…et tentative au Canard Enchaîné
Un juge a tenté vendredi matin d’effectuer une perquisition au siège de l'hebdomadaire satirique Le Canard Enchaîné et un autre magistrat a effectué une perquisition au cabinet de Me Herzog, l' avocat de Nicolas Sarkozy, dans le cadre de l'enquête sur les violations du secret de l'instruction dans l'affaire Clearstream. Me Thierry Herzog parle de « tentative de déstabilisation » du futur président de la République alors que, semble-t-il, les magistrats enquêtaient sur la partie concernant le présumé compte bancaire japonais de l’actuel président.
Les deux magistrats, Thomas Cassuto et Françoise Desset sont saisis d'une information judiciaire contre X, ouverte à la demande du garde des Sceaux Pascal Clément, à la suite de la publication de plusieurs articles, du 14 avril au 12 mai 2006, dans différents journaux.
L'affaire politico-judiciaire Clearstream a fait l'objet de nombreux articles reprenant intégralement ou partiellement des pièces du dossier d'instruction. Parmi lesquelles les « notes » du général Philippe Rondot (qui s’était entre autres, selon Jean-Paul Ney, illustré dans l’arrestation de Carlos et dans les prises d’otages en Irak), important témoin dans cette affaire, où Nicolas Sarkozy est partie civile.
Pas de clef, pas de serrurier
Thomas Cassuto s'est rendu au Canard Enchaîné, vers 9h30, mais les journalistes de l'hebdomadaire ont refusé de lui donner les clés permettant d'ouvrir la salle de rédaction, prétextant les avoir égarées suite aux troubles liés à l’élection présidentielle. Le magistrat est reparti bredouille avant l’heure du déjeuner, invoquant l'absence d'un serrurier.
« C'est une perquisition que nous considérons comme totalement illégale par rapport à la convention européenne des droits de l'Homme qui proscrit toute perquisition dans une entreprise de presse », a déclaré à l'AFP Louis-Marie Horeau, journaliste à l’hebdomadadire satirique du mercredi.
Le rédacteur en chef du Canard, Claude Angeli a affirmé à la presse que le juge cherchait « un document Rondot » sur de présumés « comptes japonais » de Jacques Chirac mais le juge n'a pas précisé l'objet exact de sa visite.
Le document évoqué par Claude Angeli avait été publié par le journal en mai 2006. L'information judiciaire dont sont saisis les juges Cassuto et Desset ne semble pourtant pas viser les présumés comptes japonais de l’actuel chef de l'Etat. Et, pour l’instant, aucune information judiciaire n'a été ouverte sur un compte japonais ouvert en 1996 dans la banque d’un ami de M. Chirac sous le nom de « Jambage », banque dont la faillite a été prononcée en 2001.
Une « tentative de déstabilisation »
Parallèlement, l'autre juge chargée de cette enquête, Françoise Desset, accompagnée d'un expert, s'est rendue au cabinet de Me Thierry Herzog, avocat de Nicolas Sarkozy, aux fins de vérifier des paramètres techniques, a indiqué Me Herzog à l'AFP.
Selon lui, elle est restée une vingtaine de minutes dans le cabinet pour étudier le temps de transmission du fax d'un interrogatoire du militaire retraité depuis décembre 2005, datant du 28 mars 2006, par le fax de l'avocat. La magistrate a « constaté que les documents n'avaient pas pu être envoyés depuis cette machine », a-t-il précisé, estimant que l'on cherchait à « déstabiliser » le président élu. Me Thierry Herzog a en outre affirmé à l’agence Reuters avoir eu copie de l’interrogatoire du général Rondot « en juin » (2006), alors que le Canard en a parlé en mai…
Plusieurs journalistes du Canard enchaîné, de Libération, du Monde, du Parisien et du Nouvel observateur avaient été entendus le 14 décembre dernier comme témoins dans le cadre de cette « affaire dans l'affaire » Clearstream.
En France, la loi prévoit à travers l'article 11 du Code de procédure pénale que « la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète ». Mais ces dispositions ne s'appliquent pas aux journalistes (ils ne font pas partie de la profession judiciaire), qui peuvent toutefois être poursuivis pour « recel de violation du secret de l'instruction » lorsqu'ils détiennent des pièces issues des dossiers.
Il n’y a pas que le prix, les mauvaises explications sur son voyage à Malte ou les relations entre le groupe Bolloré et l’Etat qui font des vagues…
André Léger, avec agences
Dessin de Placide
Photo de Claude Angeli : © AFP
A lire :
• Le Figaro du 11 mai : L’avocat de Nicolas Sarkozy évoque une tentative de « déstabilisation »
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