Le rapport de Shalom Arshav sur la construction dans les colonies
Un rapport accablant pour l'Etat d'Israël sur les colonies en terre palestinienne a été rendu public le 21 novembre (en langue anglaise), dans le silence le plus religieux. J'en avais de larges extraits en Français dès le 27 novembre et attendais de voir si les médias « traditionnels » allaient ou non s'en emparer, au moment de la visite au Proche-Orient de Mmes Condolezza Rice et Ségolène Royal, et alors que M. Sarkozy critique (à pas feutrés) l'attitude de son adversaire du parti socialiste… Il ne s'est rien passé. Je me décide donc à publier ce fastidieux rapport de La Paix Maintenant (Shalom Arshav en Hébreu), dont la traduction en Français a été réalisée par Gérard Eizenberg.
Ce rapport, qui décrit pour la première fois, et avec une précision clinique, la manière dont des terres appartenant à des propriétaires palestiniens ont été détournées au profit des colonies de Cisjordanie, et l’ampleur de ce phénomène, a été rédigé par M. Dror Etkes, responsable de l’Observatoire de la colonisation au sein de Shalom Arshav (La Paix Maintenant). Sous le titre « La colonisation : un Etat mafieux », une tribune de Dror Etkes a été publiée en novembre par le quotidien israélien Ha’aretz…
F. A.
Avant-propos
Pour la première fois, Shalom Arshav (La Paix Maintenant) est en mesure de prouver que, malgré les déclarations de l’Etat et des colons, la majorité des colonies de Cisjordanie est construite sur des terres palestiniennes privées, et non sur des terres d’Etat.
130 colonies ont été construites, soit totalement, soit en partie, sur des terres palestiniennes privées.
Les terres palestiniennes privées représentent environ 40% des terres utilisées pour les colonies.
La construction de colonies sur des terres palestiniennes privées est illégale, d’après la Haute Cour de Justice (précédent d’Elon Moreh, 1979), et ne peut donc pas être autorisée.
Résultat : non seulement les colonies illégales (sauvages), mais aussi un grand nombre de colonies anciennes ont été créées sur des terres palestiniennes privées, et sont donc illégales.
Les informations présentées ici ont été cachées par l’Etat pendant de nombreuses années, par crainte que leur révélation n’affecte ses relations internationales. Ce n’est que récemment que Shalom Arshav a pu avoir accès à ces informations.
Conclusion : pendant de nombreuses années, l’Etat d’Israël a saisi des milliers d’hectares de terres palestiniennes privées pour y construire des colonies. L’argument avancé par l’Etat et les colons selon lequel les colonies auraient été construites sur des terres d’Etat est trompeur et faux. La grande majorité des constructions dans les colonies a été effectuée en violation de la loi israélienne et des décisions de la Haute Cour de Justice.
Sur un plan moral, ce rapport renvoie une image d’un Etat d’Israël qui commet un « vol au grand jour » de terres palestiniennes pour les remettre à des colons israéliens. L’Etat a profité de l’état de faiblesse des Palestiniens pour leur voler leurs terres.
Shalom Arshav exige que le Procureur de l’Etat ordonne immédiatement une enquête à propos de ces faits, et fasse juger les responsables.
Introduction
L’Observatoire de la Colonisation de Shalom Arshav a rassemblé des informations précises sur le statut juridique des terres sur lesquelles ont été construites les colonies israéliennes en Cisjordanie depuis 40 ans. Ces informations rassemblées et publiées ici pour la première fois sont d’une extrême importance. Elles indiquent la violation directe de la loi israélienne par l’Etat lui-même, violation conduite par les artisans et les dirigeants de l’entreprise de colonisation.
Israël n’a jamais annexé les territoires conquis en Cisjordanie au cours de la guerre de juin 1967, demeurés « prises de guerre ». Pendant les 40 années de l’occupation, Israël a contrôlé les territoires, par l’intermédiaire d’ordres militaires et de lois de l’Etat. Ce faisant, Israël n’a pas tenu compte du droit et des accords internationaux, comme les 4èmes Accords de Genève et celui de La Haye, qui définissent et limitent les changements que l’occupant est autorisé à apporter en territoire occupé pendant la période d’occupation.
