Grégory Perrin, 37 ans, est mort samedi dernier * après un long coma. Ses obsèques sont
prévues le 26 décembre à Lyon. Domicilié dans le 11e arrondissement de Paris,
il avait été rendu populaire lors des récentes campagnes électorales de 2007 et 2008 comme
« trader tétraplégique ». Des ennuis avec l'administration de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ont quelque peu fait parler de lui au printemps dernier, mais furent estompés par la pourtant discrète campagne des européennes…
Handicapé depuis un accident de moto survenu en juin 1990,
à l’âge de dix-sept ans, Greg Perrin, originaire de Pouilly-sous-Charlieu (Loire),
travaillait depuis février 2002 comme trader au CA Lyon, la banque de financement et d’investissements du Crédit agricole, à La Défense.
Célibataire, il vivait dans le 11e arrondissement de Paris. Dans « Debout ! mon combat pour la vie », paru en 2007 chez Danger
public, il racontait son parcours d’élève médiocre, parvenu à un poste qualifié
d’important. En guise de dédicace de cet ouvrage à François Bayrou, ce militant
MoDem parisien avait écrit « Comment puis-je vous aider ? », dit-on
dans les rangs du parti centriste…
Et c’est ainsi que, au lendemain de la présidentielle de
2007, Greg Perrin reçut un appel de François Bayrou lui proposant de se lancer
dans la course aux législatives. Ce qu’il fit, dans la 7e circonscription de Paris (une partie du 11e arrondissement, sur
Sainte-Marguerite et La Roquette, et une partie du 12e arrondissement, sur les Quinze-Vingt). Dans ce fief socialiste, il réalisa le score de 12,6% des suffrages exprimés (sur 64% de participation).
Aux municipales de 2008, il fut « parachuté » tête de liste dans le 9e arrondissement. Et la liste du MoDem obtint 8,04% des suffrages exprimés. Dans Le Parisien, il avait réfuté le terme de « parachuté », mais son score de 8% était
loin derrière les 22,7% obtenus par François Bayrou lors de l’élection
présidentielle…
Grégory Perrin n’était pas ce qu’on appelle une
« grosse tête ». Un gosse qui, alors qu’il préparait un BEP
électronique, a réalisé que la privation de l’usage de ses bras l’obligeait à
changer d’orientation. A force de volonté, il s’est remis à bosser, a eu son
bac certes tardivement (23 ans), puis a poursuivi à Lyon ses études… en faisant
déplacer ses cours au rez-de-chaussée, comme il le racontait dans Handicap moteur à l’automne
2006.
Depuis 2005 et le départ à la
retraite de l’infirmier qui s’occupait de ses soins quotidiens, Greg Perrin
s’était résolu à l’hospitalisation à domicile (HAD) pour pouvoir continuer à travailler dans la salle de marchés de La Défense. A l’heure
où les traders étaient montrés du doigt (au sens péjoratif), il aimait à se
dire « le seul trader tétraplégique au monde ». Et Marielle de Sarnez
comme d’autres reprenaient volontiers ses paroles.
Les journées de Grégory Perrin étaient longues. Lever
à 5h, coucher à minuit en général. Jusqu’à ce jour de mars 2009 où il reçoit un
courrier de l’HAD Paris lui indiquant la fin de sa prise en charge, au motif que le matériel qu’il possède ne serait plus homologué.
Sous le titre La descente aux enfers
d'un trader handicapé, Le Figaro avait relaté son
histoire un mois plus tard, alors qu’il était retourné vivre chez sa mère,
faute de pouvoir avoir des soins à Paris et continuer de travailler à La
Défense.
La situation de l’employeur de Greg (qui le poussait
à délocaliser et à dégraisser) et sa situation personnelle (qui l’avait éloigné de Paris)
mettaient le trader dans une situation délicate. Dans son édition du 17 avril,
Le Progrès de Lyon relevait déjà le risque d’une délocalisation.
Puis arrive le 19 novembre, l’accident.
Une manipulation lui provoque une fracture. Hospitalisé, Greg Perrin sombre
dans le coma, semble-t-il à la suite de l’anesthésie. Et décède le 23 décembre.
Ses obsèques sont prévues ce samedi 26 décembre, à 9 heures, à l’église
Saint-Rambert « le bas », à Lyon, dans le quartier de l’Ile-Barbe. « Jusqu’à la fin, il a dû se battre contre une
société inhumaine », disent ses proches. Selon un membre de sa famille,
une action judiciaire pourrait être engagée contre l’AP-HP à la suite de
l’interruption des soins en date du 20 mars. Ce qui, en fait, ne serait que respecter ce que Grégoire Perrin exprimait en avril dans les colonnes du Figaro…
* La famille précise que Grégoire Perrin est décédé «à Lyon». Dans un premier temps, avec le peu d'informations dont je disposais en ce jour férié (Noël), j'avais écrit «dans un hôpital parisien», ne sachant pas comment entrer en contact avec la famille de Greg. A qui je présente mes excuses et mes condoléances. Les obsèques de Grégoire ont eu lieu samedi à Lyon, au son de U2, et en présence de François Bayrou.
Fabien Abitbol
è « Greg » Perrin (MoDem), un trader en campagne sur son fauteuil
roulant (Baptiste Etchegaray, MuniParis, 4 mars 2008)
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