La « grande presse » ne parle plus de notre voisin… les autorités françaises sont muettes
Alors que, depuis le 27 décembre, notre voisin le journaliste Jean-Paul Ney
a été arrêté en Côte d’Ivoire et est soupçonné d’avoir participé à un complot contre le chef de l’Etat, le président ivoirien Laurent Gbagbo a attendu le lundi 7 janvier pour s'entretenir avec le procureur de la République et deux autres magistrats ivoiriens. « Il leur a demandé d’ouvrir immédiatement une enquête, en vue de faire la lumière sur l’affaire et de dégager la responsabilité des personnes mises en cause dans la rumeur de coup d’Etat qui ont circulé il y a quelques semaines à Abidjan », indique Afrik.com dans ce sujet publié le 9. Mais voilà que, deux jours après cette requête présidentielle, Blé Cocobo, le juge d’instruction en charge de l’affaire, est décédé. Et les autorités françaises sont également muettes sur la disparition, à la même période, d'un homme d'affaires français.
Cet après-midi, quelque 200 personnes se sont réunies en soutien à deux journalistes français d’Arte (dont un ancien de France 2). Qui risquent la peine de mort au Niger. Robert Ménard, de Reporters sans frontières (RSF) a aussi eu une pensée pour deux journalistes nigériens. Mais rien sur Jean-Paul Ney. Rien depuis ce communiqué du 4 janvier. Et le seul sujet plus récent sur la Côte d’Ivoire — pour inquiétant qu’il soit — est celui-ci, sans rapport avec notre voisin.
Et, pendant ce temps, toujours dans la plus grande discrétion, un homme d’affaires français, Alain Massoulier, disparaît. Ou plus précisément a disparu. Fin décembre. Sans laisser de traces. Du moins pas dans les médias traditionnels français. Il faut lire Le Pays, un journal burkinabé populaire et indépendant, pour savoir ce qu’il se passe en Côte d’Ivoire. Car cette « information », publiée le 8 janvier par le quotidien ivoirien Le Nouveau réveil, a été démentie le lendemain sous un titre qui laisse songeur : « Après Guy André Kieffer, un autre Français porté disparu : Le droit de réponse des Galeries Peyrissac », qui insinue, en faisant le rapprochement avec la disparition de notre autre voisin le journaliste Guy-André Kieffer que les disparitions de ressortissants français en Côte d’Ivoire sont légion.
Pour Théophile Kouamouo, ancien correspondant du Monde à Abidjan, les interrogations sont de mise. « Le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on a connu la France officielle plus indignée face à l'incarcération d'un de ses ressortissants dans un pays du Sud, surtout quand il est journaliste », écrit-il notamment sous le titre « Jean-Paul Ney : un "espion" très "bavard" à la Police criminelle ».
Entre la France et la Côte d’Ivoire, la transparence n’est pas de mise. Et le président comme le ministre des Affaires étrangères sont partis au Golfe.
Contacté ce dimanche après-midi par téléphone, un proche de Jean-Paul Ney a indiqué qu’il n’avait rien de neuf. Lui non plus.
La Lettre du Continent, pour qui travaillait jusqu’à sa disparition en avril 2004 Guy-André Kieffer, titre : « Jean-Paul Ney, un reporter "au secret" à Abidjan ». Donc lui reconnaît la qualité de journaliste que d’aucuns lui contestent. Tout comme du temps de la disparition de Guy-André Kieffer.
Demain, en théorie, on devrait connaître le nom du grand argentier directeur de la Banque centrale des Etats de l’Afrique de l’ouest (BCEAO). Le candidat favori du président Gbagbo est le ministre du plan (et ancien ministre des finances) de Côte d’Ivoire, Paul-Antoine Bohoun Bouabré. Tel DSK pour le FMI, il a fait campagne auprès des présidents de la région. Mais n’est pas en odeur de sainteté à Paris. Il se dit que Laurent Gbagbo a d'autres jokers (trois, en l'occurrence)… Et, si la France ne dispose pas du droit de vote, elle gère néanmoins la zone franc via la Banque de France. Car « l’Afrique de papa » de Mme Yade-Zimet n’est pas finie… D'autant que ce poste, vacant depuis fin 2005, est déjà attribué par la "bonne presse" depuis octobre 2007. Trois mois avant le vote.
Fabien Abitbol
⇒ Pour suivre les diverses informations francophones concernant Jean-Paul Ney, cliquer ici ou là.
⇒ Les Conseils aux voyageurs donnés par le Quai d’Orsay sur la page consacrée à la Côte d’Ivoire, n’ont pas été modifiés.
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