L’allocution télévisée du président Chirac fera-t-elle « pschiiiit » ?
De source généralement bien informée, on apprenait ce matin que le président de la République devait s’adresser dimanche 11 mars, à 20 heures, à la télévision, aux Françaises et aux Français. Une information confirmée sur Europe 1 vers 10h45 à l’émission de Jean-Marc Morandini sur la télévision. Une confirmation est tombée en fin de matinée.
Selon toute vraisemblance, sa déclaration ne sera pas calquée sur cette parodie publiée en novembre 2005 sur le site Le Mague.
Il ne devrait pas non plus annoncer qu’il brigue un troisième mandat, comme annoncé il y a trois jours par l’AFP, dans la mesure où il a commencé à recaser ses fidèles, comme le président de l’Assemblée nationale au Conseil constitutionnel, ou beaucoup plus discrètement fait hier nommer en Conseil des ministres une très proche collaboratrice à l’ONF… tout en la gardant auprès de lui. Parmi les « mesures d’ordre individuel » décidées hier en Conseil des ministres, une autre est passée encore plus discrètement : celle de M. Claude Blanchemaison.
Ce ministre plénipotentiaire hors classe, qui, actuellement, représente la France en Espagne, a été nommé conseiller diplomatique du Gouvernement… à compter du 1er mai 2007 ! En clair : il prend ses fonctions dans l’entre-deux tours de l’élection présidentielle…
Ce même futur conseiller diplomatique ne cache pas son estime pour Mme Simone Veil. Or il se trouve que Mme Simone Veil, maintenant qu’elle n’est plus soumise au devoir de réserve imposé à tous les membres du Conseil constitutionnel, s’apprête à rallier Nicolas Sarkozy. Mme Simone Veil, qui avait pris position en faveur du Traité constitutionnel européen de mai 2005 (ce qui lui avait été reproché du fait de son statut), lâcherait donc François Bayrou, ne lui pardonnant peut-être pas les médiocres résultats des élections européennes de 1989, où la liste conduite par celle qui fut la première femme présidente du Parlement européen était arrivée avant-dernière, n’obtenant pas plus de sièges que celle du Parti communiste français…
Le 23 février, sur RTL, Richard Artz n’avait pas manqué de rappeler que le directeur de campagne de Mme Veil en 1989 était François Bayrou. Si le second sur la liste de 1989, M. Jean-Louis Borloo, emboîte le pas à Mme Veil, celui qui est encore ministre de l’Intérieur aurait avec lui deux soutiens ayant, comme on dit, une « fibre sociale », en sus de Mme Christine Boutin (exclue de l’UDF en 2002), qui a rallié le ministre de l’Intérieur. Voulant « mettre de l’humain » dans le discours sarkozyste, Mme Boutin a même réussi à emmener en janvier M. Sarkozy en prison !
On savait que le ministre-candidat drague les femmes, mais là… Hier, il a même relancé le blogue des femmes de l’UMP, à la veille de la Journée internationale des femmes.
Hier (et c’est exceptionnel), le Conseil constitutionnel (chargé de recueillir les parrainages en vue de l'élection présidentielle) est sorti de sa réserve pour recommander « la plus extrême vigilance » aux préfectures. « Le Conseil constitutionnel indique qu'il lui revient que des maires subiraient des pressions pour remettre leur formulaire de présentation vierge à des tiers, voire pour obtenir un deuxième formulaire s'ils ont déjà adressé le leur au Conseil constitutionnel. (…) il ne peut être remis de deuxième formulaire qu'à titre exceptionnel ». Dans ce cas, les préfectures devront « rendre compte conjointement au Conseil constitutionnel et au bureau des élections du ministère de l'Intérieur », précise le communiqué qui avertit qu’il se tient prêt « à aviser le parquet » en cas de faux en écritures publiques ou usage frauduleux de sceaux.
En garant des institutions, le président de la République devrait mettre un peu d’ordre dans cette campagne qui prend une tournure bizarre. Les rajouts sur le couple Royal-Hollande n’arrangent rien. Ceux sur Nicolas Sarkozy non plus, mais peut-être l’a-t-il cherché en s’empressant de répondre au « Canard », sachant que ce dernier allait, dans son édition d’hier, aussi parler de Mme Royal après s’en être pris à son patrimoine. Ceci a provoqué de la part de l'hebdomadaire satirique un titre de Une bien senti : « Prenons de la hauteur ! »…
La partie de billard à trois bandes n'est sans doute pas terminée. On attend le coup de sifflet de l'arbitre.
M. Sarkozy, à la fois président du parti politique revendiquant le plus grand nombre d’adhérents et organisateur des élections, avait annoncé lundi soir qu’il était prêt à aider MM. Besancenot et Le Pen. Ce matin sur i>Télé, la vice-présidente du Front national, Marine Le Pen, annonçait qu’il manquait 77 signatures à son père (elle avait annoncé hier qu'il en manquait « entre 88 et 90 »). Mais, puisque M. Sarkozy veut aider deux candidats en difficulté, que n’aide-t-il pas aussi une candidate officiellement beaucoup plus proche de lui, Mme Lepage en l’occurrence ? L’ancienne « Juppette » à plein temps, présidente de Cap 21 (qui avait obtenu 1,88 % des suffrages le 21 avril 2002 à la présidentielle), sera ce soir l’invitée du « Soir 3 » présenté par Louis Laforge, qui remplace Marie Drucker pendant la période électorale. M. Sarkozy terminera alors son intervention sur France 2. Puisqu’il souhaite aider M. Besancenot, pourquoi ne dit-il rien pour Mme Laguiller (en difficulté) ou pour M. Bové (incertain également) ? M. Bové est, au sens strict, un « délinquant multirécidiviste », mais pas Mme Laguiller !
Les formulaires de parrainage des futurs candidats doivent parvenir au Conseil constitutionnel au plus tard le 16 mars à 18 heures. L’intervention du président a lieu le dimanche 11 au soir. Il restera un peu moins de cinq jours pour la collecte.
André Léger
Illustrations © Placide
Pour aller plus loin :
Le rappel de la procédure des 500 parrainages sur le site du Conseil constitutionnel (présidé depuis lundi et jusqu’en 2016 par Jean-Louis Debré) est ici.
Le rappel des modes de cohabitation de la création de la Ve République à 2002 sur le site de la Documentation française est là.
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