Au premier paragraphe, on peut lire: "A la suite de la décision du Conseil Constitutionnel, le premier parti d’opposition de France qui a contribué à rassembler il y un an près d’un Français sur deux ne bénéficiera d’aucun remboursement public."
Or l'élection présidentielle n'est -du moins en théorie- pas une question de partis politiques. Le général De Gaulle la qualifiait de "rencontre d'un homme et de son peuple". Certains se sont moqués, en 2007, de François Bayrou reprenant à son compte presque mot pour mot cette expression ("rencontre d'un homme et d'un pays, d'un homme et d'un peuple"). Il ne se moquaient pas lorsque les mots du fondateur de la Ve République sortaient de la bouche de personnalités par la suite ralliées à Nicolas Sarkozy (Dominique de Villepin et Michèle Alliot-Marie, en l'occurrence).
Les fameux "parrainages", si difficiles à obtenir pour les "petits candidats", sont la preuve qu'il ne s'agit pas que d'une affaire de parti, même si un candidat soutenu par un gros parti n'aura aucun mal à réunir ses 500 signatures. Les bulletins de vote portent le nom du candidat (rarement de la candidate), mais pas du parti politique. Et la décision du Conseil constitutionnel contre laquelle s'élève Nicolas Sarkozy le vise personnellement: elle ne vise pas "le premier parti d'opposition de France".
Au deuxième paragraphe, on découvre que: "Un principe nouveau a donc été mis en œuvre : pour un dépassement, que nous avons contesté, de 400 000 euros soit 2.1 % du compte de campagne s’applique une sanction de 100% soit 11 millions d’euros."
Quelle méconnaissance de la part d'un membre de droit du Conseil constitutionnel des décisions rendues par cette instance! Il suffit de cliquer ici pour accéder à tous les contentieux législatifs de 2012 et s'apercevoir que, lorsque les comptes ont été rejetés, c'est pour la totalité, jamais pour la somme mise en cause. Avec parfois une inéligibilité à la clef. Comme le rappelait ce matin le sénateur Richard Yung, l'invalidation de deux députées socialistes en février dernier avait fait nettement moins de bruit.
Par ailleurs, les chiffres avancés par le candidat malchanceux (400.000€, 2,1%, 100%, 11M€) laissent pantois plus d'un individu doté d'un cerveau suffisamment éveillé. D'abord parce que la somme mise en cause dans la décision du Conseil constitutionnel est de 466.118€, soit 2,1% du plafond des dépenses autorisées. Ensuite parce que le candidat Sarkozy a dépensé davantage que le maximum autorisé, selon le Conseil (précisément 22.975.118€ alors que la limite fixée dans cet avertissement était de 22,509M€). Enfin parce que les onze millions dont fait état M. Sarkozy sont la somme qu'il espérait récupérer, à savoir un pourcentage du total des dépenses, si elles ne souffrent pas d'irrégularités.
Au troisième paragraphe, idem: "Toutes les formations politiques ont été remboursées par l’Etat à l’exception de l’UMP."
Non: ce sont des candidates et des candidats qui se présentent, pas des formations politiques. Il n'est pas besoin d'être juriste pour le savoir.
Au quatrième paragraphe, Nicolas Sarkozy fait du passé table rase: "Cette situation inédite sous la Vème République met en péril la formation qui doit préparer l’alternance tellement nécessaire au socialisme."
Erreur! Au moins deux candidats à l'élection présidentielle sous la Ve République ont leur compte de campagne rejeté par le Conseil constitutionnel. En 2002, sur 16 candidats, quinze comptes ont été réformés et un a été rejeté, celui de Bruno Mégret. Les explications du Conseil constitutionnel sont à lire ici. En 1995, c'est Jacques Cheminade qui subissait le rejet de son compte de campagne.
La Ve République n'a pas commencé avec Nicolas Sarkozy, et il faudrait cesser de prendre les électrices et les électeurs pour des andouilles, fussent-elles de qualité supérieure. Quant à la France, elle peut fort bien vivre sans Nicolas Sarkozy.
Fabien Abitbol
Pour les grincheux qui demandent ici ou là qu'on se penche sur les comptes de tel ou tel candidat, il suffit de cliquer sur ce lien pour accéder aux divers comptes des candidats.
Depuis le temps qu'on dit qu'il est mauvais à loi... http://undessinparjour.wordpress.com/2010/01/28/mauvais-a-loi/
Rédigé par : twitter.com/undessinparjour | 05/07/2013 à 17h05
Merci!
Excellent!
Rédigé par : Marie-Françoise Ménard | 06/07/2013 à 02h37
Sarcosi fan tutte
Je vous baise en vous disant les yeux dans les yeux que je vous baise.
http://www.lejournaldepersonne.com/2012/04/sarcosi-fan-tutte/
Rédigé par : lejournaldepersonne | 06/07/2013 à 15h42
Très bien. Il est nettement plus intéressant que l'article du journal Le Monde sur le mêle titre.
Rédigé par : Boutard | 06/07/2013 à 17h25
@Boutard,
Merci. Si c'est de ça http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/07/05/quelques-contre-verites-sur-le-rejet-des-comptes-de-campagne-de-nicolas-sarkozy_3443223_823448.html que vous parlez, je vois que c'est paru pile-poil à la même heure que mon billet.
Mais le paragraphe sur les invalidations Mégret (2002) et Cheminade (1995) n'a été ajouté qu'après coup par la rédaction du Monde, une fois que nous avons eu quelques échanges via Twitter.
Je ne comprenais pas pourquoi ils parlaient de cas supposés qui n'avaient pas eu lieu, et pas de faits avérés.
Rédigé par : Ménilmuche | 06/07/2013 à 17h47
Depuis le 6 mai 2012, en filigrane le message est : NS a perdu, mais finalement on a gagné. Le Hollande bashing qui s'en est suivi a été ravageur. Nous qui avons voté pour FH nous sommes souvent sentis méprisés, reniés... Nous avons voté en conscience et nous ne le regrettons absolument pas, même si beaucoup restent à faire. Tant de choses sont à rectifier... Mais là, j'ai la gerbe, car les sarkolâtres ou sarkophiles font comme si FH n'existait plus. Pensez-vous vraiment que ceux qui ont voté FH vont revoter Sarko sans sourciller avec tout ce que l'on sait ? Je ne sais même pas s'il y aura des élections dans 4 ans ; Y'a quand même une crise économique aux USA, en Chine et au Japon qui se profile et pas des moindres. Alors, où en serons-nous ne serait-ce que dans 1 an ? Alors, le retour du concombre masqué : On n'en veut pas !!! Merci pour cet excellent billet. Une invisible JBL1960
Rédigé par : JBL1960 | 07/07/2013 à 13h30
NS abhorre la vérité. C'est une constante, il faut s'y faire. En revanche à la différence de JBL1960 j'oserai penser la même chose de son successeur. Ce qui fait que s'il fallait les départager dans 4 ans, je me garderais de le faire. Et beaucoup d'autres avec moi.
Rédigé par : babelouest | 08/07/2013 à 05h02