Depuis hier, les bénéficiaires du RMI et leur famille ne payent plus les transports en Ile-de-France. Au delà des 375 000 personnes concernées, cette initiative pose la question de l'accès aux transports, notamment pour les salariés à faibles revenus.
ALLER chez le médecin à l'autre bout de Paris, arriver à l'heure à un entretien, passer voir sa mère ou sa sœur en banlieue : depuis hier, le coût des transports en commun n'est plus un obstacle pour les 229 000 érémistes franciliens, leurs conjoints et leurs enfants.
Pourquoi une telle mesure en Ile-de-France ?
C'est le prolongement d'un premier dispositif lancé par la région le 1er octobre et qui accorde une réduction de 75 % sur le prix des transports à un million de franciliens en situation précaire. « Ce que nous venons de donner aux érémistes, explique Jean-Paul Huchon, président socialiste de la région et du Stif (Syndicat des transports d'Ile-de-France), ce n'est pas de l'assistance. C'est un droit à la mobilité pour les personnes qui ne pouvaient pas se payer les transports. C'est aussi un droit au retour à l'emploi ».
Pourquoi prendre cette décision maintenant ?
A un mois de la présidentielle, cette mesure peut paraître un brin opportuniste. Serge Méry, vice-président PS de la région, réfute cette analyse. « Ségolène Royal ne nous a rien demandé ! Il fallait tout simplement du temps pour mettre en place ce dispositif dont nous avions parlé dès les régionales de 2004. Nous ne pouvions pas aller plus vite. »
Pourquoi la limiter aux bénéficiaires du RMI ?
Pour des raisons évidentes de financement. La gratuité pour les érémistes devrait déjà coûter 87 millions d'euros à la région. Problème : cette nouveauté ne donne aucun avantage aux chômeurs ou aux smicards. Dominique Voynet, candidate des Verts à la présidentielle, souhaite qu'elle concerne aussi « les demandeurs d'emploi et tous les minima sociaux ». Xavier Emmanuelli, fondateur du Samu social, est sur la même ligne : « C'est une bonne mesure qui devrait être ouverte à tous ceux qui cherchent du travail ». Martin Hirsch, le président d'Emmaüs, juge, lui, « dangereux et improductif » de « lier une prestation sociale à un statut d'inactivité ». Le risque, pointé par certains : que le fossé se creuse un peu plus encore entre les personnes sans emploi qui bénéficient d'aides et les salariés à faibles revenus. « L'élargissement de la gratuité aux travailleurs pauvres me paraît cohérent », insiste Olivier Berthe, le président des Restos du Cœur.
Pourquoi pas une gratuité totale ?
C'est la proposition des leaders d'extrême gauche, à l'image d'Olivier Besancenot, candidat LCR, qui a prôné hier à Alfortville (Val-de-Marne) la « gratuité des transports collectifs pour tous et pas seulement pour les érémistes ». En province, quelques villes moyennes ont choisi cette voie. C'est le cas de Compiègne (Oise, UMP), où l'on met en avant des améliorations en matière de sécurité. Car la gratuité totale des transports, c'est aussi la fin des tickets et des contrôleurs, donc la fin de la fraude et des tensions comme celles qu'on a pu connaître à la gare du nord. Autre effet de la gratuité : le succès des transports en commun en libre accès. A Gap (Hautes-Alpes, UMP), leur fréquentation a fait un bond de 20 % en un an et à Compiègne, ils transportent près de cinq millions de passagers, un record pour une ville moyenne. Dans les mêmes conditions, on imagine aisément la fréquentation d'un métro entièrement gratuit à Paris, aux heures de pointe...
Denis Carreaux avec M.A.G, C.M, V.Md, E.H.
Dessin © Ranson
(Le Parisien, dimanche 01 avril 2007)
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