Régulièrement, on entend que «le montant du RSA est de», sans préciser qu’il s’agit d’un montant maximum. Le RSA, remplaçant le RMI depuis le 1er juin 2009 en France métropolitaine, est une allocation différentielle supposée garantir un minimum vital. Petite explication pour ceux qui y croient encore…
Fin 2010, on a pu entendre ou lire que le RSA serait de 466,99€ par mois pour une personne seule à compter du 1er janvier 2011. Les médias ne précisaient généralement pas que, de cette somme, il convenait de retrancher pour la plupart des allocataires 56,04€ au titre du «forfait logement». Le vrai montant est donc de 410,95€. Encore s’agit-il d’un maximum, qui varie selon les ressources du trimestre précédent, ressources pouvant provenir du travail salarié, non salarié, des aides financières familiales ou d’amis, ou des revenus dits du capital, sachant qu’un produit comme le livret A est taxé (sur une base de 4% l’an, selon Politis du 10 novembre 2009) alors qu’il est net d’impôt et de taxes en France, et qu’il rapporte moins que cela (2% au 01/02/2011).
Pour les personnes qui réussissent à avoir une petite activité, le calcul du RSA se fait sur la base de 62% de ce revenu d’activité. Si, par exemple, un célibataire parvient à gagner 200€ chaque mois, la CAF effectue les comptes suivants:
• calcul du montant minimum garanti: (200x62%)+466,99=590,99
• calcul du montant du RSA: 590,99 – 200 – 56,04 = 334,95
L’allocataire, dénommé «bénéficiaire», percevra chaque mois 334,95€ de RSA en complément de son salaire de 200€ mensuels, et ce pendant trois mois. Ce qui fait un total de 534,95€, ce qui revient à dire que le gain net est de 124€ pour le célibataire ayant chaque mois une fiche de paie de 200€.
Mais la machine RSA n’apprécie pas les revenus exceptionnels. Ainsi, une ancienne militante UMP a été échaudée: avec une rentrée d’argent imprévue de 200€ (pour avoir «travaillé plus»), la voilà qui se fait prélever trois fois 66,66€ —donc l'intégralité de ses gains—, et écrit une lettre ouverte au président.
Elle n’est pas contente d’avoir bossé pour rien, et c’est normal. Elle avait milité pour faire élire le président du pouvoir d'achat, et est déçue, elle aussi.
Ne pas travailler pour rien
Il serait peut-être temps, à deux ans de la mise en route du RSA, que les caisses d’allocations familiales ferment les yeux sur les entrées exceptionnelles, au moins jusqu’à un certain montant trimestriel, afin de ne pas avoir à demander à un travailleur social de faire une «demande de neutralisation de ressources», dont on n’est pas certain qu’elle aboutira favorablement.
Ou alors de modifier les règles, et lisser une entrée exceptionnelle sur le trimestre de déclaration. Dans le cas ci-dessus, d’une entrée mensuelle habituelle de 200€, si l’on ajoute une entrée de 200€, cela fait 800€ pour un trimestre, soit 266,67€ par mois. Dans ce cas, le calcul serait :
• calcul du montant minimum garanti : (266,67x62%)+466,99= 632,32
• calcul du montant du RSA : 632,32 – 266,67 – 56,04 = 309,61
En percevant 309,61€ durant trois mois (au lieu de 334,95€), l’allocataire a une chute de ressources CAF de 25€, et non pas de 66€ comme s’il s’agissait d’une entrée exceptionnelle. Du coup, elle n’a pas travaillé pour rien.
Le RSA a été “vendu” aux médias comme étant toujours positif pour l’allocataire. Mais jamais clairement expliqué par le Haut-commissaire ni par un quelconque ministre.
Du temps du RMI, les «bénéficiaires» étaient exonérés de taxe d’habitation et de redevance audiovisuelle. Ce n’est plus le cas avec le RSA, où les critères sont très restrictifs, et où «la perception» de l’allocation ne permet pas de bénéficier d’un dégrèvement de la Taxe d’habitation.
Dès la présentation du projet de loi instaurant le RSA (ici sur le site du Sénat), des parlementaires estimaient à 240 000 le nombre de foyers qui allaient, dans cette disposition, y perdre: les personnes ayant un revenu fiscal de référence supérieur à l’abattement (4877€ pour un célibataire sans enfant). Sur leur dos, l’Etat allait gratter 40M€. Le sénateur UMP Philippe Marini avait bien tenté de maintenir partiellement l’ancien mécanisme, mais le ministre en charge du Budget, Eric Woerth, s’y était opposé, partant du principe que les contribuables verraient avec leur recette des impôts s’ils se trouvaient dans l’impossibilité de payer.
En 2012, dans l’état actuel de la législation, tous ceux «dont le revenu fiscal de référence est non nul» devront s’acquitter de la redevance audiovisuelle, y compris les anciens Rmistes d’avant l’existence du RSA, ce qui pourrait représenter 340000 foyers selon les estimations de 2008. Un autre gain de 40M€ pour l’Etat.
Les feuilles tomberont à l’automne 2012, les feuilles d’imposition s’entend. Il sera trop tard pour se dire qu’on a mal voté en avril et mai.
F. A.
Quand Bayrou a dit tout ça en 2008 face à Hirsch, tt le monde s'est foutu de sa gueule. Il avait pourtant raison.
Rédigé par : Hervé Torchet | 13/04/2011 à 01h07
Les textes n'étant parus qu'en décembre 2008 (pas tous très lisibles de prime abord) et applicables au 01/06/2009, il ne pouvait pas être crédible avant fin 2009-début 2010. On ne pouvait, en 2008, qu'exprimer des craintes, pas des certitudes. Et faire en sorte que le gouvernement corrige des erreurs, ce qu'il a refusé de faire.
Rédigé par : Ménilmuche | 13/04/2011 à 02h06
C'est à la fin de la phase d'évaluation que Bayrou a démontré à Hirsch que son dispositif était injuste et inefficace, donc je crois effectivement avant les textes définitifs.
J'ai inséré un lien avec ton article dans celui que j'ai posté ce matin sur mon blog.
Rédigé par : Hervé Torchet | 13/04/2011 à 11h56