Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a augmenté de 63 400 au mois de mars (+ 2,7 % sur un mois, + 22,1 % sur un an), passant à 2,448 millions en France métropolitaine, et les demandeurs d’emploi des catégories B et C représentent 1,032 millions de personnes inscrites fin mars à Pôle emploi, selon ce communiqué diffusé ce soir par le ministère du Travail. La Catégorie B (activité réduite courte de moins de 78h) a augmenté de 3,2 % en un mois (+ 6,2 % en un an) et la catégorie C (activité réduite longue, plus de 78h sur le mois de mars) a baissé de 0,2 % (- 10,2 % sur douze mois), selon le ministère. Les catégories D et E, non immédiatement disponibles et pas tenues de rechercher un emploi (dont certains en occupent déjà un) sont en légère augmentation (respectivement 0,7 et 0,5 %) et représentent au total 418 000 personnes. Petit tour de chauffe avant un 1er-Mai qui se veut « historique ».
Le mois dernier, la hausse avait été de l’ordre de 80 000 (données de février, officiellement 79 900 en fin de journée).
Au total, ce sont donc, sur la France métropolitaine uniquement, 3,5 millions de personnes qui sont inscrites au service public unique de recherche d’emploi, qui regroupe depuis le début de l’année l’Assedic et l’ANPE. Le nombre de demandeurs d'emploi des catégories A, B et C a ainsi augmenté de 77 000 au mois de mars (+2,3 %, +13,3 % sur un an), les inscrits à Pôle emploi ayant travaillé à temps partiel au mois de mars représentant moins de 14 000 demandeurs d'emploi en France métropolitaine.
Le chômage des jeunes, contre lequel le président Sarkozy a annoncé vendredi vouloir lutter, le disant structurel et typiquement français (en se basant sur des données erronées, lire ici), enregistre une augmentation de 17 300 demandeurs d'emploi auprès des moins de 25 ans ( +4,0 % sur le mois, +35,8 % sur un an). Les moins de 25 ans isolés (ne vivant pas au foyer familial) ne peuvent prétendre au RMI ; ceux y vivant non plus, puisque la Caisse d’allocations familiales tient compte des ressources du foyer, même si parfois des dossiers passent au travers, comme dans le Canard enchaîné du 22 avril 2009 (page 5, rubrique « Coups de barre »).
Si la hausse de janvier (+ 100 400 inscriptions) reste le record des douze derniers mois, le gouvernement ne fait pas beaucoup pour rassurer l’opinion. Car en trois mois, la France a atteint le nombre supplémentaire de demandeurs d'emplois que le gouvernement s'attendait à avoir pour l'année 2009, à quinze ou vingt mille unités près (si l'on se fie aux données officielles).
Hier soir, interrogée sur Europe
1 depuis Washington, la ministre de l'Economie Christine Lagarde avait indiqué
que les chiffres du chômage ne seraient pas bons mais pas « catastrophiques ».
Dans un entretien publié
ce matin par Le Figaro économie, où elle parlait d’un recul du produit
intérieur brut, elle expliquait qu’un taux de croissance négatif entraîne
mécaniquement des destructions d'emplois, au nombre de 117 400 au quatrième
trimestre 2008 selon les dernières données disponibles. De janvier à juin 2009,
l’Insee anticipe près de 400 000 destructions de postes. « Il va effectivement falloir encore plusieurs mois avant que la pente des
destructions d'emplois se radoucisse. Les experts évaluent à quatre trimestres
le décalage entre la reprise d'une économie et la reprise de l'emploi »,
a-t-elle expliqué au Figaro économie.
Le gouvernement a bien
préparé le terrain. Il a à sa façon insisté sur potentielle meilleure
résistance de la France à la crise par rapport à ses voisins. En fait, la
France étant un peu à la traîne, les dégâts internationaux, si graves
soient-ils, s’y font statistiquement moins sentir. Ce qui ne change rien au
problème de fond…
Hortefeux : grand flou
« Il faut s'attendre
à des chiffres qui seront mauvais pendant un certain temps », a prévenu depuis Washington Christine
Lagarde dimanche soir. « On aura des conséquences en terme d'emploi
pendant plusieurs trimestres même après la reprise », a ajouté la ministre
de l'Economie. Le matin, lors du Grand rendez-vous Europe 1/Le Parisien, le
ministre du Travail, Brice Hortefeux avait affirmé que les chiffres de mars
« ne seront certainement pas bons ». A une question sur le nombre
total de chômeurs en France à la fin de l'année, il avait carrément répondu :
« La vérité, c'est que nous n'en savons rien mais nous savons une chose,
c'est que la situation de l'emploi est très tendue ». Dans le Journal du
Dimanche, le secrétaire d'Etat à l'Emploi Laurent Wauquiez évoquait, lui, des
chiffres du chômage « mauvais au moins jusqu'à la fin de l'année », en annonçant une
hausse du même ordre que les mois précédents, comme il l’avait annoncé le 16 avril, déjà.
Cette fois, la
« fuite » des chiffres dans la presse n’a pas eu lieu le matin dans
un organe, comme c’est le cas depuis quatre mois, mais depuis plus de dix
jours, à coups répétés, dans plusieurs supports. Comme s’il fallait s’habituer : « la France
supporte moins mal la crise économique mondiale. Ce n'est pas un élément qui
doit nous consoler, c'est une observation », a fait valoir Brice
Hortefeux. Laurent Wauquiez s’est voulu rassurant : « sur un an le
chômage a augmenté de 16 % dans notre pays contre 30 % au Royaume-Uni et 107 %
en Espagne. Ce qui montre que si on se bat, on peut amortir le choc ». La méthode Coué a du bon.
Les prochains chiffres du chômage seront officiellement diffusés le 29 mai. En attendant, vendredi prochain, veille de week-end, a lieu la Fête du Travail. A certains endroits, comme ici dans le Haut-Béarn, ce 1er-Mai sera unitaire. Sur le plan national, pour la première fois depuis longtemps, les huit centrales syndicales ont annoncé leur intention d’être unies, même si des divergences subsistent sur les actions à mener (ou pas) après la Fête du Travail. Cet accord a été trouvé dans le 20e arrondissement, dans les locaux de Sud Solidaires, cette fédération syndicale montrée du doigt par le président de la République et qui faisait partie des trois organisations non conviées à l’Elysée pour le « Sommet social » du 18 février, expliqué ici par Didier Migaud, président de la commission des Finances à l’Assemblée nationale.
A la mi-avril, les syndicats de retraités et pensionnés ont appelé à manifester « en force » et demandent l’effet rétroactif de l’augmentation de leurs pensions au 1er janvier au lieu du 1er avril. Ce lundi, avec l’appel de treize organisations de gauche pour « mettre un coup d’arrêt à la politique de Nicolas Sarkozy et du Medef », ce 1er-Mai, côté politique, se veut comme aussi marquant que celui de 2002, entre les deux tours de l’élection présidentielle, après l’élimination de Lionel Jospin le 22 avril. Au Parti socialiste, depuis le 22 avril (…2009), on se montre soudé.
Fabien Abitbol
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