Un vol de denrées alimentaires a été enregistré par le
commissariat central du 16e arrondissement lundi. Au domicile parisien du sénateur (ex-RPR, ex-UMP) Gaston Flosse, dont l’immunité parlementaire doit être examinée mercredi par le
bureau du Sénat. De prime abord, seuls un melon et des yaourts ont disparu,
ainsi que les reliefs du repas. Pas même son véhicule, dont les clefs étaient pourtant imprudemment laissées dessus…
Le sénateur, qui se dit ici « victime d’un harcèlement médiatique indécent », avait quitté la
Polynésie le 16 juillet pour Paris, selon les indications fournies par son
blogue. Samedi, Les Nouvelles de Tahiti avaient raconté ici une perquisition intervenue trois jours plus tôt à la banque de Tahiti (BT), pour s’intéresser aux finances
de Gaston Flosse, et « plus particulièrement à un prêt souscrit pour le
rachat en 1994 de l’hôtel particulier du 90, rue du Ranelagh, une bâtisse vendue pour 12
millions de francs français par une filiale du groupe Suez-Lyonnaise des Eaux à
la SCI Rikitea, gérée par Gaston Flosse ». Le journal détaille par le menu
ce qu’il appelle les trois « affaires en or » du sénateur (montage financier
complexe, ancien dirigeant du RPR proche de Jacques Chirac, etc…).
Le tout à prix d’ami, et l’équivalent de deux millions
d’euros qui n’auraient jamais été remboursés par M. Flosse… lundi 20 juillet au
matin (19h20, heure de Paris), l’affaire était relayée ici par l’agence tahitienne de
presse (ATP) qui, citant le site Tahiti today (proche du parti de Gaston Flosse) relatait une étrange visite
dans ce fameux hôtel particulier du 16e arrondissement.
Alors que, paraît-il, la cave du sénateur est bien garnie,
aucune bouteille n’a disparu. Rien n’aurait été volé, selon ce qu’il a déclaré
à la police (pour lire le procès-verbal, cliquer une fois dessus, puis une
deuxième fois pour l’agrandir). Rien, sauf un melon et des yaourts. Et les voleurs (ou le voleur) sont partis avec les déchets… ce qui, on imagine, fera dans les statistiques de la police une affaire non résolue.
L’agent de
police judiciaire qui a rédigé le PV d’infraction lundi à 11h55 a mentionné « vol par escalade (tentative) ». De quoi motiver les collègues un peu moins qu'avec ce braquage rapidement résolu. La lecture du PV vaut le
détour. Et on y apprend que M. Flosse laisse les clefs de sa voiture à l’intérieur
du véhicule, et que son « attaché caisse » (sic !) a changé de place pendant
qu’il dormait avec sa compagne.
Tout ceci, en soi, peut (pour le moins…) prêter à sourire.
D’autant que les policiers parisiens ont souvent autre chose à faire, même dans
le 16e arrondissement. Peut-être le sénateur se trouve-t-il un peu inquiet,
car, voici deux semaines, le parquet de Papeete a demandé que soit levée son
immunité parlementaire, pour une affaire de corruption de l’ordre du million et
demi d’euros dans laquelle sa secrétaire est en détention provisoire, elle aussi. Au total, pour
l’instant, sept personnes sont mises en examen dans l’affaire de l’annuaire de
l’office des postes et télécommunications (OPT), dont l’ancien député Emile
Vernaudon, et l’homme d’affaires Hubert Haddad, qui a vainement tenté de faire jouer une immunité diplomatique comme conseiller du
président du Burkina Faso… oubliant qu’il est ressortissant français et a été
interpellé en France métropolitaine.
Des sushis à se faire…
Pour ce qui est de l’immunité, parlementaire celle-là, du
sénateur Flosse, cette dépêche AFP relayée par Easydroit signale que le bureau du Sénat doit
l’examiner mercredi.
Voilà donc l’une des raisons pour lesquelles le sénateur
Flosse se trouve présentement à Paris, ce qui n’explique pas nécessairement
l’étrange visite dont il dit avoir été victime. Maintenant, pour les curieux
qui se demanderaient pourquoi il n’est pas venu plus tôt à Paris (profiter des
soldes, assister aux cérémonies du 14-Juillet, …), c’est tout simplement parce
qu’il avait à répondre, devant la cour d’appel de Papeete, de l’organistion d’une soirée privée. Oh, une petite somme, comparativement au
reste. De l’ordre de 19 000 de nos euros. Mais l’affaire dite « des
sushis », dont le délibéré est fixé au 24 septembre, lui avait (entre
autres) valu un an d’inéligibilité en première instance. Le procureur a demandé
l’aggravation de l’ensemble des peines…
Paris-Normandie, propriété du résident helvétique Philippe Hersant par l’entremise du Groupe Hersant
média (GHM), écrivait ici lors de la transmission du dossier par Michèle Alliot-Marie au
Sénat : « A l’Elysée, il n’a plus d’amis pour faire barrage à la justice ». Avec Nicolas Sarkozy à l'Elysée, on peut — sur ce genre d'affaires — faire confiance à la presse Hersant, si elle est la première (ou dans les premiers) à évoquer un lien entre politique et justice. Comme on pouvait lui faire confiance, par exemple, lorsque Jacques Chirac était à Matignon et Bernard Pons rue Oudinot, voici un peu plus de vingt ans…
Fabien Abitbol
La lecture attentive du début du procès verbal permet tout
de même de constater que la police connaît ses priorités. « Agissant en
vertu et pour l’exécution des instructions reçues de notre Chef de service… »,
a écrit la femme policier qui a reçu au commissariat le plaignant…
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