Chaque jour, elle supervise le transport de 700 000 voyageurs, la main sur un téléphone fixe, l'autre sur un portable. Des SMS quasiment en intraveineuse l'avertissent en temps réel de la moindre avarie sur une rame, du moindre retard sur un train ou de l'imminence d'une grève. Depuis trois semaines, Séverine Lepère est Madame RER B à la SNCF, directrice déléguée d'exploitation de l'une des plus importantes lignes de transport en commun de la région parisienne.
Une ligne de 80 km qui fait le bonheur ou le malheur de 150 millions de voyageurs chaque année !
« Le stress, ça m'aide »
« Mon métier est de faire rouler les trains. Et de les faire rouler bien, si possible », résume simplement cette ingénieure de 34 ans entrée à la SNCF à la fin des années 1990. Plus encore que son grand frère le RER A, le B est le train des contrastes : il traverse les secteurs les plus pauvres de la Seine-Saint-Denis et les plus riches de l'Essonne ou des Yvelines. « C'est aussi la ligne des manifestations, des événements, des matchs. Il n'y a pas un jour sans qu'il se passe quelque chose », explique Séverine Lepère. Salons professionnels, Fête de l'Huma, match de football, concert géant... Femme dans un monde d'hommes (moins de 2 % des conducteurs sont des femmes), Séverine Lepère est, un peu malgré elle, le porte-étendard d'une révolution culturelle à la SNCF amorcée début 2000. En 2005, elle devient ainsi chef de la gare du Nord, plus grande gare d'Europe (par le nombre de voyageurs, la principale de Berlin étant la plus grande en superficie, note du ouaibemaître). Elle a alors 33 ans et gère un immense millefeuille de cinq niveaux, 80ha où se croisent chaque jour 500 000 personnes et où, parfois, la tension éclate. « Le stress, ça m'aide. Je ne panique jamais », raconte-t-elle. Son stress en ce moment s'appelle rugby. Des dizaines de trains en plus chaque soir de match pour évacuer les 80 000 spectateurs du Stade de France. Ses 35 ans, Séverine les fêtera d'ailleurs le jour de la finale, le 20 octobre, dans le PC sécurité. Et puis, il y a aussi cette grève du 18 octobre qu'elle doit anticiper : avertir les médias, commander les affiches pour les informations dans les gares, calculer le nombre de trains qui rouleront. « Ce qui m'embêterait, c'est que cette grève dure. » Et les SMS envoyés aux voyageurs pour les avertir des retards, c'est pour quand ? « On y travaille. C'est pour bientôt », réplique cette jeune maman, dont la seule difficulté au travail est justement... d'arriver à l'heure à la réunion du matin de 8 h 15, tout en ayant le temps d'emmener ses deux enfants à l'école.
© Nicolas Fertin, pour Le Parisien, photo Olivier Corsan
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