Le cardinal Lustiger est mort, annonce le site Internet du Figaro
Le cardinal Jean-Marie Lustiger, ancien archevêque de Paris, est mort samedi à l'âge de 80 ans après des années de lutte contre le cancer, révèle l'édition en ligne du Figaro.
Juif converti devenu cardinal, Jean-Marie Lustiger, considéré comme un « traditionaliste moderne », comptait parmi les proches de l'ancien pape Jean Paul II et était également membre de l'Académie française.
Né le 17 septembre 1926 de parents réfugiés polonais, il s'est converti au catholicisme durant la Deuxième Guerre mondiale avant d'être ordonné prêtre en 1954, puis nommé évêque d'Orléans en 1979 et archevêque de Paris en 1981.
« C'était un homme de caractère, un caractère pas commode, qui a tout chamboulé à Paris », a raconté à Reuters le spécialiste des questions religieuses Odon Vallet, citant notamment l'accès à la prêtrise, la création de maison de séminaristes ou « une attitude très directive envers les prêtres parisiens ».
Au sein de l'Eglise française, « il y avait les pro et les anti-Lustiger », a expliqué l'auteur, entre autres, d'un « Petit lexique des idées fausses sur les religions ».
Même s'il avait fait des erreurs, comme la création de la chaîne de télévision Kto, « devenue une catastrophe financière », selon Odon Vallet, Jean-Marie Lustiger « savait envoûter son auditoire et avait redonné un certain lustre à la cathédrale Notre-Dame-de-Paris ».
© Reuters
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Photo prise le 9 février 2003, dans le cadre de l’Année de l’Algérie, de Gérard Depardieu et Aaron Jean-Marie Lustiger pendant une lecture des Confessions de Saint-Augustin.
© Pierre Verdy/AFP
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Jean-Marie Lustiger, fils d'immigrés juifs devenu prince de l'Eglise
Né dans le judaïsme, converti au catholicisme, Mgr Jean-Marie Lustiger, qui s'est éteint à l'âge de 80 ans des suites d'une grave maladie, avait tracé dans cette double identité un parcours peu banal qui avait fait gravir à ce fils d'immigrés juifs polonais et petit-fils de rabbin tous les échelons de l'Eglise de France jusqu'à sa plus prestigieuse fonction de cardinal-archevêque de Paris.
Ce cheminement personnel atypique, loin de le desservir dans l'Eglise de la fin du XXe siècle, semble l'avoir aidé à s'imposer comme un précieux trait d'union entre le christianisme et le judaïsme, une qualité qui saura être reconnue jusqu'au Vatican.
En effet, son ascension fulgurante dans la hiérarchie catholique française, il la doit presque exclusivement à Jean Paul II qui, l'année suivant son accession à la papauté, nomme le prêtre Jean-Marie Lustiger évêque d'Orléans en décembre 1979. C'est ce même pape qui le propulse archevêque de Paris seulement 14 mois plus tard, en janvier 1981, puis qui le fera cardinal en février 1983.
Un parcours express qui permet au petit curé de la paroisse parisienne de Sainte-Jeanne-de-Chantal de devenir, en moins de quatre ans, prince de l'Eglise.
Né le 17 septembre 1926 à Paris dans une famille juive pratiquante, l'enfant Lustiger se prénomme Aaron durant les 14 premières années de sa vie. Ses parents, propriétaires d'un magasin de bonneterie à Montmartre, étaient venus de Pologne en 1918 pour fuir la misère et les persécutions antisémites.
Mais, avec la guerre et la défaite de la France, l'étau antisémite se resserre autour de la famille Lustiger. Ses parents l'envoient se réfugier dans une famille d'accueil à Orléans et c'est là, le 25 août 1940, alors qu'il n'a pas encore 14 ans, qu'il se convertit au catholicisme - au grand dam de son père et sa mère - et qu'il ajoute à son prénom juif celui de Jean-Marie.
« Pour moi, il n'était pas un instant question de renier mon identité juive », expliquera-t-il plus tard. Sa démarche, selon lui, ne devait pas lui « faire abandonner la condition juive, mais bien au contraire la retrouver, recevoir pour elle une plénitude de sens ».
En 1942, deux ans après sa conversion, l'adolescent vit un drame personnel lorsque sa mère, dénoncée, est arrêtée et déportée de Drancy vers Auschwitz où elle mourra. Avec son père et sa sœur, il passe la fin du conflit à se cacher.
Au sortir de la guerre, après des études secondaires au lycée Montaigne à Paris et au lycée Pothier à Orléans et des études supérieures de lettres à la Sorbonne (licencié de philosophie scolastique et de théologie), il affirme sa vocation sacerdotale.
Il entre au séminaire des Carmes de l'Institut catholique de Paris avant d'être ordonné prêtre le 17 avril 1954. Durant 15 ans (1954-1969), il exerce comme aumônier universitaire dans la capitale. Il doit attendre 1969 pour prendre la charge d'une paroisse et devenir curé de Sainte-Jeanne-de-Chantal, près de la porte de Saint-Cloud à Paris, fonction qu'il occupera durant dix ans.
Après ce démarrage plutôt lent, l'élection de Jean Paul II semble donner un coup d'accélérateur à la « carrière » du petit curé parisien. En 1979, Jean-Marie Lustiger retrouve la ville d'Orléans, mais cette fois comme évêque, où il succède à Mgr Guy-Marie Riobé, décédé accidentellement.
