Sujet publié par Gérard Filoche dans Démocratie & Socialisme
Comme Le Pen, Sarkozy, le sortant, s’adresse à « à tous ces sans-grade », « tous ces anonymes, tous ces gens ordinaires (...) auxquels on ne fait pas attention, que l’on ne veut pas écouter, que l’on ne veut pas entendre ». Sarkozy, l’homme de l’establishment qui gouverne depuis cinq ans (et qui gouvernait déjà avec Balladur), l’homme des petits clans et des petits putschs, des couloirs des banques et des marchands d’armes, des villas et des palais, l’homme des financiers et des fortunes dorées, ose affirmer, a contrario de ce qu’il est : « C’est à vous que je veux rendre le pouvoir (...) Je veux être le candidat du peuple de France et non pas le candidat des médias, des appareils, de tel ou tel intérêt particulier, des intérêts partisans, des sectarismes. » Lui qui tente de voler son élection grâce aux plus puissants bourrages de crâne médiatique, d’imposer des discours provocateurs, bourrés de mensonges, sans crainte des réactions de la grande presse qu’il contrôle !
Sarkozy le candidat des milliardaires du Cac 40, l’ami des Bouygues, Dassault, Lagardère, Rotschild, le petit frère de Guillaume Sarkozy du Medef, celui qui négocie Avantis-Sanofi pour son autre frère François Sarkozy, le maire des salons de Neuilly accuse pêle-mêle la gauche d‘avoir prôné « l’assistanat, l’égalitarisme, le nivellement, les 35 h ». Il fait froid dans le dos.
« Assistanat » : les indemnités que touchent les chômeurs ?
Alors que ces indemnités sont un « dû » - elles proviennent des cotisations chômage versées par les salariés - c’est une assurance, c’est un droit inaliénable, justifié pour tous les salariés qui ont été licenciés, auxquels on ne retrouve pas un travail correspondant à leur qualification, leur niveau et leur ancienneté !
Est-ce que Sarkozy désigne aussi du doigt les assistés des assurances-vie de ses milliardaires de Neuilly pour lesquels l’argent vient en dormant pendant que les autres travaillent ?
Non, Sarkozy ne s’en prend qu’aux faibles, pas aux forts.
« L’égalitarisme et le nivellement », (vieilles lunes patronales, phobies des maîtres des forges depuis le XIXe siècle), menacent-ils ce pays où les inégalités sociales n’ont jamais été aussi grandes qu’après cinq ans de sarko-chiraquisme ?
378 000 millionnaires en euros, les 500 premières fortunes ont gagné 30 milliards d’euros de plus en 2005, soit trois fois le « trou » présumé de la Sécurité sociale, 100 milliards de bénéfices pour les chefs et actionnaires du Cac 40, des baisses d’impôts pour les riches, des emprunts aux riches et des dettes publiques accrues à rembourser aux riches, en serrant la ceinture aux sept millions de travailleurs pauvres ?
Les 35 h ?
Sarkozy est un menteur éhonté ou un ignorant des règles élémentaires du droit du travail chaque fois qu’il ose proposer « la liberté » de « travailler plus pour gagner plus » : chaque mot de ses phrases sont faux.
Car pas un salarié de ce pays, pas un seul, n’a la « liberté » de la durée de son travail.
Tout salarié est subordonné et c’est l’employeur seul qui décide unilatéralement de la durée du travail, (temps partiel, temps plein, heures supplémentaires).
Sarkozy est encore un menteur ou un ignorant lorsqu’il dit que « les 35 h doivent être un minimum » : il y a une grande majorité des 3,7 millions de temps partiel (85 % de femmes, 80 % de non qualifiés) qui aimeraient travailler plus, oui, « 35 h minimum ».
Sarkozy est encore un menteur lorsqu’il promet de gagner plus à ceux qui feraient des heures supplémentaires, alors qu’il n’a pris, depuis cinq ans avec son ami Fillon, que des mesures pour baisser les salaires liés aux heures supplémentaires :
• en maintenant à 10 % de majoration les heures comprises entre 35 et 39 h dans les entreprises de moins de vingt salariés, alors qu’elles auraient dû être majorées de 25 % depuis le 1er janvier 2005 (cinq millions de salariés concernés on travaillé plus en gagnant moins !)
• en allongeant les contingents annuels d’heures supplémentaires autorisés de 130 à 200 h (et pire parfois : 230 h dans la poissonnerie et 360 h dans la restauration), ce qui aboutit a reporter de la 131e heure à la 221e heure, le seuil de déclenchement de majorations des heures a 100 %. Les salariés concernés travaillent plus et gagnent moins !
• en généralisant les « forfaits jours » et en déduisant « les temps de déplacement professionnels des temps de travail effectifs » forçant des millions de salariés cadres ou non a travailler plus en gagnant moins.
• en permettant le rachat des compte épargne temps à taux zéro, congés payés non pris, heures supplémentaires dissimulées, ce qui revient à faire travailler plus pour gagner moins.
Pas un salarié de ce pays n’a intérêt à voter pour Sarkozy, sauf à méconnaître ses droits et à voir baisser son salaire réel, brut et net, pour une plus longue durée du travail...