Ce rapport démontre que, en plus d’avoir ignoré les lois et accords internationaux, Israël a violé ses propres lois en Cisjordanie, en confisquant des biens privés palestiniens et en y construisant des colonies.
Ces informations, dont la source est l’Administration civile et qui s’appliquent à chacune des colonies de Cisjordanie, indiquent qu’une grande partie des colonies bâties en Cisjordanie l’ont été sur des terres privées palestiniennes, malgré le fait que la loi israélienne garantit la protection de la propriété privée de la population civile résidant en Cisjordanie.
Ces informations démontrent que le droit à la propriété de nombreux Palestiniens a été systématiquement bafoué au cours de la construction des colonies. Les informations fournies par le gouvernement lui-même confirment cette violation de la loi israélienne, loi définie précisément par la décision de la Haute Cour de Justice en 1979 concernant Elon Moreh, qui a constitué un précédent et qui sera examinée en détail plus loin.
Shalom Arshav condamne les violations de la loi israélienne par l’Etat d’Israël depuis 40 ans. Nous condamnons les tentatives de politiciens et de bureaucrates de blanchir un vol de terres, qui a privé des milliers de palestiniens de leur droit fondamental à la propriété, aussi bien individuellement que collectivement. Nous exigeons que le gouvernement israélien corrige cette situation, ce qui implique que les terres privées soient restituées à leurs propriétaires.
Principaux résultats
Près de 40% des terres sur lesquelles les colonies ont été construites appartiennent à des personnes privées palestiniennes.
Plus de 40% des terres sur lesquelles ont été construites les colonies situées dans les "blocs de colonies à l’ouest de la clôture en train d’être érigée par Israël, dont 86.4% de Ma’ale Adoumim, 44.3% de Giv’at Ze’ev, 47.7% de Kedumim, et 35.1% d’Ariel, appartiennent à des personnes privées palestiniennes.
Plus de 3.400 bâtiments dans les colonies sont construits sur des terres appartenant à des propriétaires palestiniens.
Les "terres à l’étude" (survey lands) sont des zones dont la propriété reste à déterminer et sur lesquelles le développement est illégal. Mais seuls 5,7% du territoire couvert par les colonies, et 2,5% de celui couvert par les "blocs des colonies" sont des "terres à l’étude".
Seule une petite proportion des terres des colonies a été achetée par des Juifs.
Plus de 50% des terres sur lesquelles les colonies ont été construites ont été déclarées "terres d’Etat", souvent par des moyens contestables et la plupart du temps au bénéfice des colonies.
Historique
Il est probable que beaucoup de gens ignorent, ou ne se souviennent pas qu’à l’exception de quelques zones limitées autour de Jérusalem, Israël n’a jamais annexé officiellement la Cisjordanie, dont le statut est resté "prise de guerre". Dans ce contexte, de droit international demande de l’occupant, soit ici l’Etat d’Israël, qu’il respecte et protège les biens des populations civiles qui résident dans ces zones occupées.
Malheureusement, les faits présentés dans ce rapport démontrent qu’Israël n’a ni respecté ni protégé le droit à la propriété de milliers de Palestiniens, en confisquant et en saisissant une partie de leurs biens et en y érigeant des colonies. Les informations de sources gouvernementales elles-mêmes montrent que, depuis 1967, les gouvernements successifs d’Israël ont initié de nouvelles colonies et permis l’expansion de colonies existantes sur des terres appartenant à des personnes palestiniennes privées, en violation de la loi israélienne dont l’esprit est à trouver dans le précédent constitué par la décision de la Haute Cour de Justice en 1979.
