L’Affaire ben Barka rebondit pendant la visite au Maroc de M. Sarkozy et Mme Dati
Le juge Patrick Ramaël, chargé de l'enquête sur la disparition le 29 octobre 1965 à Paris de l'opposant marocain Mehdi ben Barka, vient de lancer des mandats d'arrêt internationaux contre des militaires et des responsables officiels du royaume, a-t-on appris ce soir, confirmant une information révélée par France 3.
Selon la chaîne publique, qui avait la semaine dernière diffusé des images de l’interpellation de Jean-Tony Oulaï, assassin présumé de notre voisin Guy-André Kieffer (coïncidence : les deux affaires sont dans le bureau du même juge d’instruction) les mandats d’arrêt visent un général dirigeant actuellement la gendarmerie royale du Maroc, l'actuel inspecteur général des armées, un préfet à la retraite, un policier à la retraite et une cinquième personne suspectée d’avoir enlevé boulevard Saint-Germain, devant la brasserie Lipp, le principal opposant à Hassan II, le père de Mohammed VI, auprès de qui sont actuellement le président français et la ministre française de la justice, fille d’un Marocain !
Voilà qui tombe plutôt mal, car, depuis son élection, c’est la première visite d’Etat de Nicolas Sarkozy, accompagnée de Mme Dati. Au cabinet de la garde des Sceaux, on assure ne pas en avoir connaissance, alors que la Place Vendôme est une étape nécessaire pour la diffusion de mandats d'arrêt.
Plus de trente ans d’enquête… et toujours pas de cadavre
Les magistrats français, qui se sont succédés sur ce dossier depuis l’ouverture d’une enquête pour « assassinat » en 1975, ont établi que l'enlèvement et la séquestration avaient été menés par des truands travaillant pour le Maroc, qui s’y sont ensuite réfugiés, et où ils ont plus tard disparu.
Selon certains témoignages, Mehdi ben Barka a été torturé à mort et il a été tué (volontairement ou involontairement). Les responsables officiels marocains auraient ensuite fait disparaître son corps selon un procédé qui reste encore inconnu. Un dossier toujours sensible au Maroc comme en France, où des responsabilités pourraient être recherchées au sein du pouvoir gaulliste de l'époque. Ces dernières années, plusieurs magistrats français, dont Jean-Baptiste Parlos et Patrick Ramaël, ont pu se rendre au Maroc pour enquêter. Mais ont estimé que Rabat ne coopérait pas complètement pour faire toute la lumière sur l'affaire. Le juge Ramaël avait ainsi provoqué un début d'incident diplomatique entre les deux pays lors de son dernier déplacement en 2005.
Après tout, pourquoi se fâcher avec un pays si cher alors qu’on ne sait pas officiellement si l’opposant marocain est décédé ou pas, puisqu’il n’y a pas de cadavre… et qu’il n’y en aura probablement jamais.
Les cinq mandats d’arrêt étaient déjà « dans les tuyaux » sans être toutefois formalisés, indique-t-on de source judiciaire, alors que le président Sarkozy déjeunait avec le Premier ministre israëlien, avant… de s’envoler pour le Maroc avec Rachida Dati. Où, après avoir été accueilli en grande pompe par « M VI », le petit roi qui monte, le président français a signé illico, tel un Chirac, pour deux milliards de contrats (civils et militaires), mais… n’a pas réussi à vendre un Rafale. Reste maintenant à Rachida Dati à signer avec son homologue marocain Abdelwahed Radi des conventions judiciaires. Et cela ne fait qu’une semaine que M. Radi a été nommé par Sa Majesté.
Guy Môcquet négligé par Nicolas Sarkozy
« Compte-tenu de son agenda international », le président Sarkozy n’a pas participé à la journée Guy Môcquet, appelée pourtant de ses vœux. Une information officiellement annoncée dans la journée, mais qui figurait déjà dans la version papier du gratuit Metro (distribué le matin…). En fait, M. Sarkozy avait prévu de se rendre au lycée Carnot, où le jeune communiste avait effectué une partie de sa scolarité, mais des personnes hostiles à sa présence y manifestaient. C’est un élève du lycée, répondant au prénom de… Nicolas, qui a lu la fameuse lettre. Généralement reproduite sans sa dernière phrase : « Dernières pensées : "Vous tous qui restez, soyez dignes de nous, les 27 qui allons mourir !" ». Parmi les 27, le jeune Guy Môcquet n’était pas le plus connu… Il fallait plutôt voir du côté du député de l'actuel 15e arrondissement Charles Michels, ou du syndicaliste résistant Jean-Pierre Timbaud, dont une rue du 11e porte le nom.
Fabien Abitbol, avec agences, photo AFP/Archives
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