Sur trois préfets depuis 2004, il n’en reste qu’un, qui existe depuis deux mois !
M. Pierre N’Gahane, 45 ans, a été nommé aujourd’hui en Conseil des ministres préfet des Alpes-de-Haute-Provence. Les médias en font tout un plat, parlant unanimement d’« effet Obama ». C’est oublier que ce Français d’origine camerounaise était déjà préfet en titre (depuis le 20 septembre, comme il le rappellera dans le prochain Figaro Magazine), même s’il n’avait pas « compétence territoriale », comme on dit dans la préfectorale.
Il avait été nommé en Conseil des ministres du 31 janvier 2007 préfet délégué à l’égalité des chances dans les Bouches-du-Rhône (Rama Yade était chargée d’annoncer la nouvelle à l’UMP). Né au Cameroun, fils d’un inspecteur des impôts, Pierre N’Gahane est titulaire d’un doctorat en sciences de gestion. Il était vice-président de l’Université catholique de Lille judqu’à ce que le ministre de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, ne le débauche pour l’envoyer en région PACA, sur un poste créé après l’embrasement des banlieues en 2005.
Celui qui se définit comme « un noir africain » reste attaché à ses origines africaines et a présidé l’association IDEAL (Initiatives pour le développement économique en Afrique à Lille). Association qui organisait, le week-end dernier, à l’Université catholique de Lille, le 5e colloque IDEAL, sur le thème de la mondialisation, intitulé « Diasporas : quelles contributions pour le développement de l’Afrique ? ».
Si Pierre N’Gahane devient le troisième préfet français issu de l’immigration après les nominations de MM. Aïssa Dermouche (dans le Jura en 2004) et Nacer Meddah (dans l’Aube en 2006), force est de constater que les deux premiers nommés - aussi sur proposition du ministre de l’Intérieur Nicolas Sarkozy -, ne sont plus en exercice… Le premier est devenu à sa demande préfet hors cadre en octobre 2005 (ses ennuis de santé et judiciaires remontent au milieu de l’année), le deuxième a discrètement réintégré son corps d’origine le 26 août (« cette indication n'est que l'expression d'une procédure administrative », avait-il expliqué au Monde) et devait « rejoindre la présidence de la République », indiquait-il au Monde daté du 1er août.
La France doit-elle s’enorgueillir d’une telle « diversité » ? Faut-il aller jusqu’à (faussement) titrer « Premier préfet noir », et ainsi pousser Patrick Devedjian à déclarer à Questions d’Info (LCP-France-Info-AFP) de façon péremptoire, sans prendre le temps de faire effectuer les recherches depuis la Révolution française : « Ce n'est naturellement pas le premier préfet noir que nous avons, mais c'est sans doute le premier préfet d'origine étrangère, les autres étant d'origine antillaise et donc français depuis Louis XIV ».
Noir ? A voir. Métis, sans aucun doute. Noir serait entrer dans la dialectique américaine ; le modèle américain, semble-t-il, n’est pas celui du gouvernement, puisque pour Rachida Dati, c’est peut-être le futur président américain qui s’est inspiré du modèle français… On croit rêver. Gaston Monnerville, sénateur du Lot, président du Sénat jusqu’en 1968, lui aussi était métis, tenant son « sang noir » de sa branche familiale maternelle.
Quel progrès a été accompli depuis quarante ans, à part le fait que, en 2007, une femme est arrivée au second tour de l’élection présidentielle ? Mais la femme ne fait pas partie des « minorités visibles » : elle compose la majorité visible de l’humanité. Pour l’instant, au suffrage universel nominal, il faut se contenter, en France hexagonale, de George Pau-Langevin, députée (PS) de la 21e circonscription de Paris (majorité du 20e arrondissement), qui est à la même section de son parti depuis plus de 25 ans, et qui, elle, est noire (et femme). Mais elle a un défaut : elle est née à la Guadeloupe et est donc « Française depuis 1635 ». Mauvais exemple d'intégration…
Fabien Abitbol
Je pourrais penser que les mentalités ont évolué lorsque plus aucune nomination ne sera le sujet de commentaires sur la couleur, l'origine ou le sexe (ce que je considère blessant pour la personne élue) mais uniquement sur les capacités de la personne nommée, d'ici là bien du chemin reste à parcourir.
Rédigé par : raannemari | 13/11/2008 à 10h22
ce n'est pas nouveau, la France est en retard sur la "visibilité" de ses minorités… c'est sûr que les USA ont frappé un grand coup en élisant Mister O ! c'est déjà un début ; ça va faire son petit bonhomme de chemin dans l'esprit des Français encore un peu hésitants… :-)
Bisounette confiante
Rédigé par : Bisounette | 13/11/2008 à 13h40
Officiellement, c'est sur les qualités de la personne… c'est sans doute pour cela que, sur trois préfets il n'en reste qu'un, chacun des deux premiers ayant exercé moins de deux ans.
Rédigé par : Fabien | 13/11/2008 à 17h15
"un peu" est un euphémisme, Bisounette !
Rédigé par : Fabien | 13/11/2008 à 17h17
c'est reparti pour le vocabulaire ! dans les Français un peu hésitants, il y a ceux qui voudraient y croire mais ne sont pas franchement convaincus, donc l'élection de B.O aux USA va achever de les faire "basculer" du bon côté...
Rédigé par : Bisounette | 13/11/2008 à 20h31
Bof… encore faut-il trouver un gars (ou une fille) aussi charismatique que BO…
Rédigé par : Pupuce | 14/11/2008 à 22h12