L’acteur a tiré sa révérence dimanche
On ne verra plus, à travers les rues de l’Est parisien, sa silhouette dégingandée hanter les rues et les rades du coin (il habitait rue des Boulets, non loin du MK 2 Nation) : Farid Chopel est mort ce dimanche en milieu d’après-midi à l’hôpital Cochin, a indiqué son attachée de presse, qui a annoncé que son dernier film sortirait en mai : Un si beau voyage.
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« Farid Chopel nous a quittés à 16h30 des suites d'un cancer foudroyant », a déclaré dimanche Mme Michelle Latraverse. Son cancer avait été diagnostiqué lors de son hospitalisation, il y a quatre semaines à l'hôpital Cochin, a-t-elle précisé. Après une longue éclipse, il était seul sur scène, pour le one man-show « Le Pont du milieu » (photo ci-contre) qui précédait de deux ans la publication de son autobiographie où il expliquait entre autres ses déboires avec l’alcool.—————
Le tournage de Un si beau voyage, dans lequel Farid Chopel tient la vedette, avait démarré mi-avril 2007. Entre Paris et la Tunisie. Le film sortira « courant mai » a affirmé sans plus de précisions son attachée de presse ce dimanche soir au téléphone, visiblement émue. La vie de Farid n’avait rien de rose.
Son errance dans le 11e et dans le 20e, les endroits où il m’avait été donné de le rencontrer « en privé » étaient à l’image de sa vie professionnelle : sinueuse. En 2005, cet artiste aux multiples facettes avait publié avec sa compagne Brigitte une autobiographie (« Et je danse encore », ed. Privé) dans laquelle il parlait, entre autres, de son combat contre l'alcool. C’est l’année où je ne le fis plus que le croiser occasionnellement dans la rue : j’avais arrêté de boire.
Né en décembre 1952 de parents immigrés algériens, Farid conservait - comble de l’ironie - un excellent souvenir de sa publicité pour une eau pétillante. Mais sa filmographie, bien que marquée d’un « trou » de dix ans, était impressionnante (voir ci-dessous).
Côté théâtre, il avait été formé jeune au théâtre gestuel et expérimental, créé de nombreuses pièces comme auteur et interprète, s’était produit au mythique Palace, haut-lieu des nuits parisiennes et avait aussi fait des longues tournées. Il était attendu le 26 avril à Muret (Haute-Garonne, festival annoncé depuis octobre) à une petite trentaine de kilomètres de Cintegabelle, dont Lionel Jospin a été une quinzaine d’années élu local.
Farid Chopel était capable du plus sérieux et du plus ambitieux, comme l'adaptation du "Prophète", de Khalil Gibran, mis en scène par Elias Tabet (une œuvre qu'il a jouée avec un chœur de cinq comédiennes dans différentes églises parisiennes) ou "Pierre et le loup", au théâtre du Châtelet, en décembre 2005, dont il était le récitant, accompagné de l'orchestre de chambre Pélléas, comme du nonsense et de l’absurde, avec notamment "Les Aviateurs" (1981), co-écrit avec Ged Marlon (qui vient de refaire surface avec un certain succcès).
Une fois où je lui demandais si non nom était le vrai, il me répondit que non. Qu’il s’appelait en réalité Rabia. Mais qu’il avait changé pour « faire mieux »… « Mais Farid ? », lui demandais-je. « Ah, ça, c’est une affaire entre moi et moi ». Il m’apprit aussi qu’il avait été un proche de Coluche, ce que Coluche, lui, ne m’avait pas dit, mais que j’avait eu l’occasion de lire. Cachotteries, absurdités, apparence, nonsense. D'aucuns - pas racistes pour deux sous - disaient de lui qu'il étaient un « titi parisien » ; d'autres un « Buster Keaton à la française ». En rédigeant ces quelques lignes, je me demande si tous n'avaient pas un peu (pourquoi « un peu » ?) raison.
Farid Chopel nous a fait un multiple sale coup. Celui partir sans faire la promo de son dernier film (son cancer foudroyant a été diagnostiqué il y a un mois), celui de mourir alors qu’il pouvait relancer sa « carrière », celui de nous quitter alors que les médias ont les yeux rivés sur Aimé Césaire, un peu sur Germaine Tillion, et ont, pour beaucoup, « zappé » les vingt ans de la disparition d’un grand humoriste français, Pierre Desproges, le 18 avril 1988, elles-mêmes estompées médiatiquement par la disparition du parlementaire martiniquais. Etonnant, non ?
Adieu l’artiste. Désolé, je ne serai pas à tes obsèques, ayant prévu de m’absenter de Paris. Mais comme je dis toujours, tu ne seras pas aux miennes non plus !
Fabien Abitbol
Filmographie :
1983 : "Les Princes" (Tony Gatlif)
1983 : "L'Addition" ( Denis Amar)
1983 : "La Femme de mon pote" (Bertrand Blier)
1984 : "Les Fauves" (Jean-Louis Daniel)
1984 : "La Vengeance du serpent à plumes" (Gérard Oury)
1985 : "Sac de nœuds" (Josiane Balasko)
1986 : "Suivez mon regard" (Jean Curtelin)
1987 : "Iréna et les ombres (Alain Robak)
1987 : "Jane B. par Agnès" V. (Agnès Varda)
1989 : "Le Banquet" (Marco Ferreri)
1991 : "La carne" (La Chair), (Marco Ferreri )
1992 : "Un vampire au paradis" (Abdel Krim Bahloul)
1996 : "Mo'" (Yves-Noël François)
1996 : "Rainbow pour Raimbaud" (Jean Teulé)
2005 : "C'est Gradiva qui vous appelle" (Alain Robbe-Grillet)
2007 : "Un si beau voyage" (Kahled Ghorbal)
⇒ Le site officiel de Farid Chopel
⇒ L’annonce du décès sur La Tribune de Genève (AFP)
⇒ L’annonce du décès sur le Nouvel obs (AP)
⇒ Le sujet du Parisien, repris sur le site officiel de Farid Chopel.
Le ouaibemaître s’absentant de Paris pour quelques jours (mais ayant accès à un ordinateur…), il compte sur la vigilance des personnes intéressées pour surveiller la date et le lieu des obsèques, et au besoin les mettre en commentaire, qui seront validés au moins chaque soir. Mais peut-être que les voisins du Belleville Blogue donneront l’information ?
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