Des Rroms présents en France et les associations qui les soutiennent redoutent une « contagion » de la « vague de racisme » qu'ils dénoncent en Italie à l'encontre de leur communauté et réclament une véritable politique d'accueil au niveau européen.
« En France, nous luttons en permanence contre des préjugés très anciens, notamment contre l'amalgame entre Rroms et voleurs ou criminels, ce qui ce passe en Italie est un énorme retour en arrière », estime Saimir Mile, président de la Voix des Rroms.
Le gouvernement de Silvio Berlusconi et ses alliés anti-immigrés de la Ligue du nord mènent des opérations d'identification dans les camps où les Rroms doivent remplir un formulaire comprenant des cases « ethnie » et « religion » et laisser leurs empreintes digitales s'ils ont plus de 14 ans.
Pour Michèle Mézard, porte-parole du collectif Romeurope « dans un contexte de harcèlement policier permanent en France, on peut craindre une contagion de la vague de racisme italienne dans une opinion publique française très mal informée et qui continue à véhiculer les pires préjugés sur ces populations fragiles ».
Les associations s'inquiètent notamment du recueil de données sur ces populations ballottées de bidonvilles en caravanes éventrées au gré des évacuations policières et qui ont constitué un important quota des expulsions d'étrangers (en 2007 : sur plus de 23 150 expulsions, plus de 2 270 étaient Roumains et 810 Bulgares, dont une majorité de Rroms).
« On ne peut pas parler de fichage en France mais dans des retours encadrés par l'Anaem (Agence nationale d'accueil des étrangers et des migrations, ndlr), il y a des prises de données, dans certains cas la police passe prendre des photos, il y a même eu des prélèvements d'ADN et tout cela passe inaperçu », souligne Michèle Mézard. Si Romeurope se félicite des quelques projets d'insertion mis en place en France, notamment à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), le collectif souligne que cela reste « l'exception ».
Ion Rinu, 54 ans, réside sur le plus grand campement de France, à Saint-Ouen, où doivent être évacués d'ici fin août plus de 630 Roms. « En France, comme en Italie, nous servons de boucs-émissaires », explique à l'AFP ce père de famille roumain qui s'attend à une énième expulsion.
« On nous a forcé à être sédentaires depuis des siècles (la population Rom mondiale est sédentaire à plus de 90%, ndlr) et on nous oblige aujourd'hui à être des nomades de plus en plus pauvres que l'on chasse de ville en ville », ajoute-t-il.
Médecins du Monde souligne que les « nombreuses discriminations, en Italie comme dans d'autres Etats membres, ne doivent plus rester sous silence », estimant que ces populations vulnérables sont frappées d'un « statut d'exception » dans l'Union européenne.
Romeurope a interpellé Nicolas Sarkozy à l'occasion de la présidence française de l'UE, réclamant une directive européenne sur les droits des Roms, selon une note adressée à l'Elysée et transmise à l'AFP. « Nous réclamons une véritable politique d'accueil au niveau européen », explique Mme Mézard.
Depuis l'entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dans l'UE le 1er janvier 2007, les Roms de ces deux pays bénéficient en théorie de la liberté de circulation mais au delà de trois mois de séjour ils doivent justifier d'un emploi ou de moyens suffisant de subsistance selon la directive française du 22 décembre 2006. Faute de quoi il sont expulsables.
Ils peinent à trouver les ressources nécessaires puisqu'ils ne peuvent être employés que dans les 150 métiers « en tension » recensés en janvier 2008.
Isabelle Ligner, pour l’AFP
⇒ La pression policière s'accentue autour du Hanul, l'un des plus anciens campements roms de France
⇒ La page mission Rroms de Médecins du monde
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