Sur les vingt articles de la Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) déférés devant le Conseil constitutionnel par les parlementaires d’opposition, quatorze ont été invalidés par les Sages, selon la décision publiée jeudi sur le site du Conseil. Sévère camouflet pour celui qui disait avoir «la banane» voici deux ans tout juste.
Un revers pour le président Sarkozy et son ancien ministre de l’Intérieur Brice Hortefeux, puisque cette loi d'orientation devait traduire les orientations ultrasécuritaires annoncées dans le «discours de Grenoble» du 30 juillet 2010.
Les débats avaient commencé à l’Assemblée au printemps 2010… donc avant le discours du 30 juillet 2010. Cette n-ième loi sécuritaire depuis l’arrivée de Nicolas Sarkozy à l’Intérieur en 2002 ne contenait alors «que» 48 articles. Au fil du temps, et le «discours de Grenoble» aidant, elle s’est enrichie de près de cent articles ou amendements, de la peine plancher pour les mineurs primo-délinquants (censurée, car contraire à la justice des mineurs) à l’assouplissement du permis à point (validé, au grand dam des associations de sécurité routière), pour arriver à ce pavé de 142 articles finalisé au Parlement le 8 février dernier et vivement critiqué par de nombreuses associations et des syndicats (notamment dans la magistrature).
Vingt ont été attaqués par plus de soixante députés et autant de sénateurs, et quatorze d'entre-eux (détaillés ci-dessous) ont été censurés lors de la séance du 10 mars. On note au passage l’absence en séance de Jacques Chirac, qui avait annoncé avant l’ouverture de son procès qu’il se mettait en congé de la rue Montpensier.
Le gouvernement, par la voix de Brice Hortefeux, avait présenté la Loppsi 2 comme «une boîte à outils à la disposition de la protection et de la sécurité de nos concitoyens». Le député UMP Eric Ciotti avait qualifié le texte de «pragmatique» et d’«ambitieux». L'Assemblée nationale l’avait adopté par 73 voix contre 29 (sur 577 députés, soit moins d’un député sur cinq présent ou représenté dans l’Hémicycle…). Le PS, le PCF et Les Verts avaient voté contre.
Concernant l’Internet, Marc Rees relève sur PCInpact comme une mise en garde à l’endroit du ministère de la Culture, et Les Echos du Net publient une réaction de Jérémie Zimmermann, porte-parole de La Quadrature du Net, quant à la validation globale de l’article 4 de la loi, qui concerne le filtrage de l’Internet.
Pour le président Sarkozy, de «la banane» il restera au moins la peau…
Fabien Abitbol, dessin de KAT
Titre modifié à 17h45: Suite à une remarque en mode “commentaires” indiquant que les médias disaient tous 13 et pas 14, il m'a paru plus juste de titrer sur «dispositions» que sur «articles», dans la mesure où l'article 90 est visé doublement par la censure. D'une part le Conseil refuse que les préfets puissent déloger les “campeurs” ou occupants sans l'aval du propriétaire à n'importe quel moment de l'année, d'autre part les Sages refusent la peine de prison d'un an et l'amende de 15000€ pour les squatteurs, ce pour des raisons purement techniques (lire ci-dessous). Dans la majorité du texte, l'emploi du mot «article» est, du reste, un abus de langage, en vue d'éviter les multiples utilisations du mot «disposition», plus approprié. En effet, plusieurs articles sont partiellement passés, vidés d'une partie de leur substance. Pour sa part, l'agence Reuters a titré hier Treize articles de la loi sur la sécurité intérieure censurés (titre approximatif aussi, certains ne l'étant que très partiellement comme le 43 sur le couvre-feu), Libé, dans Le couperet des Sages, n'a compté pour sa part que «treize dispositions», tout comme Les Echos de ce matin.
Pour une revue de détail en quatorze points de ce qui semble être l’une des plus sévères censures de la Ve République par le Conseil constitutionnel, cliquer sur «lire la suite» ci-dessous.
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