Bruno Beschizza, tête de liste UMP aux élections régionales en Seine-Saint-Denis, a été nommé sous-préfet hors cadre par un décret présidentiel du 23 avril, publié ce mardi 27 au Journal officiel. Il peut donc rester au conseil régional de l’Ile-de-France. André Santini et Yves Jégo, eux, sont en sursis, grâce à un recours déposé le 27 mars par le Front national.
Ancien syndicaliste policier, M. Beschizza (photo Synergie Officiers) s'était mis en congé du syndicat Synergie (deuxième syndicat
d'officiers de police, dont il était le secrétaire général), durant la campagne
électorale.
Cette nomination avait été éventée par le blogue Libertés surveillées. « Ils m’ont dit qu’ils
allaient trouver une solution statutaire, expliquait Bruno Beschizza, qui
devait alors abandonner son mandat syndical. Je suis commandant fonctionnel, je
peux être sous-préfet, on fait souvent comme ça, avec les commandants de
l’armée ».
Le mandat de conseiller
régional n’était en effet pas compatible avec la fonction de commandant de
police, ayant exercé sur le même territoire, depuis moins de six mois, en vertu
des articles L195 et L342 du Code électoral combinés ! Or, pour Bruno Beschizza, démissionner de la police (ou
se mettre en réserve) revenait à abandonner un salaire de l’ordre de 4000€ par
mois pour une indemnité d’environ 2100€ au conseil régional de l’Ile-de-France.
La fidélité au président Sarkozy a des limites, surtout lorsqu’on a charge de
famille, et être tête de liste pour — par après — démissionner aurait
fait quelque peu désordre pour les électeurs…
La pirouette de cette
nomination de sous-préfet (avec des émoluments aussi de l’ordre de 4000€
mensuels) ne se heurtait alors plus qu’à un obtacle, lui aussi relevant de
l’article L195 du Code électoral qui stipule, en son premier alinéa que ne
peuvent être élus : « Les préfets dans le département où ils exercent
ou ont exercé leurs fonctions depuis moins de trois ans ; les sous-préfets,
secrétaires généraux, directeurs de cabinet de préfet ou sous-préfets chargés
de mission auprès d'un préfet, ainsi que les secrétaires en chef de
sous-préfecture, dans le département où ils exercent ou ont exercé leurs
fonctions depuis moins d'une année ». La nomination de M. Beschizza comme
sous-préfet « hors cadre », c’est-à-dire sans affectation, permet de
contourner cet obstacle, même s’il s’agit d’une grosse (d’une très grosse)
ficelle. Et au diable la valeur travail, tant prônée par… le candidat Sarkozy ! C'est ainsi qu'a été publié ce mardi le décret NOR : IOCA1009407D du 23 avril 2010 portant nomination d'un sous-préfet hors cadre, M. BESCHIZZA (Bruno) «
Sursis pour André Santini et Yves Jégo
Comme le Front national a déposé un recours électoral sur le scrutin francilien, et que ce recours est suspensif, la nomination de Bruno Beschizza intervient dans les délais. Mais deux autres têtes de liste de la majorité presidentielle sont encore sur la sellette : MM. Santini (NC, Hauts-de-Seine) et Jégo (UMP, Seine-et-Marne). L’un comme l’autre sont à la fois députés et maires, respectivement d'Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) et de Montereau-Fault-Yonne (Seine-et-Marne). Les dispositions sur le cumul des mandats devront s’appliquer à ces deux têtes de listes si — ce qui est fort probable eu égard à certains éléments — le Conseil d’Etat rejette le recours du Front national Ile-de-France. Il convient de lire les règles applicables aux parlementaires sur le site du ministère de l'Intérieur pour comprendre que ces deux maires (donc conseillers municipaux d'une « commune d'au moins 3500 habitants ») ne peuvent pas siéger au sein d'une assemblée régionale.
Ce recours s'appuie sur trois motifs : le premier
porte sur des sondages diffusés pendant la campagne, le deuxième sur des
affiches de la Liste chrétienne (menée par Axel de Boer, qui a obtenu 0,85% des
voix), et le troisième sur des tribunes parues bien avant le scrutin de mars
dans une publication du conseil général du Val-de-Marne, selon Marie-Christine
Arnautu, chef de file du Front national aux dernières élections en
Ile-de-France. Dès le surlendemain du premier tour, sous le titre Faute avouée doublement condamnée, elle écrivait notamment au sujet de Axel de
Boer : « Empêcher la liste du Front National de se maintenir au
second tour (9,3%) : intention délibérément exprimée sur certains sites, avec
une haine bien peu chrétienne. Les 0,85% de catholiques ayant voté pour cette
liste apprendront sans doute avec beaucoup de satisfaction qu’ils ont
voté pour un ancien adhérent du Modem, un salarié et correspondant de l’église
de scientologie de Copenhague pendant quinze ans (20ème sur la liste du 93)
ainsi que pour de nombreux adhérents du Parti de la France ou de ce qu’il en
reste ». Ambiance…
Une autre affaire, selon Mme Arnautu, concerne des
sondages ayant donné lieu à la « diffusion de fausses nouvelles »,
et, de la part du FN, à une plainte contre X… avec constitution de partie
civile auprès du doyen des juges d'instruction du tribunal de grande instance
de Paris.
Le 14 mars dernier, le FN a obtenu 9,29%, soit à peine
moins que les 10% nécessaires au maintien au second tour du 21 mars. Depuis
1986, le parti de Jean-Marie Le Pen avait toujours été représenté au conseil
régional de l’Ile-de-France. Dans le deuxième mandat de Jean-Paul Huchon, le FN
disposait de neuf élus. Qui, souvent, s'opposaient au PS et à l'UMP.
Voilà donc deux conseillers régionaux de la majorité
présidentielle « en sursis » grâce au FN et un conseiller régional
« sauvé » par la volonté du président Sarkozy.
F. A.
è Bruno Beschizza (UMP) veut connaître les origines des policiers
è Le cumul des mandats électoraux (ministère de l’Intérieur)
Commentaires