Un incendie criminel a partiellement détruit dans la nuit du mardi 1er au mercredi 2 novembre les locaux de l’hebdomadaire Charlie Hebdo, 62, boulevard Davout, dans le 20e arrondissement. C’est ce mercredi que le journal satirique publiait un numéro estampillé “Charia Hebdo”, à la suite des résultats électoraux en Tunisie, pays où il n’est pas en vente, y compris depuis le 14 janvier. Il s’agit de la deuxième attaque nocturne contre Charlie Hebdo dans le 20e arrondissement, la précédente remontant à mars 2006.
C’est vers une heure du matin qu’un engin incendiaire a été lancé dans les locaux du journal. Le sinistre a pu être rapidement maîtrisé, mais les dégâts sont importants : moquette, système électrique et divers postes de travail ont été dévastés.
Le site Internet du journal a également été piraté.
Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, qui devait se rendre sur place à l’heure du déjeuner, a appelé «tous les Français à se sentir solidaires» d’«un journal qui exprime par son existence et par sa façon d'être la liberté de la presse».
Le Premier ministre en a appelé à la «liberté d’expression», cette «valeur inaliénable de notre démocratie», estimant que «toute atteinte à la liberté de la presse doit être condamnée avec la plus grande fermeté», et a demandé au ministre de l’Intérieur que «les auteurs soient poursuivis».
Pour Frédéric Mitterrand, «les intimidations dont a fait l'objet Charlie Hebdo ces derniers jours et l'attaque de sa rédaction dont le journal a été victime cette nuit sont intolérables». Le ministre de la Culture et de la Communication a exprimé sa «plus profonde solidarité aux journalistes et aux équipes de Charlie Hebdo et à ses lecteurs».
Sur Europe1, le Secrétaire général de l’UMP Jean-François Copé a condamné l'«attentat contre un journal».
Cet acte «manifeste un symptôme de violence», a estimé Christine Boutin, présidente du Parti Chrétien démocrate sur i-Télé, pour qui «la liberté de la presse et d'expression sont importantes pour notre pays». Le week-end dernier, plusieurs sites de l’Eglise catholique de France avaient aussi été piratés. Le 31 octobre, la candidate à l’élection présidentielle avait également dénoncé l’amalgame entre «les militants d’extrême droite et certains islamistes radicaux» au sujet d’une pièce de théâtre qui —selon elle— s’avérait être «loin de la provocation sacrilège».
Estimant que «Charlie Hebdo s'attaque à la montée de l'islamisme», Bertrand Dutheil de La Rochère, conseiller République-Laïcité de Marine Le Pen demande «que les pouvoirs publics, en France, réagissent fermement contre un terrorisme qui n'est plus seulement intellectuel».
«Brûler un journal est un acte de guerre contre les libertés d'expression et d'information. De tout coeur avec Charlie», a réagi Corinne Lepage, avant de s’interroger sur le rôle de Claude Guéant (lire plus bas).
Candidat (PRG) à la primaire socialiste, Jean-Michel Baylet a condamné sur twitter «avec fermeté l'attentat dont le journal #CharlieHebdo a été la cible cette nuit».
«Tout mon soutien à la rédaction de Charlie Hebdo victime d'un incendie d'origine criminelle que je condamne fermement», écrit de son côté Eva Joly, candidate EELV.
Pour Martine Aubry, première secrétaire du PS, «la liberté de la presse s'exerce aussi à travers la dérision et l'humour. Tout coup porté à cette liberté est un coup porté à la démocratie».
«En 88 brulait 1 cinema oú etait projeté 1 film de Scorcese, en 2011 les bureaux de Charlie H brûlent. Inacceptable. République réveille toi», rappelait dès 8h ce matin Christophe Girard, l’adjoint au maire (PS) de Paris en charge de la Culture. Avant de http://twitter.com/#!/cgirard/status/131640965730545664 lancer à 8h57: «Ne laissons jamais un organe de presse libre sans locaux C'est le devoir de la Republique. Charlie Hebdo doit pouvoir continuer á travailler».
«Les équipes de Charlie hebdo sont les bienvenues à Libé le temps qu'elles retrouvent des locaux et des ordinateurs. On se serrera!», a écrit sur son compte twitter à 9h36 Nicolas Demorand, directeur de la rédaction de Libération. Dans le feu de l’action, Libé envisage même un numéro spécial illustré par les dessinateurs de Charlie.
«Toujours par solidarité à #Charliehebdo, @Laurent_Joffrin a proposé ce matin à la rédaction de s'installer dans nos locaux.», lisait-on à 10h41 sur le compte twitter du Nouvel obs.
Depuis lundi circule sur Internet la couverture du numéro de ce mercredi, rebaptisé “Charia hebdo”, révélée par Fabrice Pierrot. Dans la foulée, toujours sur twitter, devant l’emballement médiatique, la rédaction de Charlie s’étonnait: «des excites peuvent ils créer le buzz tout seuls et ensuite s'en plaindre? RAPPEL nous n'avons même pas encore publie la couv de CHebdo»
Le journal satirique avait déjà reçu des menaces en 2006, après avoir publié des caricatures du prophète Mohamed parues l’année précédente dans la presse danoise. Puis, lors de l’exposition «Ni Dieu ni Dieu», dans le 20e arrondissement, au printemps 2006, le café La Mer à Boire avait fait l’objet d’une attaque nocturne menée par des «petites frappes» sans envergure, selon la police. L'enquête avait été longue et discrète.
Dans ces conditions, on peut se demander pourquoi le journal n’était pas déjà surveillé par les forces de l’ordre. C’est précisément la question posée par la présidente de Cap21 Corinne Lepage: «Comment se fait il que #Gueant n'ait pas fait protéger l'immeuble de Charlie Hebdo alors qu'il existait des menaces? Etonnant!».
Fabien Abitbol, photo Pierre-Yves Beaudouin et capture d'écran twitter
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