Alors que la situation des migrants tunisiens récemment arrivés à Paris fait l'objet d'une veille sanitaire et que le gouvernement veut une fois de plus restreindre l'accès aux soins aux étrangers, en limitant le droit au séjour pour soins, dix médecins représentant autant d'organisations publient un communiqué sur le site de Médecins du Monde, à lire ci-dessous. Le gouvernement y est accusé de «mettre en grave danger la santé de 28 000 personnes» qui, en cas d'expulsion, «seraient exposées à un risque vital».
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Le gouvernement veut expulser les étrangers malades - Nous, médecins, continuerons à les soigner
Aujourd’hui, le droit français prévoit qu’une personne de nationalité étrangère, résidant en France, et atteinte d’une maladie grave, a droit à une carte de séjour pour soins et ne peut être expulsée si elle n’a pas la garantie d’un accès effectif à une prise en charge médicale dans son pays d’origine.
Depuis quelques mois, le projet de loi relatif à l’immigration remet substantiellement en cause ce droit au séjour pour soins et cette protection contre l’éloignement des étrangers malades. Le processus législatif a aggravé les restrictions au gré des navettes parlementaires; il touche très bientôt à sa fin avec la commission mixte paritaire ce 4 mai.
Aussi, face aux enjeux en cause, nous, médecins de terrain, engagés dans des associations, des sociétés savantes ou des syndicats, avons interpellé, ensemble, le Premier ministre fin mars pour connaître sa position et tenter d’infléchir le cours des choses.
Après un premier refus de dialogue de sa part et devant notre insistance, nous avons été finalement reçus par son cabinet le vendredi 29 avril.
Nous lui avons fait valoir combien le dispositif actuel, clair et encadré, répondait à des objectifs fondamentaux de santé individuelle et de Santé publique. Nous lui avons indiqué en quoi cette réforme était injustifiée compte tenu de la stabilité et de la faiblesse du nombre de cartes de séjour délivrées dans ce cadre (28 000) et de l’absence avérée de migration thérapeutique. Nous lui avons montré en quoi la réforme envisagée était dangereuse : péril de la santé et de la vie des personnes concernées, menace pour la santé publique, atteinte au secret médical, entrave au contrôle effectif du juge, et augmentation des dépenses publiques.
Notre échange a démontré combien il était nécessaire d’expliciter les enjeux en cause tant ils apparaissaient avoir été sous-évalués.
Aujourd’hui, si le gouvernement persiste à restreindre le droit au séjour pour soins, c’est en connaissance de cause et en toute responsabilité qu’il va mettre en grave danger la santé de 28 000 personnes. En cas d'expulsion, et faute d'un accès effectif aux soins, ces personnes seraient exposées à un risque vital.
En tout état de cause, nous, médecins, continuerons à soigner toutes les personnes nécessitant des soins, quels que soient leur nationalité et leur statut administratif, conformément à nos principes déontologiques.
Dr Bruno SPIRE, Président de AIDES
Dr Pierre LOMBRAIL, Président de la SFSP
Dr Didier FASSIN, Président du COMEDE
Dr Patrick DUBREIL, Président du SMG
Dr Marie-Pierre ALLIE, Présidente de MSF
Dr Olivier BERNARD, Président de MDM
Dr François WILTHIEN, Vice-président de MGFrance
Dr Carine FAVIER, Présidente nationale du Planning familial
Dr Jean-Pierre GEERAERT, Représentant du COMEGAS
Dr Nathalie DE CASTRO et Dr Matthieu LAFAURIE, initiateurs de l’Appel «accessibilité effective» signé par 1 400 médecins
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