Dans deux arrêts concernants deux affaires distinctes, l'assemblée plénière de la Cour de cassation a décidé le 5 avril dernier que diverses dispositions du Code de la sécurité sociales prises suite à la Loi 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale étaient discriminantes à l'endroit des enfants étrangers. Sur son site Internet, le Défenseur des Droits a sobrement annoncé que ses avis avaient été suivis.
Dans le premier arrêt, il s'agissait d'un père de famille algérien qui, depuis 2007, se battait auprès des diverses instances car la CAF de Paris avait exigé pour son enfant des documents relatifs à son entrée sur le territoire français.Dans le cas d'un ressortissant algérien résidant légalement dans un pays de l'Union européenne, l'Assemblée plénière de la Cour a appliqué l’accord euro méditerranéen établissant une association entre la Communauté européenne et ses Etats membres signé le 22 avril 2002 d'une part, et la décision 2005/690/CE du Conseil du 18 juillet 2005 d'autre part. Ainsi, pour son enfant, ce monsieur doit être traité au même titre qu'un ressortissant français, et les articles L. 512 2, D. 512 1 et D. 512 2 du code de la sécurité sociale, demandant notamment un certificat médical dans le cadre du regroupement familial ne sont pas exigibles par la CAF. L'affaire est renvoyée devant la Cour d'appel de Paris "autrement composée".
Dans le second arrêt, le requérant était la CAF du Gard. Cette caisse avait appliqué les articles L. 512 1, L. 512 2 et D. 511 1 du code de la sécurité sociale au détriment d'un ressortissant turc qui demandait depuis août 2007 des allocations familiales pour trois enfants. Sauf qu'à lui la justice avait donné raison, c'est pourquoi la CAF en est arrivée à la Cour de cassation. Dans ses attendus, la Cour souligne que la juridiction d'appel a jugé à bon droit sur la base d'une décision du conseil d’association CEE Turquie du 19 septembre 1980 concernant les travailleurs turcs et leur famille. Elle a rejeté le pourvoi de la CAF du Gard.
Sur les deux arrêts rendus début avril, la Cour de cassation a publié un communiqué unique. Qui a eu peu d'écho dans les médias.Pourtant, voici un peu moins de deux ans, l'interprétation de la haute juridiction différait sur ce thème. Comme le CIRE l'avait déjà relevé, il n'y a aucune raison de considérer comme irrégulier en France un étranger mineur.
Pour Valeurs Actuelles, qui a évoqué l'une des deux affaires la semaine dernière, c'est en quelque sorte la porte ouverte à la polygamie. Rien que ça. Et même Marine Le Pen est tombée dans le panneau, publiant avant-hier un communiqué faisant état de "nouveaux droits pour les familles polygames".
Non, la Cour de cassation n'a fait que dire le droit, et rappeler que la loi de décembre 2005 sur la sécurité sociale n'était pas parfaite, et en tout cas n'avait pas à etre interprétée par les CAF au détriment des enfants. La loi en question est notamment signée de Xavier Bertrand et Jean-François Copé, comme on peut le constater sur Légifrance.
Fabien Abitbol
NB: mardi 21 mai, pas de Journal officiel pour cause de lendemain de jour férié.