C’est le point de vue du juge Rosenczveig
Alors que se discute le projet de loi sur la prévention de la délinquance, dont le ministre de l’intérieur a dû retirer mardi le volet sur la santé, Jean-Pierre Rosenczveig, président du tribunal pour enfants de Bobigny (Seine-Saint-Denis) a récemment accordé au syndicat enseignant SGEN-CFDT un entretien sur l’évolution de la délinquance en Seine-Saint-Denis et l’Ordonnance de 1945.
Pour le magistrat, l’année 2006 n’a pas été bonne pour les enfants, peut-on lire sur son site…
« 2006 n'aura pas été un grand cru pour les droits des enfants dans ce pays. La grande pauvreté ne décroit pas, la frature sociale se cristallise, les enfants étrangers ont mauvaise presse, la repression avec la faute est en passe de devenir la stratégie de prévention sociale...
Alors que souhaiter pour 2007 ? Sinon que ce pays vieillissant réalise enfin que c'est prenant mieux en compte ses enfants de toutes couleurs et de tous statuts qu'il se protégera sinon se developpera au mieux ! La pré-campagne électorale n'a pas été exaltante...
Si vous avez un peu d'énergie, venez me rejoindre à Défense des Enfants international-France », peut-on lire en guise de vœux sur la page d’accueil de son site.
Par ailleurs, sur le blogue que tient le magistrat, on trouve ce point de vue, qui n’a rien de réjouissant, à la date du 8 février :
Passé presque inaperçu du simple quidam dans cette pré-campagne électorale actuellement très bas de gamme et franchouillarde, l’accord signé par le premier ministre avec le gouvernement roumain sur le raccompagnement vers leur pays des enfants qui se trouveraient isolés en France. (Dépêche AFP du 8 février 2007)L’expert lui est a priori perplexe, dubitatif ou inquiet.
Perplexe car il y a déjà eu un accord de cette veine signé par le ministre de l’intérieur Nicolas Sarkozy en 2002 avec ses interlocuteurs roumains. Ce dispositif n’a pas généré de grands effets par-delà l’effet d’annonce de l’époque. Pour avoir travaillé un an en Roumanie sur le thème enfance en danger je n’en attendais pas grand chose. Une soixantaine de mineurs seulement selon une étude récente auraient été rapatriés. C’est peu au regard des centaines d’enfants qui séjournent régulièrement en France sachant que nombre naviguent régulièrement entre la Roumanie et la France. Et de fait comment pourrait-il en être autrement ?
Le différenciel économique demeure tel entre nos pays que le peu que les enfants roumains grapillent en France est énorme pour leur pays. Je les vois défiler tous les jours dans mon cabinet, souvent - masi pas toujours - auteurs de petits vols (hier un pantalon et un sweet chez “A fond la forme” ou des lames de rasoir chez “Rond-point”). Une délinquance souvent de survie qui dégage un minimum pour être envoyé à la mère restée au pays!
Bien sûr il y a aussi derrière des réseaux d’exploitants que nous avons plus ou moins mis en évidence. Ainsi toutes ces bouteilles de champagne ou de vin volées ne le sont pas pour faire la fête en France avec des copains ! La plupart de ces vols ne sont pas importants, mais au final doivent drainer beaucoup pour la Roumanie.
Je ne néglige pas la prostitution dans laquelle se trouve souvent embarqués ces garçons quand les parcmêtres font défaut.
En tous cas ces enfants sont d’une tristesse effroyable. Ils portent leur malheur dans leur yeux et sur leur épaule voutée. Ils sont privés d’enfance.
Ils ne sont ni tous des voleurs ni voués à voler. Quand on arrive à gagner leur confiance il est possible de les extraire de leur squatt et des dangers dans lesquels ils se meuvent au quotidien pour survivre. A Montfermeil comme dans quelques autres lieux, en alliant moyens publics et associatifs, on sort ces jeunes de la délinquance et on les amène à une formation professionnelle solide. 95% ne sont plus delinquants avance Hors la Rue pour ceux qu’elle suit. Nombre sont régularisés, certains qui en expriment le souhait deviennent même français.
Le retour volontaire en Roumanie est rare. Ils sont en mission familiale en France. Ils viennent souvent pour étudier. Tous et de loin ne sont pas voleurs.
