Elle a devancé largement Michel Charzat, maire du 20e
Ambiance de liesse, dimanche soir, à la mairie du 20e, dans les rangs de la gauche, sauf pour le maire du 20e, député sortant (et sorti de fait) de la 21e circonscription (20e arrondissement, sauf les quartiers du Bas Belleville et du Bas Ménilmontant). Si le candidat UMP Raoul Delamare est arrivé en tête avec 27,88 % des suffrages exprimés (40 % d’abstention, tout juste dans la moyenne nationale), ce n’est qu’avec 17 voix d’avance sur sa rivale du PS George Pau Langevin… qui est sortie grande gagnante du duel entre socialistes, Michel Charzat (exclu du parti) n’ayant obtenu que 14,14 % des suffrages. Seuls les deux avocats sont donc en lice pour le second tour, aucun des douze autres candidats n’ayant obtenu la barre des 12,5 % d’électeurs inscrits pour se maintenir.
Le scrutin sur la 21e circonscription s’annonçait délicat. Désignée par la rue de Solférino et non élue par les militants, Mme Pau Langevin partait avec un handicap. Certains la considéraient comme une « parachutée » ou une femme n’ayant aucun ancrage local (elle réside dans le 20e depuis plus de 20 ans, même si ce n’est pas dans la 21e circonscription qu’elle connaît fort bien, mais sur un trottoir de la 6e…).
Objet de diverses attaques, tant de la part de certains militants socialistes que d’une officine proche du Front national (à laquelle elle avait rapidement et sobrement réagi ici), l’avocate d’origine guadeloupéenne, déléguée générale à l’Outre-mer à la Ville de Paris, avait le soutien du camp de Ségolène Royal et de celui de Bertrand Delanoë, comme celui — un peu plus récent — de Dominique Stauss-Kahn. Dans « Le Point », Cyriel Martin n’hésitait pas à titrer sur les divisions au sein du PS 20e, montrant, comme d’autres journaux, une image plutôt nauséabonde de notre arrondissement. Dans « Le Parisien », M. Charzat avait déclaré qu’il était un candidat légitime, mais qu’il se retirerait au profit de Mme Pau Langevin en cas de triangulaire si toutefois cette dernière arrivait à un meilleur score que lui. George Pau Langevin a obtenu 12 446 voix, Michel Charzat 6 322 (10 000 de moins qu’au premier tour de 2002… où il y avait 26 candidats contre 14 ce dimanche). Il n’y a donc pas photo.
L’Apéro citoyen offert samedi après-midi sur le parvis de la mairie par le député sortant aura été vain.
Tout dépend désormais de la mobilisation de l’électorat au second tour, et des consignes de vote. Si M. Charzat a « naturellement » appelé à voter pour Mme Pau Langevin dans un petit papier qui circulait dans les couloirs de la mairie, encore faudrait-il qu’il le dise publiquement et que son électorat le suive pour résister à la « vague bleue » qui a vu un nombre record de députés élus dès le premier tour (plus de 100 qui peuvent s’installer dans quelques heures, … dont un seulement n’est pas de l’UMP !).
Le 20e, qui s’est depuis longtemps montré comme une terre de résistance, devrait en théorie… résister à cette fameuse vague. Le candidat des Verts, Laurent Boudéreaux, adjoint au maire du 20e en charge de la sécurité et de l’aide aux victimes, qui a obtenu 2 598 voix (257 de plus que le candidat communiste Pierre Mansat) a très clairement apporté son soutien à George Pau Langevin.
Décryptage
Les résultats du premier tour de la 21e circonscription sont ici, ceux de 2002 là.
Outre la notable différence de candidats (14 au lieu de 26 il y a cinq ans), on peut noter quelques chiffres significatifs :
• En 2002, la candidate du Front national Martine Lehideux (lire ici sa biographie racontée par les militants locaux de Ras l’front), obtenait, malgré une abstention supérieure à 37 %, 3 343 voix (63 797 inscrits, 39 837 votants) ; ce dimanche, elle a eu 1 376 voix (75 331 inscrits, 45 189 votants). Elle n’obtient donc que 3,08 % des suffrages exprimés (deux points de moins que la moyenne nationale dans un arrondissement où Jean-Marie Le Pen était élu conseiller en 1983), contre 7,91 % voici cinq ans.
• Le vice-président de l’UDF en charge des questions statutaires, Didier Bariani, maire du 20e de 1983 à 1995, primé jeudi matin par Les Verts, se présentait sous l’étiquette UDF-Modem. Il a obtenu 4 535 voix (10,14 % des suffrages exprimés). En 2002, la candidate de l’UDF, Virginie Votier, avait eu 2 045 suffrages (4,84 %). Il a donc obtenu près de 3 points de plus que la moyenne nationale des candidats UDF-Modem (37,2 % pour François Bayrou dans son fief béarnais, qui remercie ICI sur France 2 ses électeurs et dresse à chaud le bilan national).
• En 2007 (sur 14 candidats), l’extrême gauche était représentée par trois candidats, qui ont obtenu 2030 voix. En 2002 (sur 26 candidats), cinq représentaient l’extrême gauche et avaient obtenu 1599. 27 % de voix supplémentaires pour une augmentation de 18 % du nombre d’électeurs inscrits ! Seule candidate présente aux deux scrutins, Nadine Pinochet a eu 256 voix, contre 277 en 2002.
• Le candidat de l’UMP, Raoul Delamare, qui avait obtenu 9 137 voix en 2002, en a eu ce dimanche 12 463. Il n’y avait pas cette année de candidat du Rassemblement pour la France (Jean-Louis Arajol, l’ancien syndicaliste policicier, avait eu 3 311 voix en 2002). La progression de Raoul Delamare n’est-elle due qu’à la non présentation d’un proche de Jean-Louis Borloo ?
La désignation par le siège du Parti socialiste de Mme Pau Langevin (militante PS du 20e depuis 1975) comme candidate officielle avait été due à l’intervention du député de la Guadeloupe (4e circonscription), Victorin Lurel, qui avait démissionné du secrétariat national du PS en juillet 2006 pour protester contre la non représentation de l’Outre-mer à Paris. Au premier tour, M. Lurel est arrivé largement en tête avec 10 991 voix (48,85 % des suffrages exprimés) contre 8 543 voix au 1er tour de 2002 (38,72 %), qui lui avaient permis de battre au second tour l’inusable Philippe Chaulet (UMP) avec 500 voix d’avance. Ce dimanche, l’UMP n’a réalisé que 0,03 % avec… 6 voix sur 22 501 suffrages exprimés.
Le second tour, dimanche 17 juin, verra s’affronter dans la 21e circonscription de Paris deux avocats, un de l’UMP et une du PS. Le blogue de campagne de Raoul Delamare (UMP) est ici, celui de George Pau Langevin (PS) là.
Fabien Abitbol
Photo GPS 20
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