Protection renforcée autour de la ministre
La ministre de la Santé
Roselyne Bachelot a estimé mardi que des études fiables ont conclu à
l'innocuité des biberons fabriqués avec du bisphénol A (BPA). Répondant à
l’Assemblée à une question du député (NC) de Seine-Saint-Denis Jean-Christophe Lagarde, Roselyne Bachelot, a indiqué qu’il n’y avait pas lieu
d’appliquer le principe de précaution pour cette substance, pourtant interdite
au Canada et qui fait débat aux Etats-Unis… La protection de Mme Bachelot a été
renforcée et son agenda n’est plus divulgué au grand public.
« Le principe de
précaution ne s'applique qu'en l'absence d'études fiables. Là, les études
fiables existent et concluent en l'état actuel de la science à l'innocuité des
biberons fabriqués avec ce composé chimique (…) Le principe de précaution est
un principe de raison, il n'est en aucun cas un principe d'émotion ».
C’est ainsi que la ministre de la Santé a parlé, mardi, au député Lagarde du
Bisphénol-A. Il s’agit, pourtant, d’un composé chimique qui intervient
dans la fabrication des emballages alimentaires et qui inquiète des
associations. Si, pour la ministre (française) de la Santé, des « études
fiables » auraient conclu à l'innocuité des biberons, divers récipients
alimentaires fabriqués avec la même substance font l’objet d’une réglementation et d’un suivi au Canada. Le Baby-blog (filiale de Doctissimo, fondé par le secrétaire national de l’UMP Claude Malhuret) a indiqué ici que les six principaux fabricants de biberons des Etats-Unis n’en
fabriqueraient plus. Des parlementaires ont, dit-on, déposé le 13 mars une
proposition de loi pour l'interdire.
Ainsi, d’un côté à l’autre de l’Atlantique, les avis divergent. Et les consommateurs nord-Américains sont (une fois n’est
pas coutume) mieux protégés que les européens…
La ministre Bachelot met en
avant les résultats des études menées par l'Agence française de sécurité sanitaire
des aliments (Afssa) et
qui aurait conclu à l'innocuité du BPA, même en cas de choc thermique
important. « Ces études sont confirmées par l'ensemble des grandes agences
sanitaires », a ajouté Roselyne Bachelot devant les députés, citant
notamment l'Autorité européenne de sécurité des aliments. Problème : sur
le site de l’Afssa, en cherchant bien, on ne trouve rien de neuf depuis ce 4 questions concernant le Bisphénol-A (daté du 7 mai 2008, renvoyant sur ce sujet en anglais du 25 avril 2008), et cet avis d’octobre (nous sommes déjà en avril… 2009) sur les biberons susceptibles d’aller au micro-ondes. Comme
si seuls les biberons pouvaient représenter un danger. Comme si seul le four à
micro-ondes était utilisé pour faire manger les nourrissons.
La dangerosité du Bisphénol-A n’est pas évaluée de la même manière outre-Atlantique. En France, plusieurs
scientifiques, des ONG de défense de l'environnement et des associations de
malades ont également lancé fin février un "Réseau Environnement Santé" dont la première campagne a pour objet le bisphénol A (avec une pétition électronique pour les ministres de l’Ecologie
et de la Santé).
Le 19 novembre 2008, sous
le titre « Un biberon pour la route », le Canard enchaîné dénonçait
un conflit d'intérêt, faisant remarquer que plusieurs membres du comité
d'experts de l'Afssa étaient… employés par l'industrie du plastique, en quoi
sont fabriqués de nombreux biberons.
L'agenda de Roselyne Bachelot
suspendu « par mesure de sécurité »
On
apprend par ailleurs que la protection de Roselyne Bachelot a été renforcée et que le cabinet de
Roselyne Bachelot a décidé de suspendre la diffusion de l’agenda hebdomadaire
de la ministre, « par mesure de sécurité ». Une décision qui fait
suite à une lettre de menaces reçue le 19 mars par le bureau de l’AFP à Montpellier, et qui vise à rendre
« moins facilement repérables » les activités et déplacements de
Mme Bachelot, a-t-on expliqué à l’AFP. Signée par une "Action Armée Défense des Malades" et postée le 16 mars du bureau de
poste de Montpellier centre (selon le cachet), la lettre de menaces accusait la
ministre d’avoir « supprimé des milliers de lits dans les hôpitaux, vidé
de leurs substances tous les services comme Gap et Le Havre » et de
prévoir « des milliers
de licenciements alors qu’il manque du personnel ». Elle lui demandait de
« cesser immédiatement les réformes ».
Craignant une perte de 1
000 à 1 200 emplois (soit 700 emplois équivalent temps plein) le maire de Paris, Bertrand Delanoë, avait annoncé qu’il ne voterait pas le budget de l’AP-HP, dont il est le
président. Une grève administrative des médecins de l’AP-HP a démarré ce week-end, au
lendemain du vote du budget, adopté par trois voix d’écart : ce budget prévoit entre autres un déficit de 100 M€ et un regroupement des hôpitaux en onze établissements.
Fabien Abitbol
è Le BPA et les biberons (Culture Sciences-chimie, 25 mars)
è Bisphénol-A : un projet de loi vise à l'interdire aux États-Unis, les
autorités françaises ne s'inquiètent toujours pas (Le Point, 16 mars)
è Création d'un Réseau Environnement Santé pour peser sur les politiques
publiques (AFP, 3 mars)
è A partir de cette semaine, sur les agendas ministériels, le nom de Roselyne
Bachelot ne figure plus
Les commentaires récents