Alors que la population parisienne est passée, de 1998 à 2008, de 2,123 à 2,193 millions d’habitants, le nombre de policiers exerçant une mission de sécurité publique sur Paris est passé, dans le même temps, de 10091 à 7423, soit une baisse de 2598 policiers à la préfecure de police de Paris (PP), indique un rapport rendu public le 16 avril. Le même rapport, rédigé par les criminologues Alain Bauer et Christophe Soullez et révélé par La Gazette des communes (lire la note de bas de page) estime à 3237 le nombre de policiers et gendarmes (équivalent temps plein, ETP) qui, en France métropolitaine, n'ont pas été affectés à des tâches de sécurité publique.
A Paris, en 2008, un policier
parisien s’occupait de la sécurité de 295 habitants, contre 210 en 1998. C’est
ce qui ressort du rapport « Où sont les policiers et les gendarmes ?,
10 ans après », mis en ligne le 16 avril par La Gazette des communes, et rédigé par Alain Bauer et Christophe Soullez.
Sur le reste de la France, la
tendance est inverse, mais dans des proportions moindres : 490 habitants
par policier en 2008, contre 536 en 1998, les effectifs étant passés de 52591 à
58859.
L’étude
relève aussi la montée en charge des tâches pour lesquelles les policiers (ou
gendarmes) ne sont pas « disponibles », à savoir les escortes, les
comparutions, les transfèrements, la présence aux audiences judiciaires, etc.
En équivalent temps plein (ETP), « l’évolution des charges
judiciaires est plus marquée au sein de la Gendarmerie départementale : +16,8% contre +4% pour la Sécurité publique », note le rapport, qui explique
que, pour 2008, « en cumulant toutes les heures réalisées par l’ensemble
des agents, l’équivalent de 2129 fonctionnaires de la sécurité publique, 865
militaires de la gendarmerie nationale et 243 fonctionnaires de la Direction de
la police urbaine de proximité, soit 3237 agents à temps plein, ont été
indisponibles suite à l’exercice de ces charges judiciaires ».
Là où le rapport se gâte, c’est
à partir de la page 22, lorsque les deux auteurs font l’addition des effectifs
indisponibles, qui dépassent les 18000 ETP : 11460 en sécurité publique, 4407 en
gendarmerie départementale et 2281 à la direction de la police urbaine de
proximité de Paris, DPUP, soit plus de 22% des effectifs. Paradoxalement, comme on peut le constater presque chaque mois, les résultats statistiques de la police parisienne sont bons, alors que ceux de la France sont mauvais ou, depuis que le mode de présentation a changé, sont « moins mauvais » (lire par exemple ici pour Paris ou là pour la France). Et encore, le nombre de policiers parisiens (
Sur les 2281 policiers de la DPUP indisponibles à Paris (en ETP) en 2008, le rapport dénombre 894 agents effectuant des tâches administratives, 584 agents absents pour maladie ou congés de maternité, 250 agents en formation continue, 243 agents équivalent temps plein affectés aux charges judiciaires, 133 agents affectés aux gardes statiques, 107 agents sur des missions de maintien de l’ordre, et 70 agents en détachement ou mis à disposition. Le nombre de détachements et celui des “plantes vertes” (gardes statiques, lire le lexique du policier) a fortement diminué ces dernières années. Or c'est essentiellement à Paris que se trouvent les administrations et les ambassades. Ils ne seraient plus que 70 (en ETP) dépendant de la DPUP (Paris), sur un total de 538 en 2008, contre 1127 en 1998, soit une baisse de plus de 50% (-97% dans les administrations, -35% à -37% dans les ambassades).
Il s'agit là de l'un des effets de la mise en place de la loi de finances de 2001, dont tous les points n'ont pas été mis en application, au grand dam des syndicats de police, notamment pour le taux des heures supplémentaires… et leur paiement effectif. Après tout, dans la période étudiée (1998-2008), Nicolas Sarkozy n'a été ministre de l'Intérieur que quarante-quatre mois (de mai 2002 à mars 2004, puis de mai 2005 à mars 2007), soit 37% du temps étudié, puis président de la République (élu entre autres sur la sécurité) durant vingt mois, soit 17% de la période sur laquelle porte l'étude. Un total de plus de cinq ans (sur dix), sans compter son passage au Budget…
De quoi désespérer les policiers qui ont pu croire en lui, et qui disposent d'un bulletin de vote, même s'ils sont soumis au devoir de réserve.
49 suicides ont été dénombrés
en 2008 dans la police (y compris Paris), contre 21 dans la gendarmerie. En
1998, les chiffres étaient de 59 (police) et 32 (gendarmerie).
Développant diverses pistes,
les auteurs du rapport vont jusqu’à envisager la spécialisation ou
l’externalisation de certaines missions : « la gestion des centres de
rétention administrative et l’exécution des décisions d’éloignement des
personnes en situation irrégulière sur le territoire national sont des missions spécifiques peu en rapport avec
les missions de police territoriale. L’exercice de celles-ci devrait également
revenir à des services spécialisés hors police et gendarmerie, voire être
externalisées. » Ils préconisent notamment le recrutement de personnel
administratif et technique.
Alors que le statut de la
police parisienne a été modifié en septembre 2009 (lire ici), ils écrivent au sujet de Paris et de l’Ile-de-France :
« La situation très complexe de l'Ile de France devrait faire l'objet d'un
nouveau développement en fusionnant les fonctions de Préfet de Région, Préfet
de Police et Préfet de Zone, pour rendre totalement cohérente l'action des
forces sur un territoire dynamique dont les réseaux de transports sont vitaux.
Un préfet délégué à la sécurité et à la défense pourrait régler le cas de Paris
intra-muros et contribuerait à rendre le statut parisien plus proche de la
norme nationale. Dans cet esprit, une meilleure synergie entre la Direction
centrale de la police judiciaire et la Direction régionale de la police
judiciaire de Paris serait à rechercher ».
Si la lecture du Figaro (19 avril) ne fait aucune référence à La Gazette des communes (16 avril, pourtant…), son analyse est plus
« sécuritaire » et ne prend donc en compte que certains paramètres. De son
côté, la dépêche AFP (du 19 avril aussi) est très succincte et ne parle que de
« près de 3000 » policiers et gendarmes qui « manquent » au
31 décembre 2008.
Fabien Abitbol, ill. de Stéphane Vallet
è Une étude révèle l’insuffisance des effectifs de police et de gendarmerie sur
le terrain (exclusivité de La Gazette des communes, 16 avril)
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