Au 31 décembre 2008, le montant total des exonérations de charges de sécurité sociale, tous régimes confondus, s’élevait à 30,7 milliards d’euros. C’est ce qui ressort de la page 22 du rapport rendu public depuis… le 25 novembre dernier (Rapport d’activité 2008, 66 pages, à télécharger ici). Par comparaison, le déficit prévisionnel de la sécurité sociale pour 2010, annoncé le 1er octobre par le gouvernement, est de 30,6 milliards d’euros.
Le tableau ci-dessus — cliquer pour agrandir — reprend les différentes exonérations de 1992 à 2008. Et montre qu’elles ont représenté une part sans cesse croissante dans les cotisations dues aux caisses d’Urssaf réparties sur le territoire français. Tout juste s’il y a eu un fléchissement, de 1997 à 1999, la part des exonérations passant de 6,8 à 6,4%, puis une stabilisation, de 2001 à 2005, entre 8,8 et 8,9% (2002 étant à 9%). Les mesures mises en œuvre au lendemain de l’élection de Nicolas Sarkozy, prenant effet notamment en juillet et en octobre 2007, ont fait passer la part des exonérations à 10,7% au 31 décembre 2008, contre 10,2% fin 2007 et 9,4% fin 2006.
En euros, il manque dans les caisses 2,4 milliards pour 2008, 2,7 milliards pour 2007, 2,4 milliards pour 2006, et mal an plutôt que bon an, dans les deux milliards chaque année. Et des mises au point ont lieu régulièrement. Comme cette circulaire de décembre 2009, expliquant une loi de décembre 2007 sur la Jeune entreprise universitaire (JEI/JEU), ou celle-là de novembre 2009, sur les vendeurs et colporteurs de presse (loi d’avril 2009).
Le rapport de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) est en ligne depuis le 25 novembre, mais sera présenté à la presse en ce début de semaine, dans l’effervescence de la préparation des fêtes de fin d’année (pour certains), au milieu des vacances scolaires, donc à peu près « clandestinement ». Mercredi, il n'y aura pas, sur France 3, de séance de Questions au gouvernement…
L’Acoss fédère le réseau des Urssaf et est chargée de la collecte des cotisations au prorata du salaire. En contrepartie, les Urssaf financent les retraites et les dépenses maladies. Qui, comme on ne cesse de nous le répéter, sont en déficit. Et, on ne cesse aussi de nous le répéter, pour qui il va falloir faire quelques sacrifices. Encore.
Les mécanismes d’exonération ne cessent d’augmenter. Si Nicolas Sarkozy n’a « pas été élu pour augmenter les impôts », ces exonérations de taxes profitent avant tout aux employeurs, par exemple exonérés de cotisations de Sécurité sociale sur les salaires (de manière dégressive) jusqu'à 1,6 fois le Smic. Sur 2008, le total des exonérations a représenté 21,3% des cotisations patronales du privé. Sur les 30,7 milliards d'euros d'exonérations, 28,5 milliards ont bénéficié aux entreprises. L’Acoss est à la peine pour le recouvrement dans les secteurs de la construction et des transports, et chez les travailleurs indépendants.
Depuis juillet 2007, l'exonération est totale jusqu’au Smic pour les entreprises de moins de vingt salariés. Depuis octobre 2007 ont été instaurées des exonérations sur les heures supplémentaires, puis en 2008 sur le rachat de jours RTT. Le fameux « travailler plus… », pour ceux qui le peuvent. Crise aidant, le gouvernement a instauré entre autres le dispositif « zéro charge » pour les entreprises de moins de dix salariés, celles qu’il oublie de compter pour les destructions d’emploi.
Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale 2009, le montant des mesures non compensées est annoncé de 2,66 milliards en 2009, 2,79 milliards en 2010 et 2,94 milliards en 2011 (lire ici).
Fabien Abitbol
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