Treize documents « secret-défense » relatifs à l'existence d'un compte bancaire secret détenu par Jacques Chirac au Japon au milieu des années 1990 seront remis à un juge de Tahiti, apprend-on au cabinet du ministre de la Défense, Hervé Morin.
—————
Jacques Chirac a démenti avoir jamais détenu un compte au Japon, ce qui en soi n'est pas un délit
photo : Philippe Wojazer (Reuters-Archives)
—————
Ces documents avaient été saisis lors d'une perquisition du juge de Papeete Jean-François Redonnet en juin dernier au siège de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE, les services secrets).
La Commission consultative du secret de la défense nationale (CCSDN) avait donné un avis favorable à la déclassification totale de 11 documents et partielle de deux documents, dit-on au cabinet d'Hervé Morin. « Le ministre a suivi cet avis la semaine dernière [le 22 décembre, note du ouaibemaitre] et ordonné la déclassification », ajoute-t-on.
Hervé Morin a également suivi l'avis de la commission en refusant la remise d'une autre série de 13 autres documents, précise-t-on. Il avait déjà ordonné en octobre la remise au juge d'une première série de 16 documents de la DGSE.
Le juge Redonnet est chargé de l'enquête sur la disparition en 1997 d'un journaliste, Jean-Pascal Couraud, hostile à Gaston Flosse, l'ex-président et homme fort de la Polynésie française dans les années 1980 et 1990.
—————
Jean-Pascal Couraud, connu sous le nom de plume de JPK, a disparu à la mi-décembre 1997, à l'âge de trente-sept ans. Ses derniers travaux portaient sur un compte japonais, attribué à Jacques Chirac, alimenté depuis la Polynésie. Son fils a présentement vingt-et-un ans
photo : DR
—————
Le magistrat examine l'hypothèse soutenue par sa famille selon laquelle il a été assassiné parce qu'il avait découvert des liens financiers entre le supposé compte japonais de Jacques Chirac et Gaston Flosse.
Le juge a aussi perquisitionné fin septembre chez Gaston Flosse, où a été découverte, ont dit lundi les avocats de la famille Couraud, une lettre non datée et non signée racontant que le journaliste aurait été enlevé, torturé puis jeté à l'océan par des membres du GIP (Groupement d'intervention de la présidence) créé par Gaston Flosse.
Les avocats imputent cette lettre à un ancien membre du GIP Vetea Cadousteau, retrouvé mort en janvier 2004, dans une vallée de Tahiti. Gaston Flosse a confirmé à Reuters avoir reçu « une lettre anonyme relatant de prétendues révélations sur cette affaire ». « Il n'y a aucune conclusion hâtive à tirer de ce document », a dit le sénateur ex-UMP.
« Ces affirmations semblent tellement dérisoires à l'autorité judiciaire qu'elle n'a jamais convoqué Gaston Flosse », a ajouté son avocat sur les ondes de RFO.
Aucun élément incontestable n'étaye l'hypothèse criminelle et encore moins la piste politique. Jacques Chirac nie l'existence de tout compte bancaire au Japon et a refusé de commenter l'affaire.
Le soupçon sur l'existence d'un compte secret qu'il aurait détenu au Japon est né d'une déposition en mars 2006 du général Philippe Rondot, spécialiste du renseignement. Il avait alors dit que le compte Chirac existait à la Tokyo Sowa Bank et était crédité de 300 millions de francs vers 1996. Il est ensuite revenu sur ces propos dans les médias et devant le juge Redonnet.
Thierry Lévêque, avec Daniel Pardon à Tahiti, pour Reuters
⇒ La dépêche de l’AFP
⇒ Une lettre remet en question la disparition trouble d’un journaliste
⇒ Le communiqué de Gaston Flosse
⇒ Pour voir (ou revoir) Mort sous les tropiques, Pièces à conviction N°68 (France 3, 20 juin 2008), cliquer ici (durée 100 minutes)
Commentaires