A la suite de l’agression transphobe dont cinq personnes ont été victimes le 27 avril sur les hauteurs de Belleville, la maire (PS) du 20e arrondissement, Frédérique Calandra, avait appelé à un rassemblement de soutien, samedi 8 mai, à partir de 11 heures, à l’entrée du Parc de Belleville, côté rue des Envierges, à quelques mètres des lieux.
De g. à dr. : un représentant des transgenres, Frédérique Calandra (PS), maire du 20e arrondissement, Ian Brossat, président du groupe communiste au Conseil de Paris, Pierre Mansat, adjoint au maire de Paris, chargé de Paris métropole et des relations avec les collectivités territoriales d'Ile-de-France, Eric Marchandin, UMP, représentant de GayLib sur le 20e
Le 28 avril sortait dans les salles françaises le
nouveau film de João Pedro Rodrigues (O Fantasma, Odete), ici Mourir comme un
homme. Tonia, une transsexuelle vétéran des spectacles de travestis à Lisbonne,
voit s’effondrer le monde qui l’entoure : son statut de star est menacé
par la concurrence des jeunes artistes. Pressée par son jeune copain Rosário
d’assumer l’identité de femme et de se soumettre à l’opération qui la fera
changer de sexe, Tonia lutte contre ses convictions religieuses les plus
intimes. Pour s’éloigner de tous ses problèmes, elle part à la campagne avec
Rosário. Après s’être égarés, ils se retrouvent dans une forêt enchantée, un
monde magique où ils rencontrent l’énigmatique Maria Bakker et sa copine Paula.
Et cette rencontre va tout faire basculer… (dossier de presse à lire ici).
L’équipe de ce film franco-portguais, distribué en France par nos
voisins de EpicentreFilms, se trouvait à Paris, y compris avec les deux
principales comédiennes transsexuelles portugaises, Jenny Larrue et Cindy
Scrash, les quelques jours précédant la sortie française du film. Installé rue
de la Mare, Daniel Chabannes eut l’idée d’une promenade (avec deux autres
membres de l’équipe, le réalisateur et le directeur artistique) sur les
hauteurs de Belleville, d’où l’on a une belle vue sur Paris.
C’est là que, dans un climat de « régression
silencieuse » dénoncé quatre jours plus tôt par le maire de Paris Bertrand Delanoë, les cinq
personnes du film Mourir comme un homme étaient violemment prises à partie.
Samedi 8 mai, quelques
dizaines de personnes, 70 selon la police, une centaine selon Bruno Cuingnet,
conseiller de quartier Amandiers-Ménilmontant, qui s’y trouvait, se sont
rendues sur les lieux de l’agression, pour protester contre l’homophobie et la
transphobie. « Le 20e arrondissement est un territoire ouvert à tous.
Chacun doit pouvoir y circuler et y vivre librement sans avoir à craindre des
manifestations de rejet ou d’agression en raison de quel que critère que ce
soit », a notamment déclaré la maire d’arrondissement, ajoutant que
« Les autorités compétentes mettent tout en œuvre afin que les auteurs de
cette agression soient rapidement identifiés et condamnés ».
Outre le discours de Mme
Calandra, il y eut aussi une prise de parole de Daniel Chabannes, le
producteur-distributeur du film, pour un rappel des faits, et du traumatisme
des personnes agressées, dont les deux actrices, reparties le jour-même pour le
Portugal.
Le sénateur de Paris David Assouline (PS, élu de l’arrondissement) étant excusé, c’est une autre parlementaire de l’arrondissement, la députée socialiste George Pau-Langevin qui rappela les divers travaux parlementaires relatifs à la
famille, depuis l’adoption du PACS. Suivit une prise de parole sur les mêmes
thèmes par Ian Brossat, le président du groupe communiste au Conseil de Paris.
Un représentant des transgenres
expliqua, pour sa part, les difficultés de l’évolution de la législation
concernant l’état civil.
Sur son blogue, Danielle
Simonnet, élue du 20e et conseillère de Paris (Parti de gauche), rappelle que, dans la précédente
mandature, lorsqu’elle avait en charge le conseil municipal de la jeunesse du
20e arrondissement, elle avait entendu « des propos réactionnaires de
certains jeunes » pour l’organisation de la Fête de la République laïque
et métissée (lire ici).
F. A., photo Bruno Cuingnet
C’est assez catastrophique.
Actuellement, faire preuve de racisme, c’est être vite pointé du doigt. A entendre le mot « discrimination », la plupart des gens pensent au racisme.
Les recherches sur la discrimination en sciences sociales ne s’y trompent pas : la plupart d’enter elles concerne le racisme. Les restent sont données aux études sur le sexisme. C’est aussi pourquoi les féministes cherchent à ce que les mêmes lois contre le racisme s’appliquent contre le sexisme.
Quant à la discrimination en fonction de l’orientation sexuelle, très rares sont les études qui portent sur le sujet ; rare sont les dénonciations de cette discrimination (d’ailleurs, il n’arriverait à l’idée de personne de traiter quelqu’un de « nègre ») mais fréquentes sont les occasions d’entendre un « brave type » traité un autre de « Pédé », de « tafiole, » etc…
L’homophobie est plus acceptée, moins dénoncée, plus ignorée du public. C’est grave car la discrimination n’est pas dépendante du groupe cible, mais du principe de donner moins (ou plus) de valeur à une personne en fonction des stéréotypes qu’on associe à son groupe attribué.
Je crois que l’homophobie est même plus dangereuse que le racisme et le sexisme. Non seulement l’homophobie est plus acceptée et moins dénoncée, mais il s’y appose un problème de frontière du groupe identitaire. Dans le cas du racisme ou du sexisme, il est facile de reconnaître un noir ou une femme. Ici, « l’identité d’homme blanc » du discriminant n’est pas remise en cause. Il sait qui est un homme et qui est une femme. C’est juste un problème de hiérarchie de ces identités (hommes vs femmes, et blancs vs noirs). Dans le cas des homosexuels ou même des transgenres, l’intrus, par contre, est parmi nous. « Cet homme à qui je parle, est-il bien un vrai homme ou est-ce une brebis galeuse ?". Ce questionnement est important : puis-je m’identifier à lui ? Puis-je le reconnaître comme étant de mon groupe, porteur de mes valeurs et de mes idéaux ? Ce n’est pas anodin.Les recherches du Pr. J ; Marques (université de Porto) ont montré qu’on est plus sévère envers une brebis galeuse de son groupe, qu’envers un autre déviant d’un autre groupe.
Il y a donc un réel problème identitaire ici qui s’ajoute à la discrimination et tout cet ensemble (indifférence de la population, tolérance de l’homophobie, effet brebis galeuse, problème identitaire, etc…) expliquent sans doute les agressions (parfois assassines) que font l’objet des homosexuels et les trans… et tout cela, dans une certaine indifférence car, cela soit-dit en passant, 70 personnes présentes pour protester contre une telle agression, ce n’est rien. Une telle agression eut été à caractère raciste, bien plus de monde probablement aurait été présent…
Rédigé par : Tita | 11/05/2010 à 11h03