Car Sarkozy propose de baisser le salaire brut sur lesdites heures supplémentaires qui seraient moins majorées, et moins contrôlées, donc moins payées (c’est déjà, hélas, le champ le plus étendu des délinquances patronales contre les salaires, 9 plaintes sur 10 à l’inspection du travail concernent des heures supplémentaires impayées). Il y a déjà des millions de salariés qui travaillent 45, 50 voire 60 h et qui ne gagnent pas beaucoup!
Mais si un salarié avait un doute, il devrait s’attacher à comprendre pourquoi Sarkozy s’en prend aux huit à neuf millions de salariés qui ont fait grève en mai 68.
Sarkozy contre les huit millions de grévistes de mai 68
Sarkozy augmente les décibels au fur et à mesure que le deuxième tour approche, comme s‘il voulait mettre la barre de plus en plus haut contre les « fraudeurs du métro » et « les fautes des syndicalistes » qu’il place dans le même sac...
Il accuse mai 68 d’avoir « imposé le relativisme intellectuel et moral », « liquidé l’école de Jules Ferry », « introduit le cynisme dans la société et dans la politique », « abaissé le niveau moral de la politique » (sic).
« La morale, après 1968, on ne pouvait plus en parler. » Selon lui, pour « les héritiers de 1968, il n’y avait plus aucune différence entre bien et le mal, le beau et le laid, le vrai et le faux, l’élève valait le maître (…) Les héritiers de ceux qui, en mai 68, criaient "CRS=SS " prennent systématiquement le parti des voyous, des casseurs et des fraudeurs contre la police (…) Voyez comment le culte de l’argent roi, du profit à court terme, de la spéculation, comment les dérives du capitalisme financier ont été portées par les valeurs de mai 68 (…) Je veux tourner la page de mai 68 une bonne fois pour toute », se lâche enfin Sarkozy.
Pourquoi une telle haine de la part de cet apprenti caudillo qui devait avoir 13 ans en mai 68 ?
Cette tirade hargneuse, hors norme, acharnée, contre un des plus grands mouvements de l’histoire sociale de notre pays, est plus que tout le reste le signal de la grande revanche de l’extrême droite dirigeante de l’UMP !
C’est contre les huit à neuf millions de grévistes de mai-juin 68 qu’il en a, lui qui ose se faire photographier devant des ouvriers portant le casque de sécurité, pour mieux les berner.
S’il va voir « la France qui se lève tôt » c’est pour qu’elle se lève encore plus tôt, se couche plus tard et gagne moins, pour que les profits de ses amis de Neuilly augmentent : tout cela dans une mise en scène que toute les rédactions en chef de la presse aux ordres orchestrent !
Nul doute que Sarkozy pense la même chose de toutes les luttes sociales, du Conseil national de la Résistance, de mai- juin 36, de la Commune de Paris, des combats pour les journées de 10 h puis de 8 h, pour les 40 h, pour « l’assistanat » de la Sécurité sociale et des retraites par répartition...
N’est-ce pas lui qui a assez d’inculture pour mettre dans son clip télévisé :
« Le travail c’est la liberté » (ARBEIT MACHT FREI) ?
En fait ce que signifie avec arrogance, l’homme au Karcher, Sarkozy, c’est qu’il veut écraser tout mouvement social de type CIP (mars 94, nov-déc 95), retraites (printemps 2003), CPE (janvier-avril 2006), c’est qu’il fera la guerre aux syndicats puisque sa première loi sera contre le droit de grève !
Sarkozy a amalgamé à Bercy, dimanche 29 avril, « la France qui paye toujours pour tous les autres, (...) qui paye pour les fautes des politiques, des technocrates, des syndicalistes, qui paye pour les fraudeurs, qui paye pour les voyous, qui paye pour ceux qui profitent du système, qui paye pour ceux qui demandent toujours et qui ne veulent jamais rien donner ».
Le lien est clair dans sa réthorique et ses objectifs entre syndicalistes, fraudeurs, voyous... Tout ça, c’est des « racailles ».
Comme il a fait la chasse aux « racailles », et, il le redit ce lundi 30 avril, « aux poignées de voyou qui se croit au-dessus des lois et de la morale », il veut remonter jusqu’à atteindre dans la mémoire ce qu’il doit appeler des « casseurs » de 68... C’est la même chose pour lui, c’est le peuple dont il feint de se réclamer, les sans grades auxquels il prétend parler et que pourtant il hait du haut de ses talonnettes d’apprenti caudillo.
C’est la haine ancestrale des riches contre les partageux, les rouges, les syndicalistes, qu’il a exprimé à Bercy dans son dernier meeting show à l’américaine. Sarkozy annonce qu’il entend écraser tout mouvement social !
Au Karcher contre les luttes sociales, contre la pègre syndicale !
Que les électeurs protégent dimanche 6 mai la France de la victoire de ce caudillo. Ce serait le pire qui puisse arriver !
Que pas une voix ne manque à Ségolène Royal...
Gérard Filoche, 30 avril 2007.
Photo de Gérard Filoche prise sur le site Démocratie & Socialisme.
Photo de manifestation d'enseignants prise sur le site de l'IRHSES.
Note : Gérard Filoche est entre autres, auteur de « 68-98, une histoire sans fin, mémoires »
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