Tout un temps ces enfants étaient quasiment tous issus de la communauté rom ou tsygane. Ils rejoignaient les roms de l’ex-Yougoslavie et d’autres partie de l’Europe de l’est. Bien évidemment on retrouve toujours parmi ceux que nous croisons aujourd’hui de jeunes rom, mais le fait nouveau est bien que s’y ajoutent des jeunes roumains essentiellement issus de la region du Muramures (préfecture Satu Maree - au Nord Ouest du pays et de l’est du pays. On doit ajouter des Moldaves (venus de Chishinu). En d’autres termes nos jeunes ne sont pas tous et de loin des roms.
Ils vivent de petits travaux ou de la charité avant de trouver une bonne filière de protection. On peut craindre malheureusement que certains ne la trouvent jamais ou la refusent comme ce jeune de 13 ans qui ce matin a fugué quelques minutes après que je l’eus confié à l’AEPC en prenant le soin de lui faire rencontrer de ces jeunes compatriotes. J’avais pourtant mis le paquet pour le convaincre, y compris le menacer d’une peine de prison lorsqu’il sera jugé au début mars prochain.
S’ils reviennent en Roumanie à quel sort sont-ils voués ? On sait que les filles repartiront souvent vers d’autres lieux de prostitution. Les garçons sont aujourd’hui sans perspectives. Les services sociaux en Roumanie restent très peu developés. Certes quelques investigations se font aujourd’hui qui ne se faisaient pas avant mais rien n’a fondamentalement changé sur les prises en charge proposées. La France a mis 150 ans pour en arriver là où elle en est !
Alors le nouveau protocole qui confie le soin au parquet d’organiser le retour est inquiétant. Comment entend-on pratiquer ? Par la force quand aujourd’hui on s’efforce à la conviction, avec des succès limilités, mais réels ? Au mépris de l’inexpulsabilité des mineurs ?
Pour autant force est de reconnaître que le problème auquel nous sommes confrontés est important. Ces enfants arrivent par vagues. Ils vivent dans des conditions dures - on l’a dit - souvent exploités ou en passe de l’être. Ils ont leur famille en Roumanie, souvent extrèmement pauvre, ils sont en relation avec elle et ils attendent que nous leur offrons une scolarité ou une possibilité de travail. Certains pris en charge demandent à revenir au pays pour visiter leurs parents ou pour un événement grave comme s’ils vivaient à l’autre extrémité du même pays. Difficile de leur faire entendre qu’il y a encore des frontières et que normalement s’ils venaient de Marseille nous devrions les faire raccompagner à Marseille, ils sont en France, bénéficient de l’inexpulsabilité, ils ne peuvent donc pas circuler librement entre les deux pays s’ils sont pris en charge au titre des enfants étrangers isolés en France.
Les professionnels que nous sommes sont donc au coeur de contradictions que j’ai déjà developpés ici dans plusieurs notes. Il faudrait certainement les percer publiquement un jour sachant qu’à terme le developpement économique aidant le problème se dissoudra de lui-même. Le nouvel accord de Bucarest ne traite pas le fond du sujet. En attendant nombre de ces jeunes sont voués à devenir de bons français d’origine roumaine.
Illustration © Site du magistrat
je suis étonnée du discours de ce magistrat (assez médiatique); je conçois fort bien que la situation économique de la Roumanie soit difficile et qu'elle envoie en France ses enfants (dans de mauvaises conditions) mais M.Rosenczveig semble "excuser" les petits délits : "La plupart de ces vols ne sont pas importants, mais au final doivent drainer beaucoup pour la Roumanie."."Une délinquance souvent de survie qui dégage un minimum pour être envoyé à la mère restée au pays!"...
la misère doit elle tout passer ?; un tel discours n'encourage-t-il pas la petite délinquance qui asphyxie nos tribunaux ?
je comprends fort bien la compassion de ce magistrat envers les enfants, mais pourquoi ne pas accepter aussi les petits larcins des enfants africains, asiatiques, européens, français ?...des grands enfants ?...des adultes en gande précarité ?...de tout le monde...comme disait le chanteur :"il ne suffit pas d'être pauvre pour être honnète"...
accepter n'encourage-t-il pas le système?
je suis songeuse...
