Etonnante histoire que celle racontée par la conseillère de Paris Danielle Simonnet sur son blogue, au détour de son appel à manifester le 18 mars de Nation à Bastille.
Lors du meeting des trois candidats du Front de gauche aux législatives dans le 20e arrondissement, dont elle est l’une des élues, Danielle Simonnet avait fait allusion, le 7 mars dernier, à une femme qui, voulant se marier à un étranger, avait eu “droit” à des interrogatoires séparés.
Frédérique, cette habitante de l’arrondissement (dont la Secrétaire nationale du Front de Gauche est élue) s’était rendue avec son compagnon au service d'Etat civil de la Mairie du 20e pour déposer son dossier de mariage. On lui a alors expliqué que le couple ferait l'objet d'une double audition «en raison des trop nombreux mariages mixtes dans le 20ème arrondissement». Lors de son audition séparée de son conjoint, l'officier d'Etat civil lui a signalé que «son compagnon n'avait sans doute d'autres intentions que de se faire régulariser».
Suspicion. «Les questions se font intimes sur les circonstances de la rencontre du couple et s'accompagnent de jugement de valeur.», écrit Danielle Simonnet. «A l'issue de cette double audition, le couple apprend qu'il va faire l'objet d'une saisine du Procureur de la République. Ils seront par la suite convoqués au commissariat de Police pour de nouvelles auditions. Un officier ira jusqu'à leur domicile pour constater qu'ils y vivent bien ensemble… Après toutes ces humiliations, l'attente et surtout la peur, le couple ne reçoit toujours aucun courrier ni de la mairie du 20ème ni du Procureur de la République.»
Puis la femme prend contact avec l'association Les amoureux au ban public et envoie son témoignage par courrier à Danielle Simonnet, lui expliquant que, à échéance du délai donné au procureur (deux mois, finissant le 5 mars) elle était retournée à l’Etat civil pour apprendre… qu’un courrier du Procureur en date du 7 février autorisait le mariage et que les bans avaient déjà été publiés, sans même qu’elle ait été prévenue.
Outre une interpellation —restée sans suite— du conseil d’arrondissement, l’élue Front de Gauche va faire présenter un vœu au Conseil de Paris en début de semaine.
Danielle Simonnet rappelle que la loi n° 2006-1376 du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité d’un mariage «reconnaît que toute personne doit pouvoir se marier, sans que son union soit subordonnée à la régularité de son séjour sur le territoire français».
Sauf que, en juin 2010, une circulaire, a priori destinée à rester confidentielle, a prévu des auditions séparées des futurs époux, afin de lutter contre les mariages blancs. C’est bourré de questions bêtes et de questions indiscrètes, et c’est à télécharger ici: Téléchargement Mariage-0910_2010-06-22
Il est surprenant que dans un arrondissement où les trente-neuf élus se revendiquent tous de la gauche, tous les partis de droite ayant été éliminés au premier tour des municipales de 2008, et qui se targue d'abriter une centaine de nationalités différentes, la suspicion de mariage blanc prévale sur la bonne foi.
F. A., ill: extrait de la circulaire Alliot-Marie de juin 2010
A lire: A la Bastille…, par Danielle Simonnet, d’où cette histoire est extraite
La gangrène gagne partout, à force de banaliser les discours de suspicion, d'appel à la haine et de peur, on perd en humanité.
Rédigé par : Freezfee | 17/03/2012 à 17h45
Quand on remarque les contorsions des élus PS à la Chambre ou au Sénat, en de multiples occasions, ce genre d'incident (!) s'éclaire. Entre le PS et la Droite, que reste-t-il comme différences désormais dans les faits ? Rien.
C'est pourquoi demain j'irai défiler demain avec le front de gauche, pour qu'enfin cela change. Vraiment.