Puis, celui qui ne se veut « pas un homme d'état-major mais un homme de terrain » est désigné en 1981 par le pape pour prendre la succession du cardinal François Marty - atteint par la limite d'âge - à la tête du prestigieux archevêché de Paris, dont il devient le 139e titulaire. Et, deux ans plus tard, le même Jean Paul II l'élève à la pourpre cardinalice. Archevêque émérite de Paris depuis sa démission en février 2005, il est remplacé à ce poste par Mgr André Vingt-Trois.
Homme de terrain et de communication, le cardinal Lustiger déploie comme archevêque de Paris une intense activité. Il encourage le lancement de nouveaux médias chrétiens : Radio Notre-Dame, la chaîne KTO et le magazine du diocèse de Paris, "Paris Notre-Dame". Il initie des réformes au sein du diocèse de la capitale (formation des prêtres, renouveau des paroisses, construction d'églises, fondation d'une université de théologie indépendante). Il écrit également de nombreux ouvrages, dont "Le choix de Dieu" (1987), "La promesse" (2002).
Homme d'Eglise, il n'en apprécie pas moins les honneurs et accepte de devenir... "Immortel" en se faisant élire en 1995 à l'Académie française au fauteuil d'un autre prince de l'Eglise, le cardinal Albert Decourtray, décédé en juin 1994.
Mais c'est l'image d'un défenseur acharné du dialogue entre juifs et catholiques que l'on retiendra surtout de lui. En 2000, Jean Paul II lui avait ainsi demandé de l'accompagner pour sa visite historique en Terre sainte. Et, comme un ultime symbole d'un parcours lié à ce pape polonais, l'archevêque de Paris, atteint par la limite d'âge, lui avait remis sa démission en février 2005, quelques semaines avant la mort du souverain pontife.
© Associated Press
A lire : « Le gouvernement fait de l'islam une religion d'Etat » (entretien paru dans Le Monde du 14 avril 2003)
Notes :
• On ne l’avait pas vu en public depuis les obsèques de l’Abbé Pierre. Il était toutefois arrivé en retard à l’Académie française le 31 mars 2007 pour l’élection de Max Gallo.
• Quelques jours plus tard, il accordait un entretien à Jean-Pierre Elkabbach, qui sera rediffusé demain lundi 6 août à 8h20 sur Europe 1 à la place de l’interview de Marc Tronchot.
• De Nicolas Sarkozy à André XXIII, des réactions sont là.
• La dépêche de l’Agence France Presse (ci-dessous), diffusée antérieurement à l’information « exclusive » du Figaro (qui ne site pas de source). En France, la Séparation des Eglises et de l’Etat prend une drôle de tournure. Mais au conseil d’administration de l’AFP siègent trois personnalités désignées par le Premier ministre, le ministre des Finances et celui des Affaires étrangères…
• A 23h04 a été publiée une nouvelle dépêche de Reuters, indiquant comme source du décès le diocèse de Paris.
Décès du cardinal Lustiger, ancien archevêque de ParisPARIS - Le cardinal Jean-Marie Lustiger, ancien archevêque de Paris, est décédé dimanche à Paris à l'âge de 80 ans, a-t-on appris de source gouvernementale.
Mgr Lustiger est décédé à la Maison médicale Jeanne-Garnier, un établissement de soins palliatifs, où il avait été admis le 23 avril.
En octobre 2006, le cardinal avait lui-même annoncé aux prêtres et diacres de Paris qu'il était atteint d'« une maladie grave dont le traitement a commencé ».
Aaron Lustiger, né le 17 septembre 1926 à Paris dans une famille de commerçants juifs d'origine polonaise, s'était converti en 1940, choisissant le prénom de Jean-Marie.
Ordonné prêtre en 1954, il a été aumônier des étudiants de la Sorbonne et des grandes écoles, puis curé de la paroisse Sainte-Jeanne de Chantal à Paris. Nommé évêque d'Orléans en 1979 par le pape Jean Paul II, il devient archevêque de Paris en 1981, jusqu'en 2005, et cardinal en 1983.
Auteur de nombreux ouvrages sur la foi, Mgr Lustiger avait été élu en juin 1995 à l'Académie française au fauteuil du cardinal Albert Decourtray. Il y avait fait sa dernière apparition le 31 mai pour adresser ses adieux aux "Immortels". « Vous ne me reverrez pas », leur avait-il dit alors.
© AFP / 05 août 2007 22h09
Le cardinal Lustiger était un homme atypique qui a suscité bien des polémiques au sein des deux communautés, juives et catholiques...mais il ne reniait rien, il voulait tout...il se qualifiait de "Juif investi ici bas d’une mission spécifique et différente de celle qui est dévolue aux autres Juifs …"...il voulait un lien entre les deux communautés et il a réussi, il a fait la paix...
Même N.Sarkozy s'y colle :"Le parcours spirituel du Cardinal Lustiger restera à la fois un exemple et un grand mystère…"...
le plus grand des mystères aurait été d'avoir un Pape juif, comme le dit A.Bellaïche dans Guysen :"Sans tambour ni trompette la chrétienté eût pu avoir un pape juif…"
mais il en a été autrement...les voies du Seigneur sont impénétrables...
Rédigé par : Eve | 08/08/2007 à 12h17