Des petits malins profitent de la flambée du prix de l'essence pour vendre des systèmes censés réduire de 20 % la consommation de carburant par simple magnétisme. Bien qu'ils assurent que leur produit fonctionne, il s'agit d'une vaste supercherie.
C'est un petit appareil en forme de tuyau qui s'installe au niveau du moteur, juste avant l'injection, sur le circuit de carburant, à la manière d'un filtre à essence. Grâce au puissant champ magnétique qu'il émet, le carburant qui passe à l'intérieur est censé retrouver la charge neutre qu'il avait perdue en s'échauffant. Résultat : le carburant se mélange mieux à l'air, la combustion est plus efficace et la consommation de carburant baisse de l'ordre de 20 à 25 %. D'où de sérieuses économies et un retour sur investissement rapide (l'appareil coûte tout de même plus de 200 euros !). Pour convaincre les plus réticents, des tests et des témoignages d'utilisateurs satisfaits sont mis en ligne sur les sites Internet de certains fabricants de ces économiseurs de carburant.
Pourtant, quoi qu'en disent leurs promoteurs, l'efficacité de ce système est loin d'être démontrée. Ces dernières années, plusieurs magazines auto-moto l'ont testé… sans succès. Sur les forums, des utilisateurs affirment également ne pas avoir constaté la moindre économie. Même les services des transports québécois se sont penchés sur le sujet dans l'espoir de réduire leur facture énergétique. Bilan : « Aucune réduction significative de consommation d'essence ou d'émissions polluantes n'a pu être observée. »
En fait, qu'ils soient magnétiques ou autres (il existe également des lubrifiants « très basse friction »), les systèmes censés économiser l'essence existent depuis longtemps et refont surface à chaque fois que le prix des carburants flambe. Pourtant, aucune étude indépendante n'a jamais prouvé leur efficacité. Adopter une conduite souple, ne pas rouler trop vite et bien entretenir son véhicule constituent des moyens plus sûrs de faire des économies de carburant.
De plus, en installant l'économiseur de carburant dans une zone aussi sensible que celle du moteur, la garantie du véhicule ne couvrirait pas les éventuels dégâts.
Cyril Brosset, pour Que Choisir du 16 juin
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Carburant : le dilemme
Alors que le baril de pétrole a battu un nouveau record cette semaine, nous avons calculé jusqu'où il était rentable de rouler quelques kilomètres de plus pour faire le plein à une station-service moins chère. Conclusion, dans la plupart des cas, un gain de 5 centimes au litre est réduit à néant par un détour de quelques kilomètres seulement.
En vertu de la loi dite de « la tartine beurrée » (1), quand un automobiliste a le choix entre deux stations-service, l'essence est souvent moins chère dans la plus éloignée. D'où une question d'actualité, en ces temps de baril à plus de cent dollars. Jusqu'où le détour est-il valable, pour 5, 10 ou 12 centimes d'écart ? Pour une petite voiture type Peugeot 107 essence, la réponse est simple et facile à mémoriser. Dix kilomètres en plus réduisent à néant une économie de 5 centimes au litre. Démonstration, à partir de tarifs relevés le 11 mars sur le comparateur national des prix des carburants du ministère de l'Économie (www.prix-carburants.gouv.fr). Un plein de 50 litres de SP 95 coûte 75 € pour un litre à 1,50 €. À 1,45 €, l'économie est de 2,50 €. À 1,37 €, elle est de 6,50 €. Or, selon les chiffres de l'Agence pour l'environnement et la maîtrise de l'énergie (Ademe), une petite voiture à essence revient environ à 0,28 € du kilomètre, tout frais compris. Le coût d'un trajet de 10 km (2,80 €) dépasse donc les 2,50 € économisés sur un plein. Parcourir une dizaine de kilomètres pour économiser 13 centimes au litre représente une économie réelle de 3,70 €.
Prenons maintenant le cas du propriétaire d'un monospace diesel. Avec un litre à 1,37 €, le plein de 70 l lui revient à 95,90 €. Il gagne 3,50 € si le litre est 5 centimes moins cher et 9,80 € à 1,23 €/l, ce qui représente pratiquement un prix plancher en ce moment. Toujours selon l'Ademe, le coût de revient d'un monospace diesel est proche de 0,58 € au kilomètre. Résultat, au volant du monospace, un détour de 6 km suffit à annuler un gain de 5 centimes à la pompe ! Son seul mérite est de faire jouer la concurrence, ce qui n'est pas négligeable.
Les estimations de coût kilométrique de l'Ademe peuvent paraître élevées, mais elles sont parfaitement en accord avec le barème des indemnités kilométriques très détaillé de l'administration fiscale. Consultable en ligne sur de nombreux sites (comme l'Urssaf), celui-ci fournit des estimations précises en fonction de la puissance du véhicule.
Il va de soi que la plupart des automobilistes font d'une pierre deux coups, remplissant leur coffre de provisions et leur réservoir de carburant à leur hypermarché, en un seul voyage. Malheureusement, le carburant ne se stocke pas en grande quantité. Les groupes pétroliers seraient donc malvenus d'invoquer l'existence de la concurrence comme un argument définitif pour refuser de modérer leur prix… En réalité, et malgré les apparences, les automobilistes représentent parfois une clientèle quasiment captive.
Erwan Seznec, pour Que choisir du 14 juin
(1) En 2001, des écoliers du Royaume-Uni ont réalisé 21 000 lancers de tartine. Elles sont tombées du côté beurré dans 62 % des cas... Cette expérience farfelue était supervisée par un très sérieux physicien, membre de la Royal Statistical Society, Robert Matthews (voir aussi Loi de Murphy, note du ouaibemaître).
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