Ce matin, Joseph Tual, un journaliste reporter d’images (JRI) de la rédaction nationale de France 3 est, pour la deuxième fois, convoqué à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne (BRDP, une branche de la sous-direction des Affaires économiques et financières), rue du Château-des-rentiers, dans le 13e arrondissement, à 9h. Des syndicats du service public appellent à la grève en signe de solidarité. Les trois autres personnes qui avaient été convoquées comme lui le 1er avril ne sont cette fois-ci pas inquiétées.
Depuis
le 25 juin, puis par un relais sur son site le lendemain, le Syndicat national des Journalistes (SNJ) de France télévisions appelle à cesser le travail ce jeudi 2 juillet de 9h
à 13h « pour accompagner Joseph Tual à sa convocation ». Dans la
foulée, et deux syndicats CGT de France 3 (le SNRT-CGT, pour les techniciens, le
SNJ-CGT, pour les journalistes) avaient déposé un préavis de grève pour ce 2 juillet,
également de 9h00 à 13h00, appelant également « les salariés du siège et
de la rédaction nationale » à accompagner leur collègue.
Né
en 1961 en Bretagne, Joseph Tual est grand reporter à la rédaction nationale de
France 3, station où il est entré en 1987. Nicolas, j’irai à ta convoc’, lance-t-il à l’adresse du chef de l’Etat dans une
tribune publiée le 30 juin sur Rue89.com, où il énumère certains de ses faits
d’armes et dédouane les policiers qui lui ont adressé la convocation à laquelle
il s’apprête à répondre (« Les policiers, eux, ma foi, ne font que leur
boulot. Ils ne sont en rien responsables de cette situation qu'eux-mêmes
qualifient d'ubuesque »).
En
dehors du quotidien parfois mouvementé d’un JRI, Joseph Tual suit certains
dossiers internationaux embarrassants, au rang desquels la disparition de notre
voisin le journaliste Guy-André Kieffer le 16 avril 2004 à Abidjan (qui fait l’objet d’une rubrique sur ce blogue), ou l’affaire Ben Barka. Pour ce deuxième cas, dans sa tribune, le JRI de France 3
rappelle : « L'affaire Ben Barka, que je connais bien, a visiblement du mal
à passer chez toi. Je n'aurais peut-être pas dû informer le public de France 3
que le juge en charge du dossier avait signé cinq mandats d'arrêts
internationaux contre d'éminents représentants de la haute hiérarchie
sécuritaire marocaine » ; Nicolas Sarkozy se trouvait en effet en voyage
d’Etat au Maroc en octobre 2007 lorsque le juge d’instruction Patrick Ramaël
(également en charge de l’affaire Kieffer) avait délivré ces mandats d’arrêt.
C’est aussi Joseph Tual qui, pour l’affaire Kieffer, avait obtenu le premier témoignage de Berte Seydou.
Joseph
Tual fait partie des quatre journalistes déjà entendus par la police à la suite
d'une plainte contre X de la direction de France 3 concernant la diffusion sur
Internet de propos tenus hors antenne par Nicolas Sarkozy sur un plateau de
France 3.
La chaîne avait porté plainte pour « vol, recel et
contrefaçon » à la suite de la diffusion sur Rue89.com de cette vidéo du président (durée : 7min30, déjà vue environ 2,5 millions de fois) juste avant son intervention
dans le journal télévisé de France 3 du 30 juin 2008.
Il avait fallu attendre
le 1er avril 2009 pour que soient convoqués à la police quatre
journalistes (deux de France 3 et deux de Rue89). Tous quatre étaient ressortis
libres, dénonçant une manœuvre d'« intimidation » pour révéler leurs sources.
« Nicolas, je suis
désolé de te le dire, je ne suis ni un voleur ni un receleur, ni un
contrefacteur. La présidence de France Télévisions le sait très bien, puisque
leurs enquêteurs internes ne m'ont même pas auditionné », précise Joseph
Tual qui rappelle à son lecteur « Tu auras retenu la leçon que passer à la
télé, ça n'a pas que des avantages. Mais ne t'inquiète pas, je te fais
confiance, tu trouveras bien autre chose pour me punir » et précise le
motif de ce tutoiement : « Ah, j'oubliais, si je te tutoie, c'est que
tu as commencé il y a bien longtemps au siège du RPR, rue de Lille, et encore
en 2007 dans une cabine de maquillage de France 3. Allez, au revoir Nicolas, je
tâcherai de t'envoyer des news de temps en temps ».
Aujourd’hui,
Joseph Tual est le seul a être convoqué pour la deuxième fois. Les autres
personnes qui avaient été convoquées en avril sont Carine
Azzopardi (France3), Augustin Scalbert (Rue89) et Pierre Haski (Rue89, qui
avait été interrogé l’après-midi).
Fabien Abitbol, illustration : détournement de la carte de presse de Joseph Tual, illustr. envoyée par l’intéressé
Brigade de répression de la délinquance contre la personne, 122, rue du Château-des-Rentiers (13e), 9h, métro Olympiades, bus 64 (direct depuis la place Gambetta, descendre à Patay-Tolbiac)
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