La police a procédé mercredi 4 mai peu avant 14 heures à l’évacuation du 51 avenue Simon-Bolivar, dans le 19e arrondissement, à la demande de la Ville de Paris. Une vingtaine de manifestants auraient été interpellés en sus des occupants de l’immeuble, au nombre de 138 à l’heure de l’intervention, dispersés dans plusieurs commissariats.
Des occupants du 51 emmenés vers un autocar de police (photo Pierre Morel)
L’immeuble était occupé depuis le 1er mai par des hommes, essentiellement des Tunisiens, qui avaient dans un premier temps refusé la maigre proposition d’hébergement de la Ville de Paris.
Puis, mardi, la Ville a proposé un meilleur accord, accepté dans l’après-midi par les squatteurs. Un communiqué de l’Association Aurore (à lire ici) détaillait le dispositif de logement provisoire: 100 places (maximum 130) par France terre d’Asile et 80 places par Aurore. Des places se trouvaient à deux pas de l’Elysée, relevait avec malice Le Parisien. En cette période de restrictions annoncées sur l’espace Shengen, joli pied de nez.
Dans la soirée de mardi, un revirement a eu lieu au sein des squatteurs, et peu d’entre eux ont quitté les lieux. Le soir, vers 23 heures, alors qu’un important rassemblement se maintenait, les forces de l’ordre arrivaient nombreuses, stationnant rue des Pyrénées et devant la CFDT. Une barrière était dressée devant l’immeuble occupé, jusque vers minuit et demi (voir photo ci-dessus). La police ne quitta les lieux que vers 1h30 du matin. Vu de l'extérieur, l'ambiance était plus tendue que la veille.
Depuis dimanche, les «Tunisiens de Lampedusa», pour la plupart des ressortissants tunisiens munis d’un visa Schengen, mais aussi quelques Libyens, augmentaient en nombre. Les premiers étaient venus de La Villette, rejoints par la suite par d’autres, venus de Couronnes ou d’autres lieux de l’Est parisien. Au total, mardi soir, ils étaient vraisemblablement environ deux cents dans cet immeuble avec eau et électricité, mais sans sanitaires et dans un immeuble présentant «une insuffisante résistance au feu», selon un communiqué de la Ville de Paris, propriétaire des lieux. Seuls une dizaine d’entre eux avaient rejoint les structures associatives qui avaient été proposées dans la journée.
L’ultimatum pour libérer les lieux avait été fixé au mercredi 4 mai à 13 heures, explique Serge Quadruppani dans son récit illustré.
Depuis le Parc des Buttes-Chaumont, on voit à gauche la CFDT et à droite l’immeuble de désaffecté de la Ville (photo Zoelapo)
Mercredi, peu avant 14 heures, la police venue massivement sur place —environ 250 policiers et gendarmes— procédait à l’évacuation du bâtiment et à des interpellations parmi les soutiens qui se trouvaient sur les lieux. «Une vingtaine de manifestants» étaient interpellés, indique ce communiqué de la CIP/Ile-de-France faisant état de la présence du ministre de l’Intérieur au commissariat d’arrondissement.
Dans un communiqué publié ce mercredi, la Ville de Paris indique être à l’origine de cette évacuation car «ce lieu est reconnu comme dangereux et n’est nullement conçu pour servir d'hébergement». Et la Ville rappelle que représentants et élus ont, mardi, «tenté de convaincre les ressortissants tunisiens présents de quitter le lieu pour rejoindre les hébergements que la Ville finance: 112 places d’hôtels sont actuellement proposées par France Terre d’Asile et 100 places ont été ouvertes hier soir par l’association Aurore. Une quarantaine de places supplémentaires pourraient être ouvertes ponctuellement».
La pierre d’achoppement viendrait, selon la Ville, de «la présence de collectifs militants anarchistes ou radicaux qui ont préféré dénigrer l’action et l’engagement de la Ville et des associations plutôt que d’accompagner et d’aider réellement les ressortissants tunisiens».
La Ville dénonce la «lourde responsabilité» prise par ces collectifs «en entraînant» les Tunisiens «à rester sur place» et «en les encourageant explicitement à affronter les forces de l’ordre».
Dans un communiqué publié sur son blogue peu après 18h, le maire d’arrondissement, sénateur PS de Paris Roger Madec, «remarque que ces militants anarchistes et radicaux ont lâchement quitté les lieux pendant l’intervention de la police et donc n’ont pas ou peu été inquiétés par les arrestations qui en découlent». Il «souhaite que soient apportées des solutions humanitaires aux migrants tunisiens et que les situations individuelles soient étudiées avec pragmatisme».
Fabien Abitbol
[mise à jour de 18h25: ajout de la réaction de Roger Madec]
Les commentaires récents