La fronde de plusieurs historiens contre le ministère de l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Codéveloppement se poursuit. « Compte tenu de l’impact de [leur] démission » de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration (CNHI), ils ont tenu vendredi une réunion publique à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) pour décider « des modalités d’action à engager ».
Point central de leur engagement : le lancement du site Upolin (Usages politiques de l’identité nationale). Un site qui va retracer l’histoire de cette notion et rappeler son appréciation à l’étranger. Une pétition nationale devrait aussi être initiée. L’objectif recherché est la suppression de l’intitulé de ce ministère de la mention « identité nationale » qui « adossée au terme "immigration" semble très dangereuse », selon l’historien Patrick Weil.
L’actualité du jour a confirmé leur malaise. D’après les décrets d’attribution des compétences publiés vendredi, la CNHI aura comme principale tutelle le ministère décrié. Et ce n’est pas le seul point qui les inquiète. « Fait très grave, le ministère des Affaires étrangères abandonne l’asile au profit du ministère de l’Immigration (dont les contours sont dessinés ici, note du ouaimaître), détaille Patrick Weil. L’Ofpra [Office français de protection des réfugiés et des apatrides] passe donc sous son égide. On n’a jamais vu ça. » Les chercheurs notent que l’unique antériorité d’un tel ministère est le secrétariat d’Etat aux Questions juives, institué sous Vichy.
Sur Upolin, une place de choix sera également consacrée à la sémantique. Le ministre Brice Hortefeux étant accusé d’avancer à peu feutrés, de rester volontairement vague sur le contenu qu’il entend donner à la notion d’« identité nationale ». « Comme cet énoncé repose sur des discours implicites, il est difficile de le combattre », notent les historiens. Avant qu’un anthropologue présent à la réunion rappelle : « On nous accuse d’être alarmiste, mais en Côte-d’Ivoire (*) l’introduction de la notion d’ivoirité a abouti cinq ans plus tard à la guerre civile. »
© Julien Martin, pour Rue89
(*) Lire à ce sujet le dossier sur la « disparition » en Côte d’Ivoire il y a trois ans de notre voisin, le journaliste Guy-André Kieffer, qui habitait le 20e depuis 1980, et dont la pétition de soutien se trouve ICI, note du ouaibemaître.
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