Non, il n’y a pas que des lofts dans le faubourg Saint-Antoine ! Quelques artisans d'art animent encore les cours pavées du quartier. Jusqu'au 1er décembre, la Maison du faubourg leur consacre même une exposition. Il faut dire qu'ils sont un peu une espèce en voie de disparition.
« Avant, il y avait des centaines d'ateliers dans le faubourg, aujourd'hui, il n'y en a plus qu'une poignée », se désole Pierre, président de l'association des Artisans et des métiers d'art. Avec leur maison Straure, Pierre et Philippe font office de rescapés en résistant à la flambée des loyers. Installés dans le quartier depuis bientôt 25 ans, ces deux ébénistes, âgés d'une cinquantaine d'années, sont nichés dans une cour, au 95, rue du Faubourg-Saint-Antoine, dans le 11e arrondissement.
« On a parfois l'impression d'être des phénomènes »
Les touristes étrangers frappent à leur porte pour décorer leur pied-à-terre parisien ou demander un escalier « sur mesure ». Leur adresse figure sur des guides aux Etats-Unis. Chaque année, un tour-opérateur passe aussi chez eux pour faire découvrir leur domaine aux touristes japonais. « On a parfois l'impression d'être des phénomènes. Les gens font des photos à travers nos vitres », raconte Pierre. Leur atelier a en effet de quoi fasciner. Plâtres de moulures accrochés aux murs, dessins de styles soigneusement entreposés dans les armoires, établis, sciure au sol, meubles en devenir : on se croirait dans un décor de théâtre.
Alors que tous les locaux étaient occupés par des artisans, autour d'eux, aujourd'hui, seuls quelques rez-de-chaussée font encore office d'ateliers. Le reste a été transformé en logements. « Les choses changent et ça fait partie de la vie », résume Pierre. Et même s'ils étaient ravis de réparer la chaise de la petite grand-mère du faubourg, ils sont désormais enchantés d'accueillir les enfants des couples bobos qui ont envahi le quartier.
« L'ambiance est un peu moins conviviale. On ne retrouve plus les collègues le midi au p'tit café. Mais, dès qu'un jour on reste fermé, le lendemain, les habitants de la cour viennent frapper à la vitre pour nous demander où nous étions passés », raconte Philippe. Dans quelques années, les deux compères partiront à la retraite. S'ils trouvent le bon apprenti, ils passeront la main. Et sinon ? « Eh bien, on transformera les lieux en musée... Pourquoi pas ? »
Marie-Anne Gairaud, pour Le Parisien
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