Rédigé par : Achar | 17/03/2012 à 18h02
qu'est ce que vous appelez des questions "bêtes" ?...le prénom de la belle-mère ? le nom de famille du grand'père ? ça me parait normal...
par contre, si c'est à l'appréciation du gars qui interroge, c'est la porte ouverte à toutes les fenêtres...
j'ai été mariée à un étranger et déjà à l'époque (1993), on nous posait des questions "indiscrètes"...on (la police) nous avait même prévenu qu'on viendrait vérifier chez nous si il y avait bien 2 brosses à dents et des vêtements appartenant aux 2 dans les placards...
si certains n'avaient pas abusé du système, on n'en serait pas là...
(aïe ! pas sur la tête)
Rédigé par : miss P | 18/03/2012 à 00h16
Sur les habitudes de l'autre, sa famille, comment on s'est rencontré. Des demandes d photos, etc. Suffit de feuilleter la circulaire, je l'ai mise exprès à disposition.
Rédigé par : Ménilmuche | 18/03/2012 à 01h10
ben justement, je l'ai lue !!
je ne vois pas en quoi c'est absurde de dire comment on s'est rencontré...mais bon, quand on veut démontrer un truc...
Rédigé par : miss P | 18/03/2012 à 01h41
Un questionnaire si intrusif, qui n'est que facultatif, n'est pas chose courante dans cet arrondissement si atypique.
Par ailleurs, alors que le procureur s'est manifesté avec célérité pour approuver le mariage, les services municipaux n'ont pas avisé la demanderesse.
Il y a donc à mon sens double faute: la première morale et la seconde matérielle.
C'est un tout, ce n'est pas QUE l'application d'une circulaire très contestable et qui n'est qu'une circulaire, ayant donc moins de valeur que la loi de 2006 sur le mariage prise lorsque Nicolas Sarkozy était à l'Interieur, que je soulève ici!
Rédigé par : Ménilmuche | 18/03/2012 à 02h38
Tu as une sensibilité à fleur de peau sur ces questions. Mais tu ne peux nier qu'il existe une vraie délinquance de fraude au mariage. Si tu voyais l'un de tes proches fragile et isolé, se faire mettre le grapin de dessus par un ou une candidate au mariage "gris", tu aurais une autre vision. L'exercice des pouvoirs de police administrative ou judiciaire comportent une atteinte légale aux libertés publiques, dans l'intérêt général et des victimes potentielles en particulier. Le tout est une question de proportion, tu le sais bien. Ce genre d'enquête ne me choque pas.
Rédigé par : Apolline | 18/03/2012 à 10h36
Je pense toujours à corriger mes fautes après avoir cliqué, désolée.
- Il y a un de, de trop, avant dessus
- un "ent" de trop" au verbe qui suit "l'exercice" ...
Pardon pour les autres que je n'ai pas mémorisées.
Rédigé par : Apolline | 18/03/2012 à 10h38
Et aussi, je te relis toi : "un questionnaire si intrusif, dans cet arrondissement" ...
Dans l'arondissement, le Maire, comme tous les autres, n'est que le représentant de l'Etat en matière d'Etat Civil et il agit sous le contrôle du Procureur de la République. Donc, il DOIT suivre les instructions données par la circulaire.
Rédigé par : Apolline | 18/03/2012 à 10h40
bonjour
ici Marc WLUCZKA, adjoint au maire du 20e (PS)
Je pense que certains commentaires polémiques méritent une mise au point pour les lecteurs.
Le service de l'Etat Civil ne fonctionne pas sous l'autorité des élus. Il a des textes de lois et de règlement à appliquer et n'a aucune latitude pour le faire ou pas. La seule chose que les élus sont en mesure de faire, c'est de demander que la procédure de signalement des cas "suspects" ne soit pas trop zélée. Mais d'abord, si un employé veut faire du zèle, il n'y a aucun moyen de l'empêcher d'appliquer la Loi (bonne ou mauvaise) et ensuite, les interrogatoires et enquêtes sont menées par la Police, qui ne prend pas ses ordres à la mairie d'arrondissement.
Je pense donc qu'il est déplacé et inutilement polémique d'instrumentaliser cette situation pour faire le procès en sorcellerie du PS !
