L’Institut national de la Propriété intellectuelle (INPI) vient de notifier à Pierre Fourny son «projet de décision» relatif au dépôt de la marque “La Police coupable”, qu’il utilise depuis une dizaine d’années. Sauf revirement inattendu, la marque “La Police coupable” ne devrait pas être enregistrée.
Il aura fallu attendre juillet, début pour certains des vacances scolaires pour d’autres de la saison artistique pour que l’INPI, tout juste quinze mois après la demande d’enregistrement, fasse connaître son «projet de décision» à Pierre Fourny, qui s’apprête à partir pour Avignon.
Ce projet de décision, auquel l’intéressé a deux mois pour faire ses observations, faute de quoi il vaudra décision définitive, confirme que la marque “La Police coupable” est contraire à l'ordre public et aux bonnes mœurs. Selon l’INPI, il est établi «que le déposant ne saurait valablement prétendre qu'une telle expression présente un caractère humoristique et constitue un jeu de mot basé sur un énoncé paradoxal.»
Créée en 1999 par Pierre Fourny, “La Police coupable” est une police de caractères qui permet de couper les mots en deux horizontalement. Elle est, pour sa compagnie de spectacles ALIS, un outil indispensable à l'apparition de La Poésie à 2 mi-mots. D’où la volonté de ALIS et Pierre Fourny de développer commercialement quelques produits en marge des spectacles afin de générer quelque recette, et moins dépendre des subsides publics, ministériels ou des collectivités locales.
L’histoire du dépôt de marque “La Police coupable” —ou plus précisément de la tentative— remonte à avril 2010. Le 1er avril (ça ne s’invente pas…), Pierre Fourny tente d’enregistrer “La Police coupable” auprès de l’INPI (dossier n°10/3726771). Le 06 avril, l’INPI refuse d’enregistrer cette marque, considérée «de nature à porter atteinte à l’ordre public et aux bonnes mœurs».
Le 09 avril 2010, suite à un entretien téléphonique ave un responsable de l’INPI, Pierre Fourny présente par écrit sa «défense», et fait notamment valoir, outre l’ancienneté et la continuité de l’usage du terme, sa présence à des manifestations publiques. Il donne entre autres comme exemple une cérémonie de novembre 2001 à laquelle participaient diverses personnalités dont «le sous-préfet, le député de l’Aisne (devenu ensuite ministre), ainsi qu’un représentant du ministère de la Culture». Le député en question était Renaud Dutreil…
Mais l’INPI ne fléchit pas. Dans un courrier daté du 12 juillet 2010, l’Institut évoque «le consommateur d’attention moyenne» qui appréhendera “La Police coupable” comme «l’administration qui veille au maintien de la sécurité publique, qui serait coupable de fautes, d’infractions, et non comme désignant une police de caractères».
Les amateurs de bons mots et de poésie apprécieront la finesse de l’expression «consommateur d’attention moyenne», autrement plus floue que celle de «ménagère de moins de cinquante ans» pour la télévision…
Mais Pierre Fourny, lui, apprécie moins. Joint ce midi par téléphone alors que son esprit était davantage tourné vers Avignon (l’équipe d’ALIS doit y être du 11 au 19 juillet), il indiquait ne pas avoir encore décidé s’il allait donner suite à ce «projet de décision». S’il ne donne pas suite dans un délai de deux mois après la notification, le «projet de décision» deviendra une décision. S’il émet une fois de plus des observations, rien ne dit qu’il sera entendu, puisque, dans ce dossier, on tourne en rond.
L’autre solution serait de re-déposer un nouveau dossier. En espérant qu’il passe un jour ou l’autre, avec un autre examinateur. Mais, objecte Pierre Fourny, le simple dépôt de dossier coûte 800€.
Fabien Abitbol, ill.: La Police coupable © ALIS Pierre Fourny
Diverses vidéos en cliquant ici, dont un reportage de France 3 Paris.
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