Mieux vaut prendre les transports en commun ou suivre les
conseils de la police
Dans un communiqué d’une exceptionnelle longueur (cinq
pages, dont deux infographies), la préfecture de police de Paris (PP) a mis en garde ce matin sur son site Internet rénové les automobilistes franciliens sur les forts risques
de perturbation de la circulation le mardi 27 avril, dès 6h du matin, sur six
des autoroutes et sur une grande partie de l’Est de la capitale. Baisse de revenus, faillites et suicides au menu : les
agriculteurs souhaitent avoir plus de blé. Le commissaire européen à
l’Agriculture arrive mercredi à Paris…
Ce mardi 27, « plusieurs organisations syndicales
agricoles appellent leurs sympathisants à manifester sur la voie
publique », avertit la PP. Les principales difficultés en Ile-de-France
sont attendues, selon les prévisions de la Direction de l’Ordre public et de la
Circulation (DOPC) à l’arrivée des manifestants (de 6h à 11h) et à leur départ, entre 15 et
18 heures comme l’indique la carte (cliquer pour agrandir).
Dans Paris, les problèmes devraient se situer
essentiellement dans un large périmètre autour de la Place de la Nation,
incluant les 11e, 12e et 20e arrondissements (en sus des traditionnels marchés
alimentaires du mardi), ainsi qu’aux abords du bois de Vincennes et des entrées
et sorties sur la capitale. Pour accéder à la rubrique
« circulation » de la PP, cliquer ici, puis sélectionner la date de la manifestation (27 avril).
« Afin de garantir le bon déroulement de cette
manifestation et de limiter les embarras de circulation dans la région
Ile-de-France et dans la capitale, la préfecture de police met en place un
dispositif spécifique de circulation et d’information auprès des Franciliens et
des Parisiens », indique la PP.
Dès 6 heures du matin, les différents cortèges d’engins
agricoles venus de divers coins de France devraient approcher de la porte de
Vincennes, en provenance des péages autoroutiers des voies A1, A3, A4, A6, A10
et A13… pour se rassembler à la place de la Nation. Le cortège doit par la
suite défiler, à partir de 10h30, de Nation à République par le boulevard
Diderot, l'avenue Daumesnil, la rue de Lyon, la place de la Bastille, le
boulevard Beaumarchais, le boulevard des Filles du Calvaire, et le boulevard du
Temple.
Puis, à la place de la République, des manifestants (venus
eux par autocars) se joindront au cortège… qui repartira en direction de la
place de la Nation par le boulevard Voltaire, laissant les tracteurs en queue
du cortège. La dispersion est prévue sur la place de la Nation à partir de 15h00,
et les forces de l’ordre se réservent la possibilité de bloquer la circulation
à chaque fois que les circonstances l’exigeront.
Les cortèges quitteront Paris à compter de 15 heures par
les mêmes axes autoroutiers qu'à l'aller, d’où des perturbations prévisibles en
direction de la banlieue et de la province au moins jusqu’à 18 heures.
La PP a d’ores et déjà prévu que la circulation sera
impossible dès 09h00, dans un périmètre compris entre la porte de Vincennes et
la place de la Nation, puis, à partir de 10h00 sur la place de la Nation et ses
abords, puis dans un plus vaste périmètre de la place de la Nation à la place
de la République. Aussi, elle conseille vivement aux automobilistes de ne pas
utiliser leur voiture mardi et recommande très aux personnes devant se rendre
en Ile-de-France ou s’y déplacer (ainsi que dans l’Est parisien, évidemment)
d'utiliser les transports en commun.