Sur le fait qu'on ait publié les bans sans avertir la personne, il est certain qu'il y a eu un dysfonctionnement. Est-ce bien un problème politique ? J'en doute. Est ce une de ces bévues qui arrivent de temps en temps, même dans les meilleurs services ? Je laisse à chacun le choix de répondre.
Maintenant, avant de partir en vrille sur ce sujet, je demande à chacun d'avoir à l'esprit qu'il y a bel et bien des mariages blancs (j'en parle en connaissance de cause) et que ce sont les pressions exercées par le gouvernement à l'encontre des immigrés qui en sont la cause. Les mariages blancs sont un symptôme et non LE problème, ne faisons pas du sarkozysme paradoxal.
Ensuite, il existe aussi bel et bien des mariages sous la contrainte, et cette contrainte, dans les cas que j'ai connu l'a toujours été à l'encontre de jeunes femmes. Ce n'est pas le lieu de faire du Zola, mais les conséquences physiques, psychologiques et sociales sont au delà de ce qu'on peut imaginer.
Et enfin, il y a aussi des bonnes fois qui sont surprises et des personnes qui réalisent au dernier moment qu'elles sont tombées dans des pièges ou des arnaques aux sentiments. Pour ma part j'ai connu, ici dans le 20e, UN cas, pas deux, pas trois, UN, comme pour Fessenheim ;-). La aussi, la pression anti-immigrés est le fond du problème. Que fallait-il face à la détresse d'une femme qui deux heures avant son mariage me demandait d'agir mais avait peur de le faire elle-même ? J'ai fait ce qu'il fallait et je le referai si c'était nécessaire.
Pour finir, rappelons nous que c'est toujours le choix des personnes face à une situation qui les dépasse et dans laquelle ils se sentent piégés de lutter solidairement ou de trouver des solutions individuelles, pas forcément légales, parfois violentes, parfois révoltantes. Cela nous met, nous la Gauche, face à nos contradictions et à nos approximations et à nos insuffisances qui ne sont pas la propriété du seul PS. Ce serait trop facile.
Mais, trouver ensemble, demain, des solutions politiques de fond ne passe en aucun cas par la polémique et l'amalgame. C'est une impasse. Je souhaite à tous les camarades et amis qui vont aller applaudir Mélanchon une bonne après midi, un bon score le 22 avril, et que fassions la fête le 6 mai !
Merci de votre attention.
Marc WLUCZKA
Rédigé par : Marc WLUCZKA | 18/03/2012 à 12h07
@Apolline,
le contexte de l'arrondissement où je réside depuis vingt ans, où Le Pen (père) fut élu en 1983
http://menilmontant.typepad.fr/mon_weblog/2011/01/fin-de-partie-pour-jean-marie-le-pen.html
et où, je le rappelle, plus aucun élu de droite ne siège depuis 2008, fait que cette situation me choque.
Marc Wluczka, élu PS de l'arrondissement, a beau rappeler que "le service de l'Etat civil ne fonctionne pas sous l'autorité des élus", la circulaire de MAM que tu as en téléchargement, et dont j'ai mis un extrait en format image, précise bien que cet examen de situation se fait si la situation «révèle un défaut d'intention matrimoniale sévère», et que les "actions" sont «préventives ou a posteriori».
Toute latitude est donc laissée au fonctionnaire de l'Etat civil qui, il me semble, a un peu abusé dans ce cas, compte-tenu -je me répète- de la situation dans l'arrondissement. Car les exemples sont nombreux en France, et je n'ai pas pour habitude d'en parler, du moins pas tant en détails.
@Marc,
merci de ton passage, et de reconnaître qu'il y a eu «dysfonctionnement» dans la publication sans aviser l'intéressée. Il est si rare que le Procureur prenne une décision avec tant de diligence, surtout favorable, que cela -ajouté au reste- m'a choqué, d'où le titre.
Je n'ai pas trop compris pourquoi la question n'avait pas été débattue en Conseil d'arrondissement. Mais bon: tu n'es pas maire, et elle le sera en Conseil de Paris, sans Danielle.
Rédigé par : Ménilmuche | 18/03/2012 à 15h24