« FAUDRA-T-IL un mort pour que les choses changent ? » Les habitants du quartier des Amandiers à Ménilmontant (XXe) sont aux abois. A deux reprises, les courses-poursuites à scooter et les rodéos routiers de la bande qui squatte les trottoirs du secteur viennent de tourner au drame. Samedi dernier, un gamin de 4 ans qui sortait avec sa maman du square de la rue Duris a été fauché sur le passage piéton par une voiture lancée à pleine vitesse.
Victime de multiples traumatismes, le petit garçon, resté plusieurs jours dans le coma, est passé tout près de la mort.
Accidents à répétition
Un terrible mais « banal » accident de la circulation ? Pas tout à fait. Le chauffard - un homme de 20 ans - pilotait un puissant 4 x 4 haut de gamme qu'un groupe de jeunes du quartier avait... loué pour s'amuser. « On les voyait tourner à toute allure sous nos fenêtres depuis quelques jours », s'indigne Marc (*), un habitant de la rue Duris. Un mois plus tôt, le 12 mai, sur le même passage piéton, un précédent accident avait déjà failli endeuiller le quartier. Une mère de famille, qui revenait du square avec son fils de 5 ans, avait été écrasée par un motard qui remontait la rue en sens interdit. Elle avait juste eu le temps de pousser son enfant hors d'atteinte du bolide avant d'être percutée. Très grièvement blessée, les deux jambes brisées, elle est toujours hospitalisée et a déjà subi cinq opérations.
« On dit que des gens le connaissent... »
Le pilote de la grosse cylindrée, qui a pris la fuite, n'a pas pu être identifié. Mais tout laisse à penser qu'il s'agissait d'un habitué du quartier. Peut-être même un des membres de la bande présente presque tout le temps devant le square. « J'avais déjà vu des jeunes du coin avec cette moto », murmure un riverain sur le qui-vive. « On dit que des gens connaissent le chauffard mais qu'ils ont peur de parler, que la moto est cachée dans une cave toute proche... », ajoute Aline (*), une autre habitante du quartier.
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Dimanche dernier, une manifestation spontanée a eu lieu rue de Tlemcen (D.R.)
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Manifestation rue de Tlemcen
Dimanche dernier, après le deuxième accident (« en réalité, le énième d'une longue série », rectifie le mari de la mère de famille renversée), quelques riverains ont spontanément organisé une manifestation dans la rue de Tlemcen pour exprimer leur ras-le-bol. La police est venue. Quelques jeunes du quartier aussi. Dialogue impossible entre les riverains en colère et les amis du pilote du 4 x 4. « Ils minimisent la gravité du geste de leur pote et ils nous accusent d'en faire trop sur ces accidents. C'était assez tendu », soupire Marc.
Entre rumeurs de menaces sur les témoins et peur des représailles... « C'est l'omerta qui règne. »
Depuis la manifestation, le quartier est en tout cas plongé dans une atmosphère pesante, entre rumeurs de menaces sur les témoins et peur des représailles... En témoigne la paralysie de l'enquête du 12 mai. Les faits s'étaient déroulés en plein après-midi à la sortie d'un parc. Le service central accident de la préfecture de police n'a pourtant recueilli aucun témoignage sur le fuyard à moto. « Il y a visiblement des gens qui savent des choses. Mais, dans ce quartier, c'est l'omerta qui règne », reconnaît un policier. « Le problème des Amandiers va bien au-delà de la simple insécurité routière », confirme Laurent Boudereaux, adjoint au maire du XX e chargé de la sécurité, en rappelant que les trafics de drogue sont récurrents dans le secteur. « Il y a des bandes qui se structurent autour de ces trafics et une logique de territoire qui se développe à nouveau fortement dans le quartier. »
Un point chaud du trafic de drogue
Même si le quartier des Amandiers, à la fois populaire et bobo, n'a a priori pas grand-chose à voir avec une cité sensible de banlieue, le secteur (et plus particulièrement la rue Duris) est cependant classé par la brigade des stupéfiants parmi les points chauds du trafic de drogue dans la capitale [une rapide recherche sur un moteur américain montre que les trafics de stupéfiants dans le 20e sont souvent évoqués au Conseil de Paris, note du ouaibemaître].
Le préfet interpellé
L'adjoint au maire Laurent Boudereaux, qui participera le 27 juin à une table ronde avec les habitants, le maire et le futur commissaire du XXe vient par ailleurs d'interpeller le préfet de police pour qu'il mette en place un « dispositif exceptionnel » aux Amandiers. Lors du dernier conseil d'arrondissement, en début de semaine, les élus ont également adopté un vœu pour accélérer les travaux de sécurisation du passage piéton de tous les dangers. Il y a urgence. Hier, malgré les récents accidents, plusieurs jeunes à scooter continuaient à remonter les rues à contresens et à zigzaguer sur les trottoirs du quartier. « Faudra-t-il un mort ? » répètent les habitants.
(*) Les prénoms ont été changés.
© Benoît Hasse, Le Parisien du 15 juin
En effet, en tapant Amandiers, on arrive ici.
Tout ceci fait froid dans le dos... Perdre la vie aussi simplement, parce que les potes s'amusaient.... Brrr
Rédigé par : Parapluie | 17/06/2007 à 15h46
"Parapluie",
il s'agit d'un quartier particulièrement accidentogène, ce depuis des années.
mais, contrairement à encore il y a dix ans, on assiste à moins de règlements de comptes avec morts par arme blanche ou arme à feu.
Rédigé par : Fabien | 17/06/2007 à 16h55