Pierre-Just Marny, qui venait d’avoir soixante-huit ans samedi 6 août, a été retrouvé mort dimanche matin dans sa cellule du Centre pénitentiaire de Ducos (Martinique), a annoncé le directeur de l’établissement. Il était le plus ancien détenu de France, ayant été emprisonné en 1963 puis en 1965, et très brièvement en liberté en 1965…
48 ans derrière les barreaux. Etrange record au “Pays des Droits de l’Homme”, devant celui de Lucien Léger, mort en juillet 2008 après 41 ans de détention, trois ans de liberté, et sans reconnaissance du caractère «inhumain» de sa détention.
Surnommé la Panthère noire en raison de son agilité à échapper aux forces de l’ordre, Pierre-Just Marny avait été condamné en 1969 à la perpétuité par la cour d'assises de la Seine pour un braquage qui avait mal tourné en Martinique.
Alors qu’il recherchait en 1965 ses complices qu’il soupçonnait de l’avoir dénoncé deux ans plus tôt (ce qui lui avait valu une première condamnation pour vol à quatre ans, dont deux avec sursis), il avait tué deux hommes et un bébé (par accident) et blessé quatre autres personnes. Effectuant l’essentiel de sa peine de réclusion «à perpétuité» en France métropolitaine, dont 32 ans dans une unité psychiatrique à Montfavet (Vaucluse), il passait dans une prison “normale” en mars 2007, puis était transféré en Martinique en mai 2008.
Une demande de grâce présidentielle avait été déposée par ses avocats actuels, dont la réponse n’était pas connue lors de son anniversaire. En juin 2010, il avait bénéficié d’une permission de sortie de… six heures. Une “faveur” qui lui avait été refusée en mars 2011 par le juge d’application des peines.
Il refusait de retourner en France métropolitaine pour se faire examiner, selon OrangeNews. Pourtant, la libération à laquelle il pouvait prétendre devait, de par la loi du 25 février 2008 sur la rétention de sûreté, l'envoyer une nouvelle fois devant le Centre National d'Observation (CNO) de Fresnes, où il s'était déjà rendu en 2007 afin de passer de la détention psychiatrique à la détention ordinaire.
«Aucun autre condamné n’a eu à subir la même sévérité, ce qui a pu donner le sentiment à la communauté antillaise, dont ce Martiniquais était issu, qu’il avait même trop payé», relève dans un communiqué Claudy Siar, délégué interministériel pour l’égalité des chances des Français d’Outre-mer, qui pécise qu'il s'était «saisi de ce dossier dès son entrée en fonction», le 1er avril dernier.
Fabien Abitbol
A lire : l’Affaire Marny dans le contexte des années soixante, sur le site du PKLS (Parti communiste pour l’Indépendance et le socialisme)
• Mise à jour de 20h00: ajout de la réaction de Claudy Siar
Reprise dans LaVigie de Rue89 le 7 août à 19h10
J'avais entendu parler de cette affaire. Je suis aujourd'hui très choquée et triste de cette nouvelle. Que sommes nous devenus? La France est inhumaine. Il ne peut y avoir aujourd'hui d'empathie qu'avec les victimes. Les prisonniers n'ont droit à aucune réhabilition. Ca me choque. N'est ce pas le rétablissement de la peine de mort? A mon avis, oui. Il est juste que les actes soient jugés et condamnés mais sachant la façon dont nous traitons les prisonniers, je suis totalement opposée à cette forme de peine qui n'a que peu d'utilité et lorsque je passe devant une prison, j'ai de la peine en pensant à ce que les gens y subissent. J'ai honte de ne pas me battre pour fermer les prisons. Je connais aussi l'hôpital psychiatrique de Montfavet pour des raisons familiales. No comment! J'ai de la peine pour M. Marny et son entourage. Paix à son âme. Quelle justice, quels soins psychatriques et au-delà quelle société fabriquons nous? Ne nous laissons pas avoir par des gens cyniques qui voudraient que les pauvres se battent entre eux pour que les riches soient tranquilles. A tous, je conseille un très beau film qui sortira en novembre 2011 (j'ai eu la chance de le voir en avant première au cinéma): "Les neiges du Kilimandjaro" de Robert Guediguian.
Rédigé par : Pascale KALFA | 07/08/2011 à 20h51