Rédigé par : marguerite | 19/02/2007 à 02h11
Les propos du président Rosenczveig reflètent ce qui se passe de l'autre côté du périphérique (dans le "9-3"), comme dans beaucoup de métropoles.
Rosen n'est pas pour la « tolérance zéro », mais pour la pédagogie. Il a d'ailleurs, voici pas mal d'années, publié un jeu éducatif.
Parmi ses livres, en janvier 2003, on trouve "Justice ta mère !" (où il montre son engagement et son attachement à l'endroit des enfants). Parmi les critiques qu'il avait eues à l'époque, je vous en livre une qui montre bien l'état d'esprit ce de magistrat, qui est AUSSI un homme :
" Justice, ta mère ! " " Tous des pourris. " Telles sont les apostrophes trop souvent entendues par ce magistrat qui préside le tribunal pour enfants de Bobigny. Pourtant, au-delà du style et du vocabulaire utilisé par certains jeunes, la délinquance des mineurs constitue un constat d'échec cruel pour notre société. C'est peu de dire que de nombreux jeunes vivant dans les banlieues difficiles ne croient plus dans les institutions de la République : ils doutent que la loi, la police, les juges incarnent un idéal de justice. La famille, l'école n'ont guère plus de crédit à leurs yeux. Seules deux choses comptent : être fort et " avoir de la tune ". Cependant, ils ne sont dépourvus ni de qualités, ni d'énergie, ni de compétences. A nous de les mobiliser en renouant un dialogue en passe de se rompre. En restituant la parole à ces jeunes qu'il côtoie en qualité de juge et de militant, Jean-Pierre Rosenczveig nous fait prendre conscience que leurs interpellations, tantôt naïves, tantôt provocantes, souvent violentes, trahissent une réelle méconnaissance de la loi mais, souvent, un sens profond de la justice. Il a choisi de répondre à chacune d'elles - plus de deux cents, au total - qui évoquent tour à tour les rapports entre ces jeunes et la police, la justice, la famille, l'école et, plus généralement, la société. Il privilégie le discours simple et direct, loin de toute langue de bois et de la dissertation savante et lisse du juriste. Son témoignage n'en est que plus fort et authentique."
Merci d'être passée par ici entre la Saint-Valentin et la Sainte-Marguerite… Revenez quand vous voulez.
Rédigé par : Fabien | 19/02/2007 à 11h42
je suis d'accord avec lui quand on dit qu'il faut éduquer avant de réprimer, quand on dit que les oubliés de la société rejettent le système qui les a lâchés...mais je parlais des extraits que vous avez choisi où il "tolère" cette petite déliquance qui entretient la misère , ici et là bas; piller un parcmètre ne peut pas entretenir une famille en Roumanie...(d'ailleurs, bilan : impossible de payer un stationnement dans Paris sans Monéo) et surtout ça favorise encore plus l'envoi de ces enfants loin de leur famille et dans la délinquance; idem pour les réseaux de prostituion.
il faut évidemment aider les enfants mais pas encourager le système...vicieux...
mais ma remarque n'enlève en rien le fait que ce monsieur est très bien.
votre dernière remarque me fait penser à un dicton grivois que j'ai entendu ces jours ci, de la bouche d'un animateur télé...mais nous n'oseriez pas tout de même !...pas vous ! pas sur les nouvelles arrivantes !?
néanmoins, je repasserai.
Rédigé par : marguerite | 19/02/2007 à 16h15
Marguerite,
Le pillage des horodateurs a coûté des sous à la collectivité, c'est-à-dire aux contribuables locaux, même les piétons ou les usagers des transports en commun. Ce que "Rosen" voulait dire, à mon sens, c'est que ce ne sont pas les gamins les responsables, mais les organisateurs.
Quand à vos dernières lignes, je ne suis pas certain d'avoir tout bien compris. Il se trouve que, jusqu'à il y a peu de temps, une certaine Valentine laissait souvnt des commentaires ici, et qu'elle a disparu peu avant le 14 février…
Rédigé par : Fabien | 20/02/2007 à 00h37
je suis balog et je ete dan cet etablismo le Foyer concordr
Rédigé par : balog | 01/12/2009 à 01h00