Un nouveau pas franchi…
Lundi et mardi, des incidents graves se sont produits lors de rafles effectuées dans les quartiers de l’Est parisien, aux abords d’établissements scolaires, (maternelles et primaires), avec mardi un affrontement plutôt musclé, la police n’hésitant pas à faire usage d’un chien, de gaz lacrymogènes puissants et à confisquer à une journaliste sa carte professionnelle et ses papiers d’identité (sa caméra a pu être sauvée de justesse).
Lundi 19 mars en fin de journée, des parents d’élèves, des passants et des militants de RESF avaient assisté à une tentative d'arrestation devant l'école maternelle Rampal (19e) d'une dame venue chercher une petite fille à la sortie de l'école. Malgré l'intervention des parents présents, et celle d'enseignants, les policiers ont fouillé et interrogé cette femme, prenant de haut les protestations, devant les enfants et parents traumatisés. Ils l'ont ensuite emmenée pour une destination qu'ils n'ont pas voulu préciser, laissant la petite fille désemparée...
Les forces de l'ordre ont fini par relâcher leur proie plutôt que de provoquer une émeute. Cet incident a eu lieu lors d'une énième rafle dans le quartier de Belleville.
Le lendemain, mardi 20 mars, même heure (alors que de nombreuses personnes se trouvaient au parrainage républicain du 20e), au même endroit, après plusieurs allers-retours dans le quartier, les policiers ont assiégé un café très fréquenté par des Asiatiques (aux abords de quatre écoles, dont Lasalle et Rampal), et y ont notamment interpellé un grand-père de deux enfants, un de quatre ans de la maternelle Piver et l’autre de dix ans, scolarisée à l’école élémentaire du 77, boulevard de Belleville (11e).
Après l'avoir maintenu dans le café pendant plus d'une heure, la police décidait d'embarquer ce grand-père juste avant la sortie d'école de 18 h. Les parents d'élèves, des enseignants, les militants de RESF et les habitants du quartier tentaient d'intervenir. La réaction des policiers fut immédiate : ils cherchaient violemment à disperser la mobilisation, n'hésitant pas utiliser la violence physique et un peu plus tard à asperger la rue de gaz lacrymogène. Les parents présents aux sorties d'écoles, avec leurs enfants et leurs poussettes, atteints par les puissants gaz se sont réfugiés dans l'école élémentaire Lasalle pour fuir cette scène traumatisante.
Le grand-père a été emmené dans un commissariat du 2e arrondissement. Selon une militante du Réseau éducation sans frontières, « les différents véhicules de police ont failli se rentrer dedans à plusieurs reprises », tant la confusion était grande entre les différentes équipes de police. Dans les échauffourées, une journaliste à qui les policiers voulaient empêcher l’utilisation de la caméra a eu le temps de mettre son matériel à l’abri. Toutefois, sa Carte de presse et ses papiers d’identité lui ont été confisqués. Contactée dans la soirée, on a appris qu’il ne lui manquait plus « que » ses papiers d’identité. Un militant de RESF, pour sa part, a eu ses lunettes cassées.
Quelque temps après, les rafles se poursuivaient à Goncourt (avenue Parmentier, où au moins neuf personnes ont été interpellées et emmenées au commissariat d’arrondissement) et à la rotonde de Stalingrad.
Non contents d'augmenter la cadence des contrôles au faciès (interdits par la loi française et que la Grande-Bretagne souhaite instaurer), parfois en dehors de tout cadre judiciaire, « les fonctionnaires de police ont choisi cette fois de violer le dernier refuge des valeurs de la République, à savoir l'école », indique un communiqué de RESF, qui se termine sur ces réflexions et interrogations du Comité de soutien Lassalle-Rampal et de RESF Paris :
« Le Préfet de Police de Paris aurait tort de sous-estimer la colère grandissante que provoquent ces procédés iniques et circonstanciels dans les quartiers dits "populaires". La peur cède peu à peu à la détermination d'y mettre fin, on l'a vu ce soir.
« Nous partageons cette détermination. Le procédé de rafle est en lui-même odieux parce qu'il bafoue l'ensemble des droits fondamentaux des personnes humaines. Et doublement insupportable quand les institutions de la République sont elles-mêmes visées.
« Nous rappelons aussi les garanties données à RESF à deux reprises pendant l'été 2006 (le 5 juillet et le 27 juillet) par la Préfecture de Police : qu'il n'y aurait pas d'interpellations dans et aux abords des établissements scolaires. Désormais, devons-nous tenir pour caducs ces engagements ? »
Parmi les personnes gardées au commissariat principal du 11e (14, passage Charles-Dallery, près du 138, avenue Ledru-Rollin), une personne a pu être identifiée : il s'agit d'un ressortissant chinois ayant deux filles scolarisées dans deux établissements différents.
Un rassemblement est prévu ce mercredi matin, à 10 h, devant le commissariat du 11e.
Comme suite à l’interpellation de lundi soir dans le 19e, M. Eric Ferrand, conseiller de Paris (élu MRC du 11e), adjoint au maire de Paris, chargé de la vie scolaire et de l’aménagement du rythme scolaire, a publié un communiqué de protestation que l’on peut lire ici.
Fabien Abitbol
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