France 2 diffuse (enfin) ce jeudi, en deuxième partie
de soirée, le 32e numéro de la série « Dans le secret
de… », de Jacques Cotta, intitulé La mort du juge d’instruction, pour quelle
justice ?. Initialement programmé début janvier, ce documentaire inédit avait laissé place à
un hommage à Philippe Séguin, disparu le matin même. Une forme de clin d’œil -involontaire- à l’investigation.
Quelles sont les forces et faiblesses de
l'instruction à la française ? Pour quelles raisons le président de la
République pousse-t-il à la suppression du juge d'instruction, alors que même les
instances européennes souhaitent son maintien ? Quel est l'avenir réservé à notre justice ? De l'Assemblée
nationale (où ont été ouverts les Etats généraux de la justice pénale en mars
2009 en présence de l'ancien Garde des Sceaux Robert Badinter), à la Chancellerie, où Guillaume Didier,
porte-parole du ministère, pratique souvent la langue de bois, à Nicolas
Sarkozy lui-même, la parole « officielle » est confrontée à
l'expérience des professionnels du droit, qui ont été nombreux à passer par la
caméra et le micro de Jacques Cotta et Pascal Martin.
Comme la trentaine de documentaires de cette série,
souvent rediffusée en « bouche-trou », de nuit, vers 2h ou 3h du
matin sur la première chaîne publique, ce documentaire soulève le caractère politique
d’un sujet de société. Comme d’habitude pour une première diffusion, il passe
en deuxième partie de soirée. Cela n’avait pas empêché, par exemple, celui-ci (sur les riches et l’impôt, en janvier 2008) d’attirer 1,64 millions
de téléspectateurs et 21,6% de parts d’audience. Sans, il est vrai, Les Experts
sur TF1…
Avec le décès de Philippe Séguin (et le report de la
diffusion du documentaire) s’est déroulé un fait nouveau : une rentrée solennelle sous tension à la Cour de cassation. C’était en présence du
Premier ministre François Fillon et du Garde des Sceaux Michèle Alliot-Marie. Et quasiment un an jour pour jour après
l’annonce faite par le président Sarkozy de sa volonté de supprimer le juge
d’instruction. Cela ne figure pas dans le documentaire.
Autre fait marquant en ce début 2010 : le juge Thiel a dénoncé sa placardisation. Devenu juge en 1978, Gilbert Thiel soulignait déjà en 2008 sa « stagnation volontaire au sein du
premier grade », alors qu’il avait entre autres travaillé douze ans à
l'antiterrorisme. Ayant notamment instruit les affaires Simone Weber, Guy Georges (le « tueur de l’Est parisien »), celle du bagagiste de
Roissy (qu'il a permis de l'innocenter), il a aussi participé à l'enquête sur
l'assassinat du préfet Erignac. Il intervient de temps à autres à Faites entrer
l’accusé (France 2) et, philosophe, citait un faux proverbe chinois (« Tout
temps passé à travailler est perdu pour sa carrière »), lorsqu’il voyait -amer- sa carière bloquée.
Le juge Patrick Ramaël n’est pas non plus dans le
documentaire, qui contient tout de même de nombreux intervenants. En poste à
Paris, le juge Ramaël a divers dossiers épineux en charge, comme celui de la
disparition de l’opposant marocain Mehdi Ben Barka, enlevé à Paris en 1965, et celui du journaliste Guy-André Kieffer (GAK), disparu le 16 avril 2004 à Abidjan (Côte d’Ivoire).
Dans ces deux affaires, le rôle du juge d’instruction est primordial. Et, dans
le dossier Kieffer, suivi ICI, la version ivoirienne de l’affaire, menée par le procureur, aboutit à
certaines aberrations. La dernière, en date de juillet 2009, est, depuis
janvier 2010, sur le bureau du secrétaire d’Etat aux Affaires européennes,
selon un courrier expédié le 26 janvier par Philippe Sellier, Chef de cabinet de Pierre Lellouche, qui répondait à l’avocat d’un des inculpés français du volet
ivoirien du dossier… Dans son édition de ce jeudi, La Lettre du Continent (dernier journal français pour lequel travaillait GAK)
en fait état (lire ici).
F. A.
è A lire également : la critique de Sylvie Véran dans l’Obs télé
Dans le secret de… La mort du juge d’instruction,
pour quelle justice ?
Réalisation : Jacques Cotta et Pascal Martin,
doc. inédit, 2010, 60 min.
France 2, jeudi 4 février, vers 22h45 (après Envoyé spécial)
Le documentaire, qui a commencé dès 22h40, a réuni en moyenne un million de téléspectateurs, soit… seulement 7,1% de parts d'audience.
Sur TF1, Les Experts Miami ont réuni en moyenne 1,9 million de téléspectateurs, atteignant 34,2% des quatre ans et plus ( 41,7% de la fameuse "ménagère de moins de cinquante ans").
Sur France 3, Ce soir (ou jamais !) a réuni, comme souvent, environ 700 000 téléspectateurs (6,9%).
Rédigé par : Fabien | 05/02/2010 à 16h33