Au 1er Sommet international des coopératives, qui s'est ouvert lundi à Québec dans le cadre de l'année des coopératives décidée par l'ONU, beaucoup de sujets traités. Beaucoup trop pour en faire autre chose qu'une sélection subjective, à commencer par la communication...
Les coopératives doivent mieux "vendre" leur modèle et, surtout, convaincre la population qu’elles peuvent devenir de grandes entreprises efficaces sans renoncer à leurs valeurs initiales. C’est l’effort de communication qui les attend à la lumière des résultats de la "Recherche internationale sur les perceptions envers les coopératives" dévoilée mardi 9 octobre au matin (soit l’après-midi, heure de Paris, puisqu'il y a présentement six heures de décalage horaire entre Québec et Paris).
Pour Darrell Bricker, responsable de la direction de Ipsos Marketing, "Il faut intéresser les gens, leur montrer comment les coopératives restent pertinentes et font la différence". L’étude a été réalisée par Ipsos et l'UQAM (l’Université du Québec à Montréal), et repose sur les commentaires faits par 200 participants lors de dix séances de groupes de discussion dans cinq villes du monde: Québec, Manchester, Paris, Buenos Aires et Tokyo.
Les participants jugent le modèle coopératif attrayant. Mais ils ont de la difficulté à concevoir qu’une coopérative puisse défendre la démocratie, l’engagement envers la communauté et le partage des profits tout en comptant des milliers de membres et en gérant des milliards de dollars. "Selon les non-membres de coopératives, pour atteindre un tel sommet, une coopérative doit nécessairement avoir renoncé aux principes auxquels elle prétend adhérer pour réaliser des profits", écrivent les auteurs de l'étude.
Selon les participants aux divers groupes de discussion, les coopératives ont une image vieillotte. Elles innovent moins que les entreprises traditionnelles et devraient donc être moins concurrentielles que celles-ci. "Les faiblesses qu’ils perçoivent chez les coopératives sont donc concrètes, tandis que les forces sont de nature intangible (comme faire le bien et soutenir la communauté)". L'étude Ipsos-UQAM est disponible ici (en PDF en anglais).
"Les coopératives doivent mieux faire valoir leurs forces concrètes, notamment leur service à la clientèle, qui est perçu de façon très positive par les consommateurs", a souligné M. Bricker, selon qui la différence est un élément important pour lequel bien des personnes n’hésiteraient pas à payer un peu plus.
Nouveaux marchés
Il convient également, et cela peut apparaître comme paradoxal, de développer de nouveaux marchés. Sur cet aspect, les sociétés de type coopératif sont distancées par les sociétés dites "ouvertes" (de type purement capitaliste). C'est la recommandation d'une étude sur la croissance, également dévoilée mardi (mais cette fois par McKinsey & Company). Cette étude a porté sur 47 coopératives comparées à 54 sociétés ouvertes.
De 2005 à 2012, le taux de croissance annualisé des coopératives a été similaire à celui des autres entreprises (7,9% par rapport à 8,7%). Et 96 % des cadres supérieurs de coopératives indiquent que la croissance est une priorité stratégique de leur organisation.
L’étude McKinsey fait néanmoins ressortir des écarts assez marqués au chapitre des sources de croissance. La croissance liée aux gains de parts de marché atteint 2,2% dans les coopératives, le double de celle des sociétés ouvertes. Andrew Grant, directeur associé chez McKinsey, croit que les coopératives peuvent continuer à faire des bénéfices "en offrant une valeur ajoutée sur les produits et les services qu’elles seules peuvent offrir".
Une autre étude McKinsey, dévoilée elle mercredi 10 octobre, portait sur les processus organisationnels des coopératives. Pour voir quels sont les défis auxquels les coops doivent faire face, cliquer ici.
Vigilance face à la corruption
Qui dit Sommet international dit souvent imprévus. Ce mercredi, deux se sont ainsi ajoutés à l'agenda des médias.
Le premier collait à l'actualité locale. Le Québec est en proie à un grand déballage juridico-médiatique (les audiences sont pour la plupart filmées, pour certaines partiellement diffusées) autour d'affaires de dessous de table touchant certaines municipalités et d'anciens responsables politiques libéraux. À chaque jour ou presque de nouvelles révélations surgissent dans les médias autour de la "commission Charbonneau", du nom de la juge chargée d'enquêter. Aussi, l'ONG Transparency International a profité d'un n-ième rebondissement pour diffuser mercredi un "appel à la vigilance face à la corruption". Mme Huguette Labelle, présidente de Transparency International Canada a estimé que les coopératives devaient demeurer alertes dans leurs pratiques de gouvernance et fidèles à leurs valeurs fondatrices. "Le secret bancaire et l'évasion fiscale sont des pratiques qui vont à l'encontre de notre objectif de bâtir des communautés durables", a déclaré Mme Labelle devant les participants au Sommet des coopératives (communiqué à lire ici dans son intégralité).
Un nouvel outil de développement
Dans la foulée, c'est la ministre déléguée à la politique industrielle et à la Banque de développement économique du Québec, Mme Elaine Zakaïb, qui revenait à la salle des conférences de presse en début d'après-midi pour y aller de son annonce.
Afin de soutenir le mouvement coopératif, 30 millions de dollars canadiens (24,5M€) allaient être débloqués, par la création de Co-investissement coop. Le gouvernement du Québec (par l'entremise du ministère des Finances et de l’Économie) participera à hauteur de 4M$, le CRDC (Capital régional et coopératif Desjardins) pour 10M$, et le CQCM (Conseil québécois de la coopération et de la mutualité) pour 1M$. Ce qui fait quinze millions d'argent public. À parité avec quinze autres millions provenant de deux autres partenaires financiers, à savoir 10M$ de la BDC (Banque de développement du Canada) et 5M$ de Capital Réseau des SADC et CAE.
Le nouvel outil Co-investissement coop ainsi créé, il s'adressera aux coopératives de travailleurs actionnaires, aux coopératives de travailleurs et de producteurs, aux coopératives de solidarité et coopératives de consommateurs. Les projets d'acquisition, de démarrage, d'expansion, de modernisation, de renforcement de la structure financière ou de transfert d'entreprise pourront de étudiés, s'ils sont d'un montant minimal de cinquante mille dollars canadiens.
Voici pour un rapide tout d'horizon des journées des 9 et 10 octobre. La journée du 10, qui accueillait à déjeuner Madeleine Albright, devait se terminer dans les prises de parole avec Jacques Attali. Et une soirée animée par le Cirque du Soleil avait lieu dans la foulée à partir de 19h. Le Sommet international des coopératives s'achèvera jeudi 11 octobre dans l'après-midi à Québec.
La ville commencera alors à vibrer pour la littérature en tout genre avec le festival Québec en toutes lettres, du 11 au 21 octobre, au cours duquel aura lieu 140MAX, le premier festival de twittérature.
Fabien Abitbol. Photos, de haut en bas: Madeleine Allbright, ancienne Secrétaire d'Etat américain, a tenu une conférence durant le déjeuner de mercredi; Les tables rondes se succèdent tout au long du Sommet; Elaine Zakaïb, Ministre déléguée à la Politique industrielle et à la Banque de développement économique du Québec, est venue mercredi faire une annonce surprise.
Article très interessant! Merci!
Rédigé par : simulation pret | 15/10/2012 à 10h38
Merci pour ce très bon article!
Rédigé par : blackjack | 16/10/2012 à 13h20