Ce rapport constitue un acte d’accusation très dur contre toute l’entreprise de colonisation et contre le rôle qu’a joué l’Etat. Bien qu’il soit encore difficile dévaluer toutes les conséquences politiques et juridiques des informations révélées par ce rapport, il est néanmoins clair que l’entreprise de colonisation, depuis ses débuts, a ignoré la loi israélienne et s’est attaquée non seulement au droit collectif à la propriété des Palestiniens en tant que peuple, mais aussi au droit à la propriété de propriétaires palestiniens en tant qu’individus.
Sources d’information et leur sérieux
Ce rapport ne se fonde pas sur des informations de Shalom Arshav (ou de toute autre organisation citoyenne, israélienne ou palestinienne) qui ne reposeraient sur rien. Les informations proviennent de l’Administration civile, organisme créé par l’Etat d’Israël pour administrer tous les aspects civils liés à la construction de colonies en Cisjordanie.
Il s’agit donc d’informations qui proviennent de l’Etat lui-même, actualisées, pour autant que nous le sachions, pendant l’année 2004. Cette base de données, ajoutée à d’autres sources, a servi à la procureure Talya Sasson quand elle a préparé son rapport (commandé par l’Etat) relatif aux colonies sauvages, rapport qui a été abondamment diffusé et commenté.
Dans son rapport, Talya Sasson aborde le sujet des colonies sauvages construites sur des terres appartenant à des personnes palestiniennes privées. Elle écrit notamment : "Il est strictement interdit de créer des colonies sauvages sur un bien privé palestinien. Dans certains cas, cela peut constituer un crime. Mais avant tout, il s’agit d’une atteinte grave au droit de propriété. Ce droit est droit fondamental en Israël, et il est compris dans l’une des Lois Fondamentales (équivalent à une Constitution, ndt) : Dignité humaine et Liberté, et il a été défini par la Haute Cour de Justice comme un droit constitutionnel. La même Cour a jugé que l’officier en charge d’une région devait protéger les droits fondamentaux des Palestiniens, en Cisjordanie et à Gaza. Il est du devoir de cet officier d’empêcher l’atteinte intolérable au droit à la propriété des Palestiniens que constitue la création de colonies sauvages sur leurs terres. Il n’est en aucun cas possible de valider la création d’une colonies sauvage sur une terre palestinienne privée. Ces colonies doivent donc être évacuées, et le plus tôt sera le mieux. "
Shalom Arshav est entré en possession des informations comprises dans ce rapport, malgré le refus systématique opposé par l’Etat de nous transmettre ces données. Il y a un, notre équipe de l’Observatoire de la colonisation a demandé ces informations à l’Administration civile, oralement et par écrit, en s’appuyant sur la loi israélienne Information et Liberté. Nous avons dû constater, à notre grand regret, que ces requêtes, soit n’ont reçu aucune réponse, soit ont été repoussées, après un très long délai.
Le refus continuel de l’Etat de transmettre les informations demandées a conduit Shalom Arshav, avec le mouvement pour la Liberté de l’Information, à déposer à ce sujet une requête jointe au Tribunal du district de Jérusalem. Cette requête demandait à l’Etat de transmettre immédiatement aux requérants les informations demandées. A la demande de l’Etat, une audience consacrée à cette requête, prévue en mai 2006, a été repoussée. Pour motiver cette demande de délai, l’Etat révélait quelques-unes de ses raisons de ne pas transmettre les informations demandées. Me Liora Haviliou, représentante du bureau du procureur de district de Jérusalem, écrivait en effet : "Le sujet de cette procédure est très sensible. Il implique, entre autres, des considérations liées à la sécurité de l’Etat d’Israël et à ses relations internationales. Pour formuler sa position, les défendeurs demandent des discussions supplémentaires... "
S’il est difficile de comprendre de quelles "considérations pour la sécurité" il est question, il est facile en revanche de deviner en quoi les relations internationales d’Israël auraient pu être affectées par ces informations. On peut également conclure de cette déclaration que l’Etat est parfaitement conscient de la nature incriminante des faits qu’il a cherché à cacher.
Définir une "terre privée"
Pour comprendre le mécanisme qui a présidé à confiscation de terres en Cisjordanie, il faut remonter à l’histoire politique de la région. Au cours des XIXe et XXe siècles, la Cisjordanie a été soumise à quatre puissances successives : les Ottomans, les Britanniques, les Jordaniens et les Israéliens. Chacune a laissé derrière elle une trace juridique et administrative, dont les conséquences jouent un rôle important dans la situation d’aujourd’hui. Depuis 1967, Israël a utilisé la législation ottomane, qui remonte au milieu du XIXe siècle, pour déclarer une terre "terre d’Etat". D’après cette loi, toute terre est considérée comme "terre d’Etat" à moins de prouver le contraire. Pour pouvoir enregistrer une terre en tant que bien privé, il faut l’avoir cultivée depuis au moins dix ans. Si la terre n’est pas enregistrée, toute personne sera considérée comme son propriétaire tant qu’elle la cultive et acquitte les taxes. Si la terre n’est pas cultivée pendant trois années d’affilée, elle peut devenir propriété de l’Etat ottoman, soit "terre d’Etat".
Israël a également exploité le fait qu’à l’ère ottomane, seules de petites portions de la Cisjordanie étaient enregistrées officiellement comme appartenant à tel ou tel propriétaire. Pendant les années 20, les Britanniques ont entrepris d’enregistrer les terres au nom des agriculteurs qui la cultivaient ou des propriétaires de maisons situées sur ces terres. Ce processus s’est poursuivi sous l’ère jordanienne. En 1968, Israël a stoppé le processus d’enregistrement de terres, en vertu d’un décret du gouverneur militaire dans les territoires occupés. Le motif déclaré était que ce décret devait servir à protéger les propriétaires de terres abandonnées (d’autres Palestiniens qui pourraient tenter de se faire enregistrer comme propriétaires en leur absence), et à empêcher toute discrimination à l’égard de des droits de ces propriétaires. Mais en réalité, ce décret a laissé des centaines de milliers de km2 de terres agricoles non enregistrées, finalement déclarées "terres d’Etat" et utilisées au seul profit d’Israël.
L’occupation à partir de 1967 a provoqué des changements dans l’économie palestinienne. De nombreux Palestiniens qui, par le passé, travaillaient dans l’agriculture, sont venus travailler en Israël. Cette situation a permis au "Gardien des Biens du Gouvernement en Judée et en Samarie" de déclarer une importante partie des terres non cultivées "terres d’Etat", en utilisant la loi ottomane.
Une "terre privée" à laquelle ce rapport se réfère est :
Soit une terre qui a été enregistrée et reconnue comme bien avant 1968, à une époque où l’enregistrement de terres était encore ouvert aux Palestiniens
Soit une terre cultivée reconnue par Israël comme étant privée d’après la loi ottomane.
Saisies pour "raisons militaires"
En sus d’une déclaration à grande échelle qui a désigné la plupart de la Cisjordanie comme "terres d’Etat", terres ensuite attribuées uniquement aux colonies et aux colons, il existe un certain nombre d’autres moyens administratifs par lesquels l’Etat a pu s’emparer de terres en Cisjordanie.
Le moyen principal utilisé par l’Etat pour prendre le contrôle de terres privées a été la "saisie pour raisons militaires". Contrairement à une "expropriation", où la propriété de la terre est transférée à l’Etat, la "saisie" laisse la propriété officielle de la terre à son propriétaire d’origine, mais transfère pour une période limitée son contrôle aux militaires. A l’expiration de cette période, l’armée doit soit renoncer au contrôle de la terre au profit de son propriétaire (chose qui n’est quasiment jamais arrivée en Cisjordanie), soit renouveler l’ordre de saisie.
De nombreuses colonies créées au cours de la première décennie de l’occupation israélienne en Cisjordanie ont été construites sur des terres "saisies pour raisons militaires". Mais une décision capitale de la Haute Cour de Justice en 1979 (affaire Elon Moreh) a mis officiellement fin à cette pratique abusive.
Le cas Elon Moreh
Le 5 juin 1979, le commandant alors chargé de Tsahal en Cisjordanie, Binyamin Ben-Eliezer, ordonnait la saisie pour un Palestinien de Rujib, situé au sud-est de Naplouse, au Nord de la Cisjordanie. Deux jours plus tard, sur ces terres, la construction de la colonie d’Elon Moreh commençait. En réaction, les propriétaires des terres saisirent la Haute Cour de Justice, arguant du fait que la saisie était illégale, puisque Tsahal l’avait fondée sur des raisons de sécurité, alors que la terre saisie était en fait utilisée pour une nouvelle colonie. En réponse, l’avocat général de l’Etat déclara que, comme dans de nombreux cas analogues par le passé, la création de la colonie était bien nécessaire pour des raisons militaires.
En réaction, un groupe de colons d’Elon Moreh soumit à la Cour un mémorandum qui rejetait l’interprétation selon laquelle cette saisie était temporaire et pour des raisons militaires. Les colons affirmaient clairement que leur intention était de créer une colonie, civile et définitive, fondée pour des raisons politiques et idéologiques. Cela, bien sûr, contredisait la version donnée par l’Etat.
A la vue des arguments fournis par les colons, la Haute Cour décida que la création de la colonie sur les terres en question ne relevait pas de la "saisie pour raisons militaires" et ordonna l’annulation de cette saisie. A partir de 1979 et du précédent qu’a constitué l’affaire Elon Moreh, l’Etat fut forcé de cesser d’utiliser la "saisie pour raisons militaires" comme moyen pour s’emparer de terres privées palestiniennes afin d’y construire des colonies.
Néanmoins, pendant les 10 ans qui suivirent la signature des Accords d’Oslo, Israël recommença à utiliser la saisie pour raisons militaires, en particulier pour y construire le système de routes de contournement en Cisjordanie, qui avait pour but de permettre aux colons de circuler sans traverser des centres de population palestinienne. Avec les années, bien d’autres ordres de saisie ont été donnés pour créer des "zones sécurisées" autour des colonies, ainsi que pour construire la clôture de séparation.
Construction sur des terres privées : la loi et la réalité
En dépit de la décision sans ambiguïté de la Cour, l’Etat a continué à initier et permettre la construction de colonies, ainsi que de "nouveaux quartiers" d’anciennes colonies, sur des terres dont l’Etat savait qu’elles appartenaient à des Palestiniens. Ces terres ne pouvant pas être déclarées "terres d’Etat" ni, vu le précédent d’Elon Moreh, saisies pour "raisons militaires", cette activité s’est déroulée sans aucun fondement juridique.
Dans un rapport violent à propos du comportement de l’Administration civile, le Contrôleur de l’Etat décrit un cas où une zone industrielle israélienne a été créée en Cisjordanie, avec des capitaux publics et privés, sur une terre palestinienne privée. Citant le conseiller juridique de l’Administration civile sur cette affaire, il écrit : "la gravité de cette affaire n’indique en aucune manière qu’elle est exceptionnelle."
Ainsi, par exemple, la colonie d’Ofra, créée en 1975 sur une base militaire jordanienne abandonnée, a été construite essentiellement après 1980, et presque totalement sur des terres qui appartiennent au village voisin d’Ein Yabrud. Et c’est le cas de dizaines d’autres colonies construites consciemment, en totalité ou pour partie, sur des terres palestiniennes privées. L’exemple le plus extrême est celui d’Elon Moreh elle-même, qui a été déménagée sur un autre site suite à la décision de la Cour. D’après les informations fournies par l’Administration civile, plus de 65% des terres d’Elon Moreh sont des terres palestiniennes privées.
Shalom Arshav ne dispose pas de toute l’information disponible concernant les ordres de saisie de terres donnés pas Israël en Cisjordanie depuis 1967 jusqu’aujourd’hui. Comme nous l’avons écrit plus haut, une demande de ces informations à l’Administration civile, dans le cadre de la loi Information et Liberté, est pour le moment restée sans réponse. Ces informations pourraient évidemment éclaircir l’intéressante question de savoir quelles sont les colonies (ou portions de colonies) sont situées sur des terres saisies pour raisons militaires. Comme nous l’avons vu plus haut, les ordres de saisie ne modifient pas le statut de propriété de la terre. Toute colonie qui a été construite sur des terres saisies de cette manière se situent de fait sur des terres palestiniennes privées, même au regard de l’enregistrement officiel en Israël.
"Terres à l’étude" et "terres juives"
Outre la "terre d’Etat" et la "terre palestinienne privée", Israël a créé une autre catégorie de terres, la "terre à l’étude". Cela fait référence à un bien dont la propriété fait débat, en général dans le cas où un titre de propriété palestinien est contesté par l’Etat. D’après la loi israélienne, pareille terre ne peut connaître aucun développement, ni par l’Etat, ni par le Palestinien qui en revendique la propriété. En réalité, comme le montrent les chiffres, la construction de colonies a également été autorisée sur cette catégorie de terres. De plus, la catégorie "terre juive" a été créée, pour se référer à des terres dont des Juifs sont propriétaires.
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Méthodologie
A. Définition des limites d’une colonie
Pour les besoins de ce rapport, nous avons dû définir les limites de chacune des colonies et colonies sauvages de Cisjordanie. En général, les limites officielles des colonies ne reflètent pas la superficie qu’elles couvrent en réalité. Ces limites incluent des superficies plus grandes, pour permettre une future extension.
Nous avons choisi de définir les limites des colonies sur la base de la situation que nous connaissons sur le terrain, situation qui est fonction d’un certain nombre de facteurs essentiels :
Superficie construite
Zones ouvertes ayant été développées
Zones incluses dans une clôture, complète ou partielle
Eclairage à la périphérie
Routes périphériques construites autour des colonies
Ces facteurs déterminent la superficie que couvre chaque colonie, ainsi que la possibilité des habitants palestiniens à accéder à leurs terres. En d’autres termes, quand nous avons délimité la superficie d’une colonie, nous avons aussi pris en compte le problème de l’accès des Palestiniens à ces zones.
Pour les besoins de ce rapport, nous n’avons vérifié que la situation de la superficie construite des colonies (bâtiments, routes, terres développées), et non la superficie totale couverte par ces colonies.
B. Informations fournies par l’Administration civile
Ces informations divisent la terre en 4 catégories :
Terre d’Etat : terre ayant été déclarée terre contrôlée par l’Etat
Terre palestinienne privée : terre enregistrée et reconnue par l’Etat d’Israël comme appartenant à une personne palestinienne privée, et terre agricole qui n’a été ni déclarée "Terre d’Etat" ni acquise par des Juifs
Terre à l’étude : terre dont la propriété est encore débattue, et dont le statut reste à déterminer. De par la loi, ce genre de terre ne peut pas être développée
Terre juive : terre acquise par des Juifs
C. Méthode de calcul
Les calculs concernant la superficie totale occupée par chaque colonie se fondent sur : les limites que nous avons définies pour toutes les colonies ;
la totalité de la superficie des colonies définie comme terres palestiniennes privées ;
la totalité de la superficie des colonies définie comme "terres à l’étude" ;
la totalité de la superficie des colonies définie comme "terres juives".
Pour les besoins de ce rapport, la plupart des avant-postes (colonies sauvages) ont été incluses dans les superficies des colonies, puisqu’ils font partie intégrante de la superficie occupée par les colonies. Les avant-postes qui ne font pas partie de facto de la juridiction d’une colonie sont traités en tant qu’entités distinctes.
Pour lire le rapport complet (en Anglais, avec chiffres et notes), cliquer
ICI.
(Carte et diagramme sont de 2002.)
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