Mahmoud Abbas a annoncé qu’Israël et le Hamas négociaient une trêve, qui interviendrait « dans les prochains jours ». Du côté israélien, on dément. Qu’en est-il ? Il semble que, pour l’instant, l’Egypte fasse office de médiateur et que rien ne soit encore joué. Détails et analyse…
Les chiffres ne mentent pas : depuis jeudi dernier, il y a une trêve dans les combats dans la bande de Gaza. Il est tout à fait certain qu’il s’agit d’une trêve à très court terme. Mais en même temps, il est difficile de contester les chiffres : dans la journée du 29 février, quelque 50 roquettes ont été tirées, la plupart du temps par des miliciens du Hamas. Au milieu de la semaine, le chiffre était tombé à 10 à 15 roquettes par jour, tirées par des groupes plus extrémistes, bien que, pour une grosse part, les Qassam aient été fournies par le Hamas. Depuis vendredi, seules 1 ou 2 roquettes par jour ont été tirées.
Y a-t-il eu un accord particulier entre Israël et le Hamas ? Il semble que non, même si certains médias affirment le contraire. Plus vraisemblablement, il s’agit d’une initiative du Hamas lui-même, qui répond aux attentes des Egyptiens. Le Hamas a donné l’ordre aux groupes de cesser leurs tirs, et cet ordre est suivi par les membres de son aile armée, et partiellement par les autres groupes.
Cette accalmie relative pourrait permettre à l’Egypte d’accélérer ses efforts en vue d’obtenir un accord de cessez-le-feu à long terme.
Cela rendra également difficile pour Israël de prendre l’initiative d’une nouvelle série d’attaques contre le Hamas dans la bande de Gaza. Ces derniers jours, il semble d’ailleurs que l’armée israélienne y réduit ses opérations, en partie à cause du calme qui règne de l’autre côté.
Cette trêve est très fragile, principalement à cause de la complexité sur le terrain. Le massacre des étudiants religieux à Jérusalem n’étant pas directement lié au Hamas, Israël a évité de mener des représailles dans la bande de Gaza. En même temps, Israël ne perdra pas son temps à rechercher qui sera derrière le prochain attentat venu de la bande de Gaza, même si le Hamas n’a pas de responsabilité directe. Et, de toute façon, la trêve n’est pas totale. Jeudi matin, des membres du Jihad islamique ont fait sauter une bombe qui a tué un soldat dans une jeep, près du kibboutz Ein Hashlosha.
Autre problème : le plan égyptien. Le chef des services secrets égyptiens, le général Omar Suleiman, qui devait se rendre en Israël et dans les territoires palestiniens pour faire avancer son plan, a une fois de plus remis son déplacement, pour la deuxième semaine de suite. Le Hamas exige en préalable la réouverture des passages frontaliers, en particulier celui de Ra fah. Or, il est très difficile de parvenir à un accord sur cette question qui soit acceptable à la fois par le Hamas et par Israël. Ces derniers mois, une idée avait été émise selon laquelle les forces de l’Autorité palestinienne, fidèles à Mahmoud Abbas, représentent les Palestiniens aux passages frontaliers. Mais la méfiance entre le Fatah et le Hamas, surtout depuis le coup de force du Hamas à Gaza en juin dernier, est exceptionnellement forte. Par exemple, où seraient logés ces surveillants palestiniens, une fois leur tout de garde terminé ?
Oseront-ils passer la nuit dans la bande de Gaza, sûrs de l’immunité que le Hamas leur garantirait ?
Pour le moment, le Hamas ne souhaite faire aucune concession. Il maintient sa position initiale : les officiers du Fatah s’occuperaient des tâches administratives du côté palestinien, mais une force armée du Hamas serait également postée sur les lieux.
Solution acceptable ni par Israël, ni par l’Autorité palestinienne, car cela reviendrait à accorder le dernier mot au Hamas aux passages frontaliers.
Comme souvent, il est compliqué de se faire une idée claire à partir des déclarations des porte-parole du Hamas. Des proches d’Ismaïl Haniyeh tentaient de faire savoir que l’accord était conclu. D’autres membres du Hamas, qui ne font pas partie du gouvernement, démentaient et affirmaient que, pour le moment, il n’y avait pas d’accord, ni avec l’Egypte ni avec Israël.
Du côté de l’armée israélienne, on dit que depuis quelque temps, le vrai décisionnaire au Hamas n’est plus Ismaïl Haniyeh, ni même Khaled Mesh’al depuis Damas, mais Ahmed Jabari, qui dirige l’aile militaire du Hamas. C’est l’homme qui a mené l’opération de la brèche dans la frontière avec l’Egypte à Rafah en janvier dernier, malgré les réserves de Mesh’al. Les positions de Jabari sont dures et sans compromis. Il est peu probable qu’il soit prêt à faire des concessions sur le plan idéologique.
Analyse de Avi Issacharoff et Amos Harel, pour le Ha’aretz du 10 mars (version anglaise ici), photo AP - Traduction : Gérard Eizenberg, pour La Paix Maintenant
⇒ Demain matin mercredi 12, Gérard Eizenberg sera l'invité de l'émission « A la Une » présentée par Gauthier Rybinski, à 8h15, sur France 24. Le sujet est la décision venue d'Israël de recommencer les constructions en Cisjordanie.
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