Toutefois, pour les personnes « obligées »
d’utiliser un moyen de transport individuel, divers moyens d’information
actualisés en temps réel sont prévus. Franciliens et Parisiens pourront
obtenir, à tout moment, des renseignements sur les conditions de
circulation :
• en consultant le site internet de la préfecture de
police, rubrique circulation (choisir la date du 27 avril en haut à droite de la
carte), mis à jour en temps réel et qui fera état des difficultés de circulation
;
• auprès du centre régional d’information et de
coordination routière de Créteil (CRIR Ile-de-France, plus connu sous le sobriquet de Bison futé) pour ce qui
concerne la région Ile-de-France en composant le 0800 100 200 ;
• en écoutant les flashs d’informations diffusés en direct
à partir du centre d’information et de commandement régional de circulation de
la préfecture de police par les deux radios préconisées par la PP, l’une
publique (France-Bleu sur 107.1 MHz), l’autre commerciale (RMC Info sur 103.1).
Pourquoi cette manif ?
Répondant à une question écrite de janvier 2010 posée par le sénateur socialiste de l’Aveyron et maire de Saint-Affrique Alain Fauconnier, le secrétaire d’Etat Hervé Novelli, en charge du Commerce, de l'Artisanat, des Petites et Moyennes
Entreprises, du Tourisme, des Services et de la Consommation avait annoncé que
les agriculteurs pourraient (à compter de 2011) opter pour le statut d'« entrepreneur individuel à responsabilité limitée » (EIRL, voir ici). Ce texte avait été présenté dans l’urgence, après une déclaration du président Sarkozy
sur TF1, dans un show devant onze téléspectateurs que même l’agence SWISS TXT avait jugé « controversé ».
Par le choix du statut de
l’EIRL, en cas de faillite de l'agriculteur, ses créanciers ne pourront saisir
« que » le patrimoine professionnel affecté à l'activité. Quant à ses
créanciers personnels, ils ne pourront pas toucher aux biens affectés à
l'activité professionnelle. Sur le plan de la fiscalité, l'agriculteur pourra
choisir l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) ou l'impôt sur les
sociétés.
Les faillites se multiplient, comme pour d'autres petites entreprises, engendrant des drames personnels (lire : Si mon exploitation agricole fait faillite, mon couple aussi). Quant au taux de suicides chez les agriculteurs, il serait nettement supérieur à la moyenne nationale. Le sénateur UMP de la Manche et président du conseil général, Jean-François Le Grand avait tiré la sonnette d'alarme à l'automne 2009, sans être entendu par les pouvoirs publics, semble-t-il.
Les milliers de tracteurs
et d'agriculteurs attendus mardi à Paris pour dénoncer une baisse de revenus
(pour certains jusqu’à 50% en un an) seront principalement des céréaliers.
Selon la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), ils pourraient être environ cinq mille, dont 1000 à 1200 en tracteur, à
prendre part à cette manifestation, épaulés par quatorze fédérations régionales
d’agriculteurs (FRSEA, site ici) des 22 régions de France métropolitaine, d’où les six axes autoroutiers
concernés en Ile-de-France. « Dans les débats à venir sur la réforme de la
politique agricole commune, la France doit avoir comme priorité absolue le
maintien, la mise en place d'outils permettant de gérer les marchés en cas de
crise comme celle que connaît le secteur des grandes cultures
aujourd'hui », revendique la FNSEA dans un communiqué. Voir ici l’ensemble des revendications, en texte et vidéo.
Cette manifestation a été
prévue lors du dernier congrès de la FNSEA, qui en appelle à Bruno Le Maire :
« Les prochaines semaines seront déterminantes car le Ministre de
l’agriculture devra batailler pour arracher des avancées concrètes tant à
Bruxelles qu’auprès de ses collègues du Gouvernement ».
La baisse des aides pour les
céréaliers, à hauteur de 100 euros par hectare, est également dénoncée.
Le commissaire européen en charge de l’Agriculture Dacian Ciolos est attendu à Paris le mercredi 28 avril. Il doit notamment se rendre au Sénat
et rencontrer le ministre français en charge de l’Agriculture. En janvier, cet
ancien ministre roumain de l’Agriculture avait plaidé pour une PAC forte. Voici deux semaines, il se donnait jusqu’à mi-2011
pour arrêter sa réforme de la Politique agricole commune (lire ici).
Fabien Abitbol
è Un entretien avec Dacian Ciolos (Euronews, 9 avril)
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