La caisse primaire d’assurance-maladie (CPAM) de Paris vient d’assigner l’un de ses assurés devant les tribunaux au motif que ce dernier était dépourvu de papiers en règle.
S’appuyant sur ce constat, la CPAM lui réclame le remboursement de « prestations en nature d’un montant de 475,92 euros ». Seulement voilà : durant ses sept années de présence sur le sol français, Abdul, le ressortissant mauritanien incriminé, a toujours payé rubis sur l’ongle ses cotisations maladie.
Abdul est arrivé en France en mars 2001. Depuis lors, il travaille sans discontinuer et multiplie les contrats d’intérim. Il satisfait son agence d’intérim au point que cette dernière l’en félicite par écrit. Il paye des impôts et cotise donc à la Sécurité sociale. Pour pouvoir résider et travailler en France - et accessoirement ne pas retourner en Mauritanie - Abdul reconnaît avoir produit de faux papiers. Logiquement, et malgré l’insistance de l’agence d’intérim qui produit une promesse de « mission d’intérim de très longue durée » afin d’obtenir sa régularisation, la préfecture de l’Essonne lui signifie, par un courrier daté du 6 février 2008, qu’il tombe sous le coup d’un arrêté de reconduite à la frontière et l’invite à « quitter le territoire français par (ses) propres moyens ».
L’action menée par la CPAM révolte l’association Sos soutien aux sans-papiers qui suit le dossier d’Abdul. « Mais ce qui n’est pas mentionné dans cette procédure pénale crapuleuse, c’est bien le montant touché par la CPAM pendant sept années, s’étrangle Solange Odiot, militante de l’association. Ils ont bel et bien encaissé ses cotisations comme celles de milliers de travailleurs sans papiers. Alors un remboursement, pourquoi pas, mais ce sera remboursement contre remboursement ! » La CPAM de Paris se défend : « On a droit à la Sécu si on est en règle. Dans le cas contraire, il existe l’aide médicale d’Etat, il suffit d’en faire la demande. » Mais elle concède, sans rire : « Ce ne serait pas illogique que l’assuré réclame le remboursement de ses cotisations. » Ce qui signifierait que les travailleurs sans papiers sous le coup d’un arrêté de reconduite à la frontière pourraient réclamer le remboursement de leurs cotisations Sécu. Une paille.
Mourad Guichard, pour Libération (26 août)
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