfaiteurs… Mais, pour revenir au traditionnel équilibrage journalistique, les propos de Jean-François Collin, président de la nouvelle mouture de l’OAS, remise en selle sous le nom d’Association pour la défense des intérêts moraux et matériels des anciens détenus de l’Algérie française, sont rigoureusement identiques à ceux de Jean-François Gavoury, président de l’Association nationale pour la protection de la mémoire des victimes de l’OAS, fils d’une victime de Château-Royal en mars 1962 (avec Mouloud Feraoun). « Nous devons rendre hommage à nos camarades », dit l’un. « Les assassins de l’OAS veulent falsifier l’histoire », dit l’autre. Et le journal tranche-t-il ? Non, il donne la parole à un historien, Rémy Kauffer, auteur de L’OAS, histoire d’une guerre franco-française pour qui c’est « la dernière guerre civile franco-française ». L’absence d’une position journalistique reflète le malaise mémoriel dont n’est pas guérie la France. 46 ans après la fin de la guerre, c’est troublant. Il faut dire que l’hebdo joint à son offre un DVD, intitulé OAS, une histoire interdite, un film de François Margolin et Georges-Marc Benamou (proche de Sarkozy !) [au moment du tournage de ce documentaire, Georges-Marc Benamou, ancien du cercle restreint du président Mitterrand et de Pierre Bergé, ne s'était jamais affiché avec Nicolas Sarkozy, note du ouaibemaître]. Vendu 8,90 euros, on comprend que la nostalgie, même criminelle se paye.
Walid Mebarek, pour El Watan
⇒ C’est par El Watan que l’on apprenait, en mars dernier, une manifestation de nostalgiques de l’Algérie française… Place de l’Etoile, à Paris.
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