Le compte de campagne de Nicolas Sarkozy pour l'élection présidentielle de 2012 a été rejeté ce jeudi 4 juillet par le Conseil constitutionnel (décision à consulter ici). Le déplacement de Toulon du président a été considéré comme un déplacement de candidat, le meeting de Villepinte a été revu à la hausse, ainsi que la maintenance du site Internet, et d'autres "détails" pour un total de 466.118€.
Nicolas Sarkozy avait saisi le Conseil constitutionnel d'une requête
tendant à l'annulation de la décision de la Commission nationale des
comptes de campagne et des
financements politiques (CNCCFP) en date du 19 décembre
2012 relative à son compte de campagne pour l'élection du Président de
la République des 22 avril et 6 mai 2012.
Son compte de campagne comportait un montant de
dépenses de 21 339 664 euros et un montant de recettes de 21 459 931
euros. La CNCCFP, par sa décision du 19
décembre 2012, l'avait "réformé", arrêtant le total
des dépenses à 22.872.615€ et le total des recettes à 22.896.007€. Elle constatait ainsi un dépassement du plafond des dépenses électorales, fixé à 22.509.000€ pour les deux candidats présents au second
tour, et rejetait le compte.
M. Sarkozy, outre qu'il ne peut pas se faire rembourser ses frais de campagne, devra restituer
l'avance forfaitaire de 153.000€ dont il avait
bénéficié en tant que candidat à l'élection du Président
de la République.
La Commission a fixé à 363.615€ la somme, égale
au montant du dépassement du
plafond des dépenses électorales qu'elle avait constaté,
que M. Sarkozy est tenu de verser au Trésor public. Il avait demandé au Conseil constitutionnel la réformation de
cette décision.
Le Conseil constitutionnel a considéré qu'il fallait intégrer dans les comptes de campagne différentes réunions électorales tenues par M. Guaino, ainsi qu'un tirage exceptionnel d'un numéro spécial du «magazine de l'Union» (destiné aux adhérents de l'UMP). Des dépenses pour un montant respectif de 17.752€ et de
71.957€.
Par ailleurs, le Conseil a examiné trois tracts
diffusés par l'UMP dont la réintégration dans le compte de campagne
était contestée par le candidat Sarkozy. Il a jugé que l'un
était relatif à la campagne pour les élections
législatives («Le marchandage PS-Vert sur le nucléaire»). Le Conseil a
réformé sur ce point la décision de la CNCCFP
et ramené à la somme de 28.475€ la dépense dans le
compte.
Les prestations des cabinets Publi-Opinion et Giacometti-Péron ont également été examinées. Pour
Publi-Opinion, elles portaient seulement,
comme le disait M. Sarkozy, sur 11/19èmes de la
dépense sur la période antérieure à l'élection présidentielle. Le reste
des dépenses, postérieures à cette
élection, ne peut donc être inscrit au compte. Le
Conseil a en conséquence approuvé le montant de 63.378€ inscrit à
son compte par le candidat au titre des
prestations du cabinet Publi Opinion. Pour
Giacometti-Péron, en l'absence de tout autre élément fourni par ce
cabinet ou par le candidat, le Conseil a également appliqué un
critère calendaire: 90 % des réunions étaient
antérieures à l'élection présidentielle et les dépenses afférentes
doivent être inscrites au compte dans cette
proportion et non à 100% comme l'avait décidé la
CNCCFP. Le Conseil a réformé sur ce point la décision de la CNCCFP et
ramené à la somme de 128.360€ la
dépense correspondant aux prestations du cabinet
Giacommetti-Peron.
Concernant la réunion de Villepinte du 11 mars 2012 (une dépense de 3.042.355€), le candidat avait inscrit à son
compte de campagne une somme de 1.538.037€,
correspondant à 50,4 % du montant total des dépenses, en invoquant la
tenue, dans la matinée, d'un «conseil national
extraordinaire» de l'Union pour un mouvement populaire
consacré à la préparation des élections législatives. La CNCCFP a estimé
qu'il convenait d'imputer au compte de
campagne 80% des dépenses relatives à l'organisation de
cette manifestation et 95% des dépenses de transport, soit un total de
2.601.902€.
