« Ça me rappelle la guerre », lance un papy, en passant hier matin devant la longue file d'attente qui s'étirait place de la Bastille (11e). Une armée de clients en imperméable a patienté près d'une heure avant de pouvoir acheter fruits et légumes, lors d'une gigantesque vente « sauvage » organisée par une quarantaine de producteurs en colère, qui a fait le déplacement depuis le Sud-Ouest.
A 2 € le melon, 1,50 € le kilo de tomates, de pommes ou de poires, les produits n'étaient pas vraiment moins chers que sur le marché officiel de la Bastille (anciennement marché Richard-Lenoir, note du ouaibemaître). Mais leurs prix étaient généralement inférieurs à ceux pratiqués par la grande distribution. « Je suis là pour qu'il continue à y avoir des agriculteurs en France », témoigne Raymonde, retraitée, venue de Colombes (Hauts-de-Seine) remplir son panier. La discussion s'engage avec Claude Griso, maraîcher dans le Lot-et-Garonne. « Là, je vends mes salades 70 cents, c'est le juste prix car j'en garde 35, ce qu'il me faut pour faire vivre mon exploitation, explique-t-il. Le problème, c'est que les intermédiaires de la grande distribution me les achètent depuis des mois à 15 cents, et je ne vais pas pouvoir continuer longtemps à ce rythme-là. » Le producteur commercialise 10 % de sa production « à la ferme », ce qui lui permet de limiter son déficit. « Nous ne voulons pas remettre en cause l'existence des grandes surfaces mais seulement limiter leurs marges », précise-t-il. « La grande distribution nous vole tous, producteurs comme consommateurs », surenchérit Raymond Girardi, président départemental du Modef, qui réclame une « table ronde » en vue d'imposer un contrôle de ces marges.
Le Modef, syndicat d'agriculteurs proche du PCF, avait amené hier matin 60 tonnes de fruits et légumes, qui se sont écoulés sur une trentaine de points de vente en Ile-de-France.
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