Ce mercredi 22 juin, policiers et CRS sont intervenus aux Buttes-Chaumont, dans le 19e arrondissement, à la suite de «nombreuses» plaintes de riverains, indique la préfecture de police de Paris (PP). Les migrants tunisiens qui survivent dans le Parc depuis leur évacuation le 16 juin du 36, rue Botzaris ont été emmenés. Deux Internautes qui dormaient aux Buttes-Chaumont, ayant reçu des menaces de mort, ont annoncé qu'ils cesseraient de dormir sur les lieux.
Sur Twitter, Paul, qui avait encore dormi dehors en solidarité avec les jeunes Tunisiens, comptait ce matin «3 voitures et 4 cars de police», puis précisait: «les premiers chargés l'étaient dans des fourgons sans menottes, là c'est en voiture avec les pinces».
Au total, sur la trentaine de personnes qui avaient, comme chaque nuit depuis jeudi 16 juin, passé la nuit dehors, une vingtaine ont été interpellées en milieu de matinée. Sept d’entre eux, dont les trois mineurs, étaient libres en début d’après-midi, et quatorze étaient en garde à vue, officiellement pour «infraction à la législation sur les étrangers».
Dans la nuit, une patrouille de Emmaüs France était passée, sollicitée par une Internaute. Après avoir fait un recensement des besoins, les trois hommes qui couvrent les 19e et 20e arrondissements ont distribué des kits d’hygiène, du thé, le Guide Solidarité Paris 2011 (en version papier), les quelques couvertures de survie qui restaient à leur disposition, et ont promis de revenir jeudi soir dès leur reprise de service. Ils sont repartis vers deux heures du matin poursuivre leur tournée.
Dans la journée, Elisabeth était allée récupérer une vingtaine de sacs de couchage auprès de l’association Autre Monde, à Ménilmontant.
Des signes de solidarité nouveaux commençaient à se montrer.
Dans la soirée, pour la première fois, une chaîne de télé française, LCI (groupe Bouygues) s’intéressait aux migrants du 36. Dans l’émission centrée sur l'Internet “LCI est @ vous”, le thème principal était «Les Internautes au secours des migrants». Le sujet, partiellement tourné dans l’après-midi par Géraldine Noël, partiellement fait d’images d’Internautes, était commenté par Emmanuel Raoul et est à voir ici. Le matin tôt, très tôt, il y aavit eu cette chronique de Guy Birenbaum sur Europe 1.
Ce mercredi, le site Internet de Libération effectuait la mise à jour d’un sujet consacré à l’aide au migrants par les Internautes. Et annonçait l’arrivée des CRS.
Jusqu’ici, la mobilisation aura été citoyenne. Uniquement. Et ce n’est qu’après l’intervention de la police que la radio ExpressFM, à tendance économique et émettant sur Tunis et Sfax, a abordé le sujet, invitant @Ooouups, qui avait lui aussi passé la nuit aux Buttes-Chaumont.
Du côté des politiques, la réponse est mince. Hier, le député de l’Ardèche Pascal Terrasse interpellait via Twitter Jean-Marc Ayrault, le président du groupe socialistes, radicaux et citoyens à l’Assemblée nationale, estimant qu’il fallait une question d’actualité à l’Assemblée ou au Sénat sur les Tunisiens de Botzaris.
Au Conseil de Paris, Danielle Simonnet, secrétaire nationale du Parti de Gauche et par ailleurs en charge du dossier Migrations, est intervenue sur le sujet. Elle avait été avertie en temps réel de la destruction par la police lundi de l’unique refuge des Tunisiens.
Quant à Roger Madec, le maire (PS) de l’arrondissement, il a publié le 21 juin ce communiqué, relatif à l’expulsion du 7 juin (qu’il date du 8), donc en fait la première. Depuis, il y a eu une nouvelle expulsion, le 16. C’est depuis cette date que les jeunes dorment dehors, sur le trottoir d’en face, dans le même arrondissement… Mais cela, au fond, ne change rien au problème pour lequel M. Madec estime qu’«une étude des situations individuelles s’impose».
Sur Twitter, un brin énervée, la conseillère régionale socialiste Nadège Abomangoli lance: «Quand on aura fini de discuter des primaires, on ira peut-etre discuter d'humanitaire à #Botzaris36». Une parole pleine de bon sens, qui vaut autant pour les hommes politiques que pour beaucoup de médias.
L’Ambassade de Tunisie aussi a tardé à réagir. Alors que la seconde évacuation, rappelons-le, remonte au 16 juin, ce n’est que par un communiqué du 20 juin qu’elle indique poursuivre «ses démarches auprès des autorités françaises compétentes aux niveaux gouvernemental et local, et multiplie les contacts avec le tissu associatif et les acteurs de la Société civile pour trouver des solutions durables et dignes».
Pour l’instant, on ne voit rien de digne. On n’ose même pas espérer du durable…
Sur le site Internet de la Ville de Paris, sous le titre Migrants tunisiens: le dispositif d’aide continue, la Ville rappelle ce mercredi 22 juin la série de mesures prises depuis fin avril, et demande «l’arrêt immédiat des interpellations de réfugiés tunisiens». A 17h, la Ville de Paris ne proposait rien de plus pour les jeunes des Buttes-Chaumont chassés de la rue Botzaris.
Joint par téléphone à 17h15, Paul confirmait que lui et Elisabeth avaient décidé de ne plus dormir sur place, suite aux menaces de mort qu'ils avaient reçues de quelques personnes. Après avoir pris conseil, Paul devait déposer une main courante et pensait avoir une protection. Hier soir, trois hommes exigeaient de lui qu'il révèle l'identité de certains de ses informateurs, et se montraient ouvertement menaçants, en public… «Moi et @Paul_Da_Silva on a vu bcp de choses, compris bcp de choses, eut des trucs chelouds. Bref.», écrivai Elisabeth à 17h30.
Fabien Abitbol, photos: @MsTeshi (haut), @Menilmuche (bas)
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