Si un conseil national extraordinaire de l'UMP s'est
effectivement tenu le 11 mars au matin, sa durée n'a pas
excédé une heure et il a réuni, au maximum, 5 000
personnes, alors que la réunion ouverte au public qui l'a suivi a
rassemblé au moins 50 000 personnes. "Ni le candidat ni
l'UMP n'ont produit de document relatif à ce conseil
national extraordinaire établissant que les thèmes abordés et les
interventions avaient alors concerné les élections
législatives et non l'élection présidentielle. Ils n'ont
pas davantage justifié de dépenses propres à ce conseil national
extraordinaire", relève le Conseil constitutionnel, qui juge que c'est à bon droit que la CNCCFP avait procédé à la
réintégration contestée de 1.063.865€.
Concernant les dépenses afférentes au site Internet du candidat (d'un montant de 1.050.088€), seulement 20% de la dépense correspondant
à la réalisation proprement dite du site avaient été
inscrits au compte de campagne au motif que le site devait être utilisé,
après l'élection présidentielle, par
l'UMP. La CNCCFP a porté ce coefficient à 50% de la
dépense et réintégré en conséquence la somme de 175453€ dans le
compte. Aucun élément de l'instruction n'a
fait apparaître que ce ratio était surévalué compte tenu
de l'importance de la prestation exécutée pour la campagne du candidat.
Enfin, le Conseil a examiné huit
manifestations publiques auxquelles M. Sarkozy a participé
antérieurement à sa déclaration de candidature. La CNCCFP avait
estimé que l'absence de prise en compte des dépenses
afférentes à ces déplacements, qu'elle n'était pas en mesure de
chiffrer, devait conduire, par elle-même, au rejet du
compte.
Le Conseil constitutionnel a rappelé que la législation
relative au financement des campagnes électorales n'a ni pour objet ni
pour effet de limiter les déplacements du Président
de la République non plus que sa participation à des
manifestations publiques s'inscrivant dans l'exercice de sa charge. Les
dépenses relatives aux manifestations auxquelles
il participe n'ont à figurer au compte de campagne que
s'il apparaît que celles-ci ont revêtu un caractère manifestement
électoral.
En l'espèce, le Conseil a estimé que sept des huit
manifestations, dont des cérémonies de voeux et des inaugurations,
peuvent être regardées comme se rapportant à
l'exercice du mandat présidentiel. En revanche, il a
jugé qu'il n'en allait manifestement pas de même de la réunion publique
organisée à Toulon le 1er décembre 2011,
compte tenu de l'implication de l'UMP dans cette
manifestation, de l'ampleur du public convié, comprenant notamment des
adhérents et sympathisants de l'UMP, des modalités
d'aménagement des locaux et des moyens de communication
déployés. Du fait du caractère électoral de cette réunion publique à
Toulon, il y a lieu de réintégrer au compte
de campagne les dépenses afférentes à cette réunion d'un
montant de 155.715€.
Avec toutes ces corrections (des "réformations", dans le jargon), le
Conseil constitutionnel a constaté que le compte de campagne du candidat Sarkozy s'établit en dépenses, à 22.975.118€ et en recettes à 23.094.932€
et fournit les détails techniques suivants:
- Les montants ainsi arrêtés résultent de la
réintégration à hauteur de 1.669.930€ de dépenses que le candidat
n'avait pas ou avait insuffisamment fait figurer dans
son compte de campagne, soit 7,8% de plus que le
montant des dépenses qu'il a déclarées et 7,4% du plafond de dépenses
autorisées;
- En deuxième lieu, parmi les dépenses qui auraient dû
figurer au compte de campagne du fait de leur caractère électoral,
celles relatives à la réunion publique tenue par
M. Sarkozy à Toulon n'a fait l'objet d'aucune
refacturation par l'État. Elle a ainsi été financée irrégulièrement, en
méconnaissance des dispositions de l'article L.
52-8 du code électoral ;
- En troisième lieu le montant ainsi arrêté des dépenses
électorales de M. Sarkozy excède de 466.118€, soit 2,1 %, le
plafond autorisé.
"Le Conseil constitutionnel a jugé qu'il résulte de tous
ces éléments que c'est à bon droit que la Commission nationale des
comptes de campagne et des financements
politiques a rejeté le compte de campagne de M. Sarkozy.
En application des dispositions précitées de la loi du 6 novembre 1962,
dès lors que le compte de M. Sarkozy est rejeté,
celui-ci n'a pas droit au remboursement forfaitaire
prévu à l'article L. 52-11-1 du code électoral et doit en conséquence
restituer au Trésor public l'avance forfaitaire
qui lui a été versée. Il n'y a pas lieu de modifier le
montant arrêté à 363.615€ par la commission dans sa décision comme
devant être versé au Trésor public pour
dépassement du plafond", conclut le